(San Antonio) Les hommages aux 53 migrants morts après avoir voyagé dans un camion surchauffé se poursuivaient mercredi, au Texas, avec notamment un rassemblement improvisé à l’endroit où a eu lieu la sinistre découverte.

Roberto Alvares, 48 ans, a bravé le soleil de plomb pour venir déposer des roses et des bougies. Pour cet habitant du quartier, arrivé illégalement aux États-Unis, la tragédie rouvre de vieilles blessures.

« On se met à leur place, à la place des gens qui en sont passés par là, parce qu’on l’a aussi vécu », dit-il.

Autour de lui, des dizaines de personnes sont également venues saluer la mémoire des disparus. Au pied de trois grandes croix ornées d’un tissu sombre, s’amoncellent bouquets de fleurs, bougies et bouteilles d’eau.

« Tout cela me brise le cœur, car j’ai de la famille qui a vécu la même chose », confie Veronica Vazquez, 37 ans. « Tous mes cousins, mes oncles qui viennent aux États-Unis, le font illégalement. Certains passent par le fleuve [le Rio Grande] et d’autres par le désert », deux itinéraires extrêmement dangereux.

« Vraiment mal »

La veille, déjà, des dizaines de personnes, y compris des enfants, s’étaient rassemblées dans un parc sous une pluie battante pour une veillée à la lueur de leurs téléphones portables. Le maire de la ville, Ron Nirenberg, a écouté en silence sans faire de déclaration.

« Ça fait vraiment mal », avait dit Andrea Osorio, Mexicaine de 48 ans et l’une des personnes à avoir pris la parole pour exprimer leur douleur et leur colère.

« Ça fait 33 ans que je suis ici [à San Antonio], sans papiers, et j’ai peur tous les jours », avait-elle confié. « Je sais pourquoi nous sommes venus. Nous ne sommes pas venus commettre des crimes, nous sommes seulement venus pour un avenir meilleur. »

C’est lundi soir qu’un employé municipal de San Antonio a entendu un appel à l’aide près d’une route où il travaillait, et a entrouvert la porte arrière d’un poids lourd abandonné par une température caniculaire.

À l’intérieur, se trouvaient des dizaines de cadavres et des personnes « conscientes », souffrant d’hyperthermie et de déshydratation aiguë. Onze restent hospitalisées.

Sur les 53 victimes, 27 étaient originaires du Mexique, 14 du Honduras, sept du Guatemala et deux du Salvador, une personne restant encore à identifier, selon Francisco Garduno, à la tête de l’Institut national des migrations du Mexique.

Joe Biden a déploré mardi une « tragédie » et appelé à « lutter contre le trafic criminel, pesant plusieurs milliards de dollars, qui exploite les migrants et coûte beaucoup trop de vies innocentes ».

« Terrible »

Lors de la veillée, Carlos Eduardo Espina, 23 ans, a critiqué la politique migratoire des États-Unis, pays dans lequel il est arrivé à l’âge de 5 ans.

« C’est terrible, c’est à briser le cœur », a dit ce militant dont le père est uruguayen et la mère mexicaine.

« Mais tous les jours des gens meurent noyés dans le fleuve, tous les jours des gens meurent dans le désert. La mort, c’est la norme dans l’immigration aux États-Unis », a-t-il dénoncé.

Le jeune homme veut des politiques migratoires plus humaines et l’augmentation du nombre de visas accordés chaque année.

« Il faut continuer à se battre, sinon ça va continuer », a-t-il réclamé, en accusant les gouvernements des pays d’origine des migrants de ne pas accorder d’importance au bien-être de leurs ressortissants.

Guillermina Barrón, 38 ans, écoutait en silence.

« Malheureusement, je m’identifie beaucoup à ce qui est en train de se passer parce que je suis Mexicaine, même si j’ai émigré il y a 20 ans », a-t-elle dit, les yeux embués de larmes.

« Je ressens beaucoup de douleur et d’impuissance. Il faut changer beaucoup de choses, parce que les vies perdues sont nombreuses », a-t-elle regretté.