(Washington) Les États-Unis ont pris des sanctions économiques jeudi à l’encontre de sociétés de biotechnologies et haute technologie chinoises, les accusant de contribuer à amplifier la surveillance de la minorité ouïghoure de la province chinoise du Xinjiang.

Déplorant sans relâche les violations des droits humains et pointant les menaces pour la sécurité nationale américaine, l’administration du président Joe Biden multiplie les sanctions économiques contre les intérêts chinois, contribuant à la détérioration des relations diplomatiques avec Pékin.

Jeudi, d’une part, le ministère du Commerce a placé une trentaine d’entités sur une liste noire restreignant les exportations sensibles ; d’autre part, le Trésor a interdit aux ressortissants américains de commercer avec huit entreprises high tech, dont le numéro 1 mondial des drones DJI.

Ce dernier était déjà sur la liste noire du ministère du Commerce depuis décembre 2020.

Ces mesures interviennent au lendemain de celles visant cinq autres entités chinoises accusées de favoriser le trafic d’opiacés de synthèse, responsables d’un nombre record de décès par surdose aux États-Unis. Pékin a fustigé ces décisions, jugées « non constructives ».

Le ministère du Commerce et le Trésor ont cette fois décidé de s’attaquer à la haute technologie chinoise, qui serait utilisée pour violer les droits de la population ouïghoure, majoritairement musulmane, dans la région du Xinjiang (nord-ouest).

Des groupes de défense des droits humains ont rapporté que la Chine exerçait une surveillance sans précédent sur cette population via notamment des recherches à l’aide d’ADN et l’usage d’intelligence artificielle pour de la reconnaissance faciale.

« La recherche scientifique en biotechnologie et en innovation médicale peut sauver des vies. Malheureusement, la République populaire de Chine choisit d’utiliser ces technologies pour contrôler son peuple et réprimer les membres des groupes minoritaires ethniques et religieux », a déploré la secrétaire américaine au Commerce Gina Raimondo, pour justifier les nouvelles sanctions.

Les instituts de recherche visés par les dernières actions américaines comprennent des centres axés sur les transfusions sanguines, la bio-ingénierie et la toxicologie.

La high tech au service de la répression

Cela « montre comment les entreprises privées des secteurs chinois des technologies de défense et de surveillance coopèrent activement avec le gouvernement dans ses efforts pour réprimer les membres des groupes ethniques et religieux minoritaires », a déclaré le sous-secrétaire au Trésor chargé du terrorisme et du renseignement financier, Brian Nelson.

« Le Trésor reste déterminé à garantir que le système financier américain et les investisseurs américains ne soutiennent pas ces activités », a-t-il ajouté.

Au total, 37 entités ont été ajoutées à la liste du ministère du Commerce des entreprises accusées d’être impliquées dans des activités « contraires à la politique étrangère et aux intérêts de sécurité nationale des États-Unis ».

La liste comprend des entreprises chinoises, mais aussi des firmes de Géorgie, de Malaisie et de Turquie, selon le document qui doit être publié au journal officiel vendredi.

Intensification des sanctions

Concrètement, Washington a décidé de restreindre les exportations sensibles vers l’Académie chinoise des sciences médicales militaires et 11 de ses instituts de recherche en raison de ses travaux de biotechnologie, y compris « de prétendues armes de contrôle du cerveau », détaille-t-il.

Des experts, des témoins et le gouvernement américain affirment que plus d’un million d’Ouïghours et d’autres musulmans turcophones sont incarcérés dans des camps. Outre la stérilisation forcée des femmes, la Chine y est accusée d’imposer le travail forcé.

Les États-Unis ont qualifié la campagne de génocide et, invoquant les problèmes de droits humains, prévoient un boycottage de la représentation officielle aux Jeux d’hiver de Pékin l’année prochaine.

La Chine affirme qu’il s’agit de centres de formation professionnelle et que, comme de nombreux pays occidentaux, le gouvernement cherche à réduire l’attrait de l’islam radical à la suite d’attentats meurtriers.

Mais les États-Unis ne sont pas près de relâcher la pression. Ils devraient même prochainement devenir le premier pays à interdire toutes les importations en provenance du Xinjiang, arguant que le travail dans les camps est si répandu qu’il est difficile de séparer les produits qui sont fabriqués dans ces conditions des autres marchandises.

Après de longues négociations, élus démocrates et républicains sont parvenus à un accord sur une loi qui interdira ainsi toute importation en provenance de la région, à moins qu’il n’existe une preuve tangible que la production n’implique pas de travail forcé.

Le Xinjiang est une source d’approvisionnement majeure de coton. Le Workers Rights Consortium, qui surveille les usines, estime que 20 % des vêtements importés aux États-Unis chaque année contiennent de la matière en provenance de cette région.