(Washington) Un Libyen soupçonné d’avoir assemblé et programmé la bombe de l’attentat de Lockerbie en Écosse, tuant 270 personnes en décembre 1988, est détenu par les États-Unis, selon ce qu’ont annoncé dimanche les autorités américaines.

Un porte-parole du département de la Justice a confirmé dans un courriel transmis à l’AFP l’arrestation et la mise en détention d’Abou Agila Mohammad Massoud, révélée auparavant par le parquet écossais.

« Il doit comparaître devant un tribunal du district de Columbia », c’est-à-dire la capitale Washington, a précisé le porte-parole, sans indication de date.

Aucune précision n’a été donnée sur les circonstances entourant l’arrestation de M. Massoud.

Selon le New York Times, il a été arrêté par la police fédérale (FBI) et est en cours d’extradition vers les États-Unis.

« Les familles des victimes de l’attentat de Lockerbie ont appris que le suspect Abou Agila Mohammad Massoud est détenu par les autorités américaines », avait indiqué auparavant le parquet écossais dans un communiqué.  

« Le parquet écossais et la police, en coordination avec le gouvernement américain et les collègues américains, continueront à poursuivre cette enquête avec pour seul but de mener devant la justice ceux qui ont agi au côté d’al-Megrahi », seul condamné dans cette affaire, a-t-il ajouté.

Dans leur propre communiqué dimanche, les familles des victimes ont salué cette arrestation, parlant d’un « pas important » dans leur quête de justice et disant « attendre avec impatience la tenue du procès ».

L’attentat avait visé un vol transatlantique reliant Londres à New York. L’appareil, un Boeing 747 de la Pan Am, avait explosé le 21 décembre 1988 au-dessus du village écossais de Lockerbie, tuant les 259 passagers et membres d’équipage et 11 personnes au sol.

Une seule personne a été condamnée pour cet attentat : le Libyen Abdelbaset Ali Mohamed al-Megrahi, décédé en 2012. Il avait toujours clamé son innocence.

Libéré le 20 août 2009 par la justice écossaise, en raison d’un cancer en phase terminale, il avait reçu un accueil triomphal à son retour à Tripoli, suscitant une polémique en Grande-Bretagne, accusée d’avoir agi pour préserver un contrat pétrolier avec la Libye.

Régime de Kadhafi

En décembre 2020, 32 ans après le drame, la justice américaine avait annoncé poursuivre Abou Agila Mohammad Massoud, ancien membre des services de renseignement de Mouammar Kadhafi et à l’époque détenu en Libye, l’accusant d’avoir fabriqué la bombe.

L’attentat de Lockerbie est le plus meurtrier jamais commis sur le territoire du Royaume-Uni, mais aussi le deuxième plus meurtrier contre des Américains (190 morts) après les attentats du 11 septembre 2001.

Le régime du dictateur libyen Mouammar Kadhafi avait reconnu officiellement sa responsabilité dans l’attentat de Lockerbie en 2003 et payé 2,7 milliards de dollars de dédommagement aux familles des victimes.

L’enquête avait été relancée en 2016, quand la justice américaine avait appris que M. Massoud avait été arrêté après la chute du dictateur et aurait fait une confession aux services de renseignement du nouveau régime libyen en 2012.

L’année dernière, la justice écossaise a rejeté l’appel formé par la famille de al-Megrahi, estimant qu’il n’y « avait pas d’erreur judiciaire ».

La justice avait également balayé la défense de la famille du condamné, qui estimait que des documents liés à l’affaire, que les autorités britanniques refusent de déclassifier, auraient permis d’aboutir à un verdict différent.  

Ces documents mettraient en cause l’Iran, en représailles à un avion civil iranien abattu par un missile américain en juillet 1988 tuant 290 personnes.

L’avocat de la famille al-Megrahi, Aamer Anwar, a pour sa part dénoncé une nouvelle fois, dans un communiqué, une « erreur judiciaire » visant son client et dit « examiner ce que ces développements signifient en termes d’un nouvel appel potentiel ».

Qu’est-ce que l’attentat de Lockerbie ?

Le 21 décembre 1988, à 19 h 03, le vol 103 de la compagnie américaine Pan Am reliant Londres à New York explose en vol au-dessus du village écossais de Lockerbie, faisant 270 morts.

Des scènes de cauchemar suivent l’explosion du Boeing 747 qui volait à 9400 mètres d’altitude, 38 minutes après son décollage : des fragments de corps, des débris de fuselage et de bagages sont éparpillés sur le village et jusqu’à près de 130 kilomètres du lieu où la bombe s’est déclenchée.

L’appareil transportait 259 passagers et membres d’équipage originaires de 21 pays, dont 33 Britanniques et 188 Américains. Trente-cinq étudiants de l’université américaine de Syracuse, près de New York, qui rentraient chez eux après un semestre à l’étranger, périssent dans la catastrophe.

Onze habitants de Lockerbie sont également tués par une partie du fuselage dans la rue Sherwood Crescent. Un autre gros morceau tombe dans la forêt de Kielder, l’une des plus denses du pays.

L’attentat de Lockerbie est le plus meurtrier jamais commis sur le territoire du Royaume-Uni, mais aussi le deuxième plus meurtrier contre des Américains après les attentats du 11 septembre 2001.