(Washington) Fermeture des écoles et des tribunaux à Washington, portes closes dans des ambassades, la proclamation d’un nouveau jour férié fédéral aux États-Unis pour commémorer l’émancipation des derniers esclaves s’est faite avec une rapidité tellement rare qu’elle a pris certains Américains de court vendredi.

« Est-ce que les banques et la poste sont fermées ? », « Les bureaux et écoles de l’État seront peut-être ouverts, mais la plupart fermés » : les journaux à travers ce vaste pays reflétaient une certaine confusion après la première création d’un jour férié national depuis près de quarante ans.

À minuit moins huit, jeudi soir, des parents du Maryland ont reçu le message leur annonçant officiellement que leur garderie serait fermée. « Passez un excellent week-end ! ».  

Plus tôt en fin d’après-midi, les écoles publiques de la capitale fédérale avaient aussi annoncé qu’elles seraient toutes fermées.

À travers le pays, de l’Oregon au Missouri, les tribunaux fédéraux présentaient portes closes, sauf pour certains services d’urgence.  

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Le drapeau de Juneteenth flottant sur le capitole du Wisconsin

Les autorités sanitaires américaines, elles, ont reporté une réunion prévue pour se pencher sur les effets secondaires de certains vaccins contre la COVID-19.

Et avec un calendrier déjà fortement compliqué par la pandémie, certaines ambassades des États-Unis ont aussi fermé leurs portes, en promettant de reporter les rendez-vous consulaires brusquement annulés.  

L’entrée en vigueur immédiate de « Juneteenth » n’a en revanche pas laissé le temps à Wall Street de s’adapter. Et la cloche a bien retenti vendredi matin.  

« Un jour meilleur »

Contraction des mots « juin » et « 19 » en anglais, cette date marque le jour où les derniers esclaves au Texas apprenaient, le 19 juin 1865, qu’ils étaient libres.  

« Juneteenth symbolise à la fois la longue et difficile nuit de l’esclavage et de la soumission, et la promesse d’un jour meilleur », a déclaré le président américain Joe Biden jeudi, en proclamant ce nouveau jour férié aux côtés de sa vice-présidente Kamala Harris.

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Joe Biden a signé la loi promulguant « Juneteenth » jour férié, jeudi.

Une cérémonie marquée par l’émotion, et fruit d’une succession de décisions prises avec une vitesse, et un consensus, rarissimes dans un Washington politique d’ordinaire marqué par les lenteurs et les divisions.

Mardi, un sénateur républicain qui s’opposait à la création de ce jour férié depuis un an, pour des motifs financiers, lève ses objections. Peu après, le texte est adopté à l’unanimité.

Dès le lendemain, la proclamation est approuvée à une majorité écrasante à la Chambre des représentants.  

Dans la foulée, la Maison-Blanche annonce que Joe Biden le promulguera jeudi.  

Le scepticisme règne alors aux États-Unis : le 19 juin tombant un samedi, ce jour chômé devrait, selon les règles, être déplacé au vendredi mais comment aller aussi vite ? Ce sera sûrement pour l’année prochaine.  

La direction des ressources humaines des centaines de milliers d’employés fédéraux l’annonce finalement dès jeudi : les employés du gouvernement fédéral jugés non-essentiels auront droit à un jour chômé le lendemain.   

« Rendu célèbre »

Pour beaucoup d’Américains, cette date était encore inconnue l’an dernier.

Mais après la vague historique de colère contre le racisme provoquée par la mort de George Floyd, un Afro-Américain tué par un policier blanc le 25 mai 2020 à Minneapolis, la fête de « Juneteenth » a acquis une nouvelle renommée.

Alors président, Donald Trump avait dû décaler un rassemblement de campagne prévu à cette date. Face à la controverse, il avait déclaré : « J’ai fait quelque chose de bien : j’ai rendu Juneteenth très célèbre. »

Célèbre pour ses fanfaronnades, le magnat de l’immobilier touchait en fait un vrai sujet. Hors du Texas et d’autres États du sud, qui la commémorait déjà, peu étaient les Américains blancs qui connaissaient cette date.  

Un an plus tard, les choses ont bien changé, avec des évènements organisés à travers les États-Unis comme sur la chaîne ABC, avec en invité spécial le premier président noir Barack Obama pour une émission intitulée : « Juneteenth : ensemble nous triomphons ».