Le président des États-Unis, Joe Biden, a demandé aux services de renseignement du pays de « redoubler d’efforts » pour lui permettre d’en arriver à une conclusion claire quant à l’origine de la pandémie de COVID-19.

Son administration estime qu’il est impossible pour l’heure de déterminer si le virus responsable de la catastrophe est passé naturellement de l’animal à l’homme avant de se répandre partout sur la planète ou s’il s’est échappé accidentellement d’un laboratoire de virologie de Wuhan menant des recherches sur les coronavirus.

Une équipe d’enquêteurs de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) ayant enquêté en Chine au début de l’année avec l’assentiment des autorités locales avait écarté l’hypothèse de la fuite de laboratoire, la qualifiant d’« extrêmement improbable », mais nombre de pays se sont montrés critiques de leurs conclusions.

Plusieurs chercheurs de renom ont demandé la tenue d’une enquête indépendante sans infléchir la position de Pékin, qui accuse les États-Unis de véhiculer des thèses « conspirationnistes » pour ternir son image.

Joe Biden, dans une déclaration relayée mercredi par la Maison-Blanche, a indiqué qu’il avait demandé en mars à son conseiller à la sécurité nationale d’obtenir des services de renseignement une appréciation des preuves jouant en faveur d’une théorie ou de l’autre.

Leur constat, a-t-il noté, est qu’il n’existe pas, pour l’heure, d’éléments suffisants pour conclure que l’une des deux hypothèses considérées par les États-Unis est plus crédible que l’autre.

Il a précisé qu’il avait demandé à recevoir un rapport plus détaillé sur le sujet d’ici 90 jours et qu’il entendait entre-temps continuer de faire pression sur le régime chinois en vue de permettre la tenue d’une enquête « pleinement transparente » permettant un accès sans restriction aux données pertinentes.

Les États-Unis ont plaidé en ce sens mardi lors d’une réunion annuelle des pays membres de l’OMS, mais se sont butés à l’opposition du régime communiste chinois, qui considère l’enquête sur l’origine de la pandémie comme terminée.

Laboratoire controversé

Le Wall Street Journal a alimenté la controverse le week-end dernier en relevant que les services de renseignement américains avaient obtenu des informations suggérant que trois employés du laboratoire de virologie de Wuhan étaient tombés malades en novembre 2019 et avaient développé des symptômes compatibles avec la COVID-19 avant l’apparition du premier cas officiel.

Ces informations, rejetées comme entièrement fausses par la Chine, figuraient déjà dans un dossier divulgué en janvier par l’administration de l’ex-président Donald Trump peu avant son départ du pouvoir.

On y affirmait par ailleurs que le laboratoire de Wuhan avait mené des recherches de nature militaire pour la Chine, sans présenter de preuves à l’appui.

Une source au département d’État a indiqué au Washington Post récemment que le dossier en question avait été préparé comme un « document à charge » pour embarrasser Pékin en écartant les éléments suggérant que la transmission initiale ait pu se faire naturellement de l’animal à l’homme.

En février 2020, un groupe de chercheurs occidentaux s’étaient portés à la défense de leurs homologues chinois en affirmant que l’idée d’une erreur de laboratoire était à exclure catégoriquement.

Des questions ont cependant été soulevées après qu’il a été révélé que l’un des instigateurs de la missive chapeautait une organisation new-yorkaise ayant financé des recherches sur les coronavirus à Wuhan.

Une réponse plus précise

En mars de cette année, une vingtaine de scientifiques américains et européens ont dénoncé, dans une lettre ouverte, la composition de l’équipe chargée de l’enquête de l’OMS, le contrôle exercé par la Chine sur ses allées et venues et son accès aux données ainsi que les limites imposées par la définition étroite de son mandat de recherche.

L’un des signataires, le microbiologiste Richard Ebright, de l’Université Rutgers, a indiqué sur Twitter que l’équipe déléguée par l’OMS n’avait pu fournir de « nouvelles informations » et qu’une véritable enquête indépendante était requise pour obtenir une réponse plus précise. Il a précisé qu’aucun signataire ne croyait à l’hypothèse que le virus avait été développé en laboratoire à des fins militaires.

Plusieurs ténors de la lutte contre la pandémie aux États-Unis ont souligné au cours des derniers jours qu’ils croyaient à la nécessité de mener des recherches plus approfondies sur les causes de la pandémie tout en relevant que l’hypothèse de la transmission de l’animal à l’homme demeurait « la plus probable ».

Le directeur de l’Institut américain des maladies infectieuses, Anthony Fauci, a notamment déclaré qu’il n’était pas convaincu « à 100 % » par ce scénario. « Je pense qu’il faut enquêter jusqu’à ce que l’on comprenne au meilleur de nos capacités ce qui est arrivé », a-t-il noté il y a quelques jours sur la chaîne CNN.

Sa sortie lui a valu les critiques du Global Times, porte-voix de Pékin, qui lui reproche « d’alimenter un gigantesque mensonge contre la Chine » en illustrant du même coup la « dégénérescence morale » des élites américaines.