(Washington) Le droit à l’avortement pourrait bientôt « être remisé aux oubliettes » de l’Histoire américaine, a espéré mardi l’ancien vice-président Mike Pence devant un parterre de militants anti-avortement eux aussi persuadés que leur heure a sonné.

À la veille d’une audience cruciale devant la Cour suprême des États-Unis, l’ancien numéro deux de Donald Trump, connu pour sa foi chrétienne et ses valeurs ultra-conservatrices, a affiché un optimisme rare lors d’une intervention à Washington.

« Je crois de tout mon cœur que, demain ou dans un futur proche, la Cour suprême va renverser Roe v. Wade », a-t-il lancé, en référence à l’arrêt historique de la haute juridiction qui, en 1973, a garanti le droit des Américaines à avorter.

« Ce ne sera pas une surprise mais l’aboutissement de 50 ans » de lutte, a-t-il ajouté, en appelant les militants anti-avortement à rester mobilisés : « Nous ne nous sommes pas battus aussi longtemps […] pour nous arrêter près de la ligne d’arrivée ! »

Une partie de la population américaine, notamment à droite et dans les milieux religieux, n’a jamais accepté la décision de 1973 et a livré un combat protéiforme pour la faire annuler.

Sur le terrain, les opposants à l’avortement se sont mobilisés près des cliniques pour tenter de décourager les femmes désireuses d’interrompre une grossesse et les médecins réalisant ces interventions.

En parallèle, dans les États conservateurs et religieux, essentiellement situés dans le sud et le centre du pays, les législateurs ont adopté des centaines de lois restrictives dont certaines en contradiction avec la jurisprudence de la Cour suprême, afin de lui fournir une occasion de revenir sur le sujet.

La dernière brique de l’édifice a été posée par le président républicain Donald Trump qui, aidé par les sénateurs de son parti, a fait entrer à la Cour suprême trois juges connus pour leurs positions anti-avortement, portant à six magistrats sur neuf la majorité conservatrice de l’instance.

« Le bon moment »

Dans cette configuration, Marjorie Dannenfelser, la présidente du groupe anti-IVG Susan B. Anthony List, s’est dite mardi « très confiante » pour l’issue des débats, qui se tiendront mercredi au sein du temple du droit américain.

Les neuf sages examineront une loi du Mississippi qui interdit d’avorter après 15 semaines de grossesse, environ deux mois avant la limite fixée par la Cour suprême correspondant au moment où le fœtus devient viable, soit vers 22 à 24 semaines de grossesse.

« On ne peut pas savoir ce qu’il se passe dans la tête des juges mais le fait qu’ils aient accepté un tel dossier », alors que rien ne les y obligeait, « montre qu’ils sont prêts à faire quelque chose avec Roe v. Wade », a-t-elle dit à l’AFP : « Soit ils vont l’annuler, soit ils vont drastiquement limiter sa portée. »

Et pour elle, ce sera la fin d’années d’une lutte « frustrante » : les États conservateurs – qui couvrent environ une moitié du pays – pourront adopter des lois interdisant les avortements et elles ne seront plus bloquées en justice.

Rebecca Downs, 30 ans dont dix à militer contre l’avortement, affichait une plus grande prudence. « On ne peut jamais savoir ce que la Cour va faire », relevait-elle, rappelant des « défaites » subies par son mouvement ces dernières années.

« Ce n’était pas le bon moment mais s’il y a bien un moment opportun, étant donné la composition actuelle de la Cour, ça doit être maintenant », ajoutait-elle avec un brin d’excitation.

« Il est temps que l’avortement disparaisse », renchérissait Cindy Collins, qui a tenté d’assister au discours de Mike Pence, mais n’a pas pu entrer faute d’accréditation. Peu importe, mercredi, cette habitante de Louisiane sera devant la Cour suprême pour faire entendre sa voix. « Et je pense que nous sommes à un moment où les juges sont davantage prêts à nous écouter… »