(Washington) La perquisition effectuée lundi par le FBI au domicile de l’ancien président Donald Trump en Floride continue de secouer Washington et, plus largement, la politique américaine, au milieu d’un tourbillon de questions sur ce qui a conduit le département de la Justice à prendre une mesure aussi étonnante.

La perquisition a eu lieu après la visite, au printemps dernier, d’agents fédéraux — dont un responsable du contre-espionnage du département de la Justice — à Mar-a-Lago, le club privé et la résidence de M. Trump à Palm Beach, en Floride, pour discuter de documents que l’ancien président avait emportés de manière inappropriée lorsqu’il a quitté la Maison-Blanche.

M. Trump était brièvement présent lors de cette visite, de même qu’au moins un de ses avocats, selon des personnes au fait de la situation.

Ces documents contenaient de nombreuses pages d’information classifiée, selon une personne connaissant leur contenu. Selon la loi, les documents présidentiels doivent être conservés et envoyés aux Archives nationales lorsqu’un président quitte ses fonctions. On ne sait toujours pas quels documents spécifiques les agents auraient pu chercher lundi, ni pourquoi le département de la Justice et le FBI ont décidé de poursuivre les recherches maintenant.

M. Trump a retardé pendant de nombreux mois le retour de 15 boîtes de documents demandés par les responsables des Archives nationales et ne l’a fait qu’en janvier, lorsque la menace d’une action pour les récupérer s’est accrue.

Les archives ont transmis l’affaire au département de la Justice au début de l’année.

Soutien de droite

Cette perquisition est le dernier tournant remarquable dans les enquêtes de longue haleine sur les actions de M. Trump avant, pendant et après sa présidence — et alors même qu’il envisage d’annoncer une nouvelle candidature à la Maison-Blanche.

Elle intervient alors que le département de la Justice a intensifié son enquête distincte sur les efforts de M. Trump pour rester en fonction après sa défaite à l’élection de 2020 et que l’ancien président fait également face à une enquête criminelle en Géorgie et à des actions civiles à New York.

M. Trump considère depuis longtemps le FBI comme un outil des démocrates qui lui cherchent des poux. La perquisition a déclenché une réaction furieuse parmi ses partisans au sein du Parti républicain et de l’extrême droite.

Kevin McCarthy, chef de file des républicains à la Chambre des représentants, a laissé entendre qu’il avait l’intention d’enquêter sur le procureur général Merrick B. Garland si les républicains prenaient le contrôle de la Chambre en novembre. Une délégation de républicains de la Chambre devait se rendre au club de golf de M. Trump à Bedminster, dans le New Jersey, pour dîner avec lui mardi soir.

PHOTO MARCO BELLO, REUTERS

Manifestants pro-Trump devant Mar-a-Lago, mardi

Le langage agressif était omniprésent dans le camp de droite alors que la nuit de lundi à mardi se transformait en matinée.

« Ceci. Signifie. Guerre », a écrit le Gateway Pundit, un média pro-Trump, dans un message en ligne qui a été rapidement amplifié par un compte Telegram lié à Steve Bannon, ancien conseiller politique de Trump.

Trump déchiquetait des documents officiels

Le FBI a dû convaincre un juge qu’il avait une cause probable qu’un crime avait été commis, et que les agents pourraient trouver des preuves à Mar-a-Lago, pour obtenir un mandat de perquisition. Une perquisition au domicile d’un ancien président aurait presque certainement nécessité l’approbation de hauts responsables du bureau et du département de la Justice.

La perquisition ne signifie toutefois pas que les procureurs ont déterminé que M. Trump a commis un crime.

Malgré la nature historique et politiquement incendiaire de la perquisition, ni le FBI ni le département de la Justice n’ont commenté ou expliqué publiquement le fondement de leur action, conformément à leur politique de ne pas discuter des enquêtes en cours.

PHOTO DAKOTA SANTIAGO, THE NEW YORK TIMES

Des gens demandant l’arrestation de Donald Trump et de certains de ses proches manifestent devant la Trump Tower, à New York, au lendemain de la perquisition du FBI à Mar-a-Lago.

M. Trump se trouvait dans la région de New York au moment de la perquisition. « Un autre jour au paradis », a-t-il déclaré lundi soir lors d’une conférence téléphonique pour Sarah Palin, qui brigue un siège au Congrès en Alaska.

Eric Trump, l’un de ses fils, a déclaré à Fox News que c’est lui qui avait informé son père de la perquisition et que le mandat concernait des documents présidentiels.

Donald Trump a fait campagne pour la présidence en 2016 en critiquant la pratique d’Hillary Clinton, qui avait conservé un serveur de messagerie privé pour les messages liés au gouvernement lorsqu’elle était secrétaire d’État. Il était connu tout au long de son mandat pour déchirer des documents officiels destinés à être conservés dans les archives présidentielles. Une personne connaissant bien ses habitudes a déclaré que certains documents classifiés étaient déchiquetés dans sa chambre et ailleurs.

La recherche avait pour but, du moins en partie, de déterminer s’il restait des documents à Mar-a-Lago, a déclaré une personne au courant de la situation. Elle a eu lieu lundi matin, a précisé cette personne, bien que M. Trump ait déclaré que des agents étaient encore sur place plusieurs heures plus tard.

« Après avoir travaillé et coopéré avec les agences gouvernementales concernées, ce raid inopiné sur ma maison n’était ni nécessaire ni approprié », a déclaré Donald Trump, soutenant qu’il s’agissait d’un effort pour l’empêcher de se présenter à la présidence en 2024. « Une telle agression ne pourrait avoir lieu que dans des pays brisés du tiers-monde. »

« Ils ont même forcé mon coffre-fort ! », a-t-il écrit.

Trump n’a pas partagé de détails sur ce que les agents du FBI ont dit rechercher.

L’attachée de presse de la Maison-Blanche, Karine Jean-Pierre, a déclaré mardi que le président Joe Biden n’avait pas été informé par le département de la Justice avant que le FBI intervienne.

D’autres documents classifiés déjà récupérés

En janvier de cette année, les Archives nationales ont récupéré 15 boîtes que M. Trump avait emportées avec lui à Mar-a-Lago, de la résidence de la Maison-Blanche, à la fin de son mandat. Ces boîtes contenaient des documents soumis au Presidential Records Act, qui exige que tous les documents et dossiers relatifs aux affaires officielles soient remis aux archives.

PHOTO STEFANI REYNOLDS, ARCHIVES THE NEW YORK TIMES

Des employés des Archives nationales embarquent des boîtes de documents devant la Maison-Blanche, le 15 janvier 2021, 5 jours avant le départ de Donald Trump de la présidence.

Les articles contenus dans les boîtes comprenaient des documents, des souvenirs, des cadeaux et des lettres.

Les Archives nationales n’ont pas décrit les documents classifiés qu’elles ont trouvés, si ce n’est qu’il s’agissait d’« informations classifiées de sécurité nationale ».

Parce que les Archives nationales ont « identifié des informations classifiées dans les boîtes », l’agence « a été en communication avec le département de la Justice », a déclaré David S. Ferriero, l’archiviste national, au Congrès à l’époque.

Les procureurs fédéraux ont ensuite ouvert une enquête devant un grand jury, selon deux personnes informées de l’affaire. Les procureurs ont émis cette année une assignation à comparaître aux archives pour obtenir les boîtes de documents classifiés, selon les deux personnes au courant de l’affaire, qui ont parlé sous couvert d’anonymat en raison de l’enquête en cours.

Les autorités ont également formulé des demandes d’entrevues auprès de personnes ayant travaillé à la Maison-Blanche dans les derniers jours de la présidence de Trump, selon l’une de ces sources.

Au printemps, un groupe d’agents fédéraux — dont au moins un agent impliqué dans le contre-espionnage — a visité Mar-a-Lago à la recherche de certains documents, selon une personne familière de la réunion.

Cet article a été initialement publié dans le New York Times.