(New York) Le Congrès américain a donné jeudi son accord final à un projet de loi qui garantit que les personnes victimes de harcèlement sexuel au travail peuvent intenter un recours devant les tribunaux, une étape importante pour le mouvement #metoo aux États-Unis.

La mesure, qui devrait être signée par le président Joe Biden, ne permettra plus qu’un contrat de travail oblige les victimes à régler les cas d’agression sexuelle ou de harcèlement par arbitrage interne plutôt que par un tribunal — un mécanisme qui profite souvent aux employeurs et empêche les allégations d’inconduite de devenir publiques.

Par ailleurs, le projet de loi est rétroactif, ce qui annulera toutes ces dispositions dans les contrats de travail de tout le pays. Les employés pourront aussi intenter maintenant une action en justice.

La sénatrice Kirsten Gillibrand, qui a parrainé le projet de loi, a parlé de « l’une des réformes du milieu de travail les plus importantes de l’histoire américaine ». La sénatrice démocrate de l’État de New York a déclaré que le « processus d’arbitrage forcé » était secret et biaisé, et qu’il privait les Américains d’un droit constitutionnel fondamental : se faire entendre devant un tribunal.

Appui des deux partis

Mme Gillibrand, qui s’est concentrée en politique sur la lutte contre le harcèlement sexuel et les inconduites sexuelles dans l’armée, avait déposé le projet de loi en 2017, avec le sénateur républicain Lindsey Graham.

Le projet de loi bénéficiait du soutien inhabituel des deux partis au sein d’un Congrès américain extrêmement polarisé. Cela a permis au projet de loi d’être adopté au Sénat par consentement unanime — une procédure rarement utilisée pour un projet de loi important, en particulier s’il touche des dizaines de millions d’Américains.

La Chambre des représentants a adopté le projet de loi cette semaine sur une forte base bipartite, par un vote de 335 à 97.

Chez Fox News

Une ancienne présentatrice de « Fox News », Gretchen Carlson, a témoigné en faveur du projet de loi. Elle avait accusé le PDG du réseau Roger Ailes, aujourd’hui décédé, de lui avoir fait des avances non désirées et d’avoir ensuite nui à sa carrière.

PHOTO J. SCOTT APPLEWHITE, ASSOCIATED PRESS

Une ancienne présentatrice de « Fox News », Gretchen Carlson (à droite), a célébré l’adoption de la loi avec la sénatrice Gillibrand. Elle avait témoigné en faveur du projet de loi.

Certains contrats d’employés de la chaîne Fox comportaient des clauses d’arbitrage contraignantes.

On estime que 60 millions de travailleurs américains sont soumis actuellement à de telles dispositions insérées dans leur contrat de travail. Cette pratique répandue a été fortement critiquée à la suite du mouvement #metoo.

Le chef de la majorité démocrate au Sénat, Chuck Schumer, a qualifié de « presque médiéval » le fait de forcer les victimes de harcèlement et d’agression « à se taire, à n’en parler à personne et à ne pas demander justice ».