(Miami Beach) C’est devenu une habitude pendant l’épidémie de coronavirus. Les plages de Miami Beach se remplissent, et les Américains accusent habitants et vacanciers d’être inconscients.

Mais « on doit bien recommencer à vivre. Sérieux ! », se défend James Mitchell, 45 ans.

James vient d’arriver de la froide Chicago. Il profite du coucher du soleil assis sur un banc et affirme que les gens ont beaucoup appris sur le coronavirus depuis l’an passé. Sa compagne, Vermell Jones, 44 ans, balaie les critiques d’un revers de la main parce qu’elle porte le masque dans les lieux fermés.

« Si vous marchez à l’air libre, je pense que vous ne devriez pas avoir » à le porter, lance-t-elle.

Le gouverneur républicain de l’État, Ron DeSantis, n’y a jamais ordonné le port obligatoire du masque. Les restaurants ont rouvert ici en mai dernier, et les plages en juin après une fermeture de trois mois en réponse à la pression du reste du pays.

Comme tous les mois de mars, pendant les vacances de printemps, des milliers de personnes affluent sur cette île barrière faisant face à Miami pour faire la fête comme si c’était leur dernier jour sur terre. Cette année, le phénomène est même plus intense, après des mois de deuil et de restrictions sanitaires dans le pays.

La nuit, point de distanciation physique. Des escarmouches se produisent avec la police, des jeunes femmes dansent sur le toit des voitures.

La campagne de vaccination contre la COVID-19 avance à grands pas aux États-Unis (plus d’un cinquième de la population a reçu au moins une dose d’un des précieux remèdes) et beaucoup sont d’humeur festive, mais Esther, 33 ans, reste « terrorisée » à l’idée d’attraper la maladie.  

« C’est un scandale que tout soit bondé », juge cette résidente de South Beach, dans le sud de l’île, qui préfère ne pas donner son nom de famille.

Miami Beach, 92 000 habitants, attire 200 000 visiteurs et travailleurs tous les jours, selon son maire, Dan Gelber.

« Nous avons 12 km de belles plages, nous avons des hôtels qui ont été très sûrs, beaucoup de restaurants en extérieur, mais nous ne voulons pas d’une foule pour qui les règles ne comptent pas », a-t-il mis en garde.

Laxiste, forcément moins sûre ?

Les Américains adorent se moquer de leurs compatriotes de Floride, notamment pour leur cohabitation avec des animaux sauvages (qui en fait des habitués de la rubrique insolite) et, maintenant, pour leur gestion de la pandémie.

Mais cela n’empêche pas certains, après avoir passé des mois confinés dans d’autres États, d’être en train de s’installer en Floride, pour justement profiter de réglementations sanitaires plus souples et d’un climat plus doux.

David Nguah, de l’agence immobilière Douglas Elliman, évoque ainsi « un énorme intérêt » pour l’immobilier de Miami, à la fois résidentiel et commercial.

« Quasiment toutes (les propriétés que nous montrons), c’est pour des gens de New York, de Californie », explique-t-il.

Ici, « ils peuvent s’asseoir à la terrasse d’un café ou d’un restaurant, s’allonger au bord d’une piscine, et où qu’ils soient à Miami Beach, ils savent qu’ils sont à 10 minutes à pied ou à vélo d’un parc en plein air ».

Rahul Sehgal raconte avoir quitté New York pour la Floride en novembre.

A New York, « il faisait trop froid pour dîner dehors, pour socialiser dans un parc, et les gens hésitaient à se voir en intérieur », dit cet ingénieur informatique de 49 ans.

Alors qu’à Miami, « j’allais avoir un peu de vie sociale, et au moins être plus heureux à l’extérieur, même en ne connaissant pas beaucoup de monde ».

Malgré son laxisme, la Floride n’a pas enregistré davantage de décès dus au coronavirus que d’autres États plus stricts.

Elle compte 151 morts pour 100 000 habitants, ce qui la place au 27e rang sur 50, loin derrière New York par exemple, deuxième avec 252, selon l’université Johns Hopkins, dont les données font référence.

« C’est un vrai phénomène », dit Amesh Adalja, professeur à la Johns Hopkins Blooomberg School of Public Health.

« Il est clair que la Floride a fait mieux que ce nous avions tous prédit », reconnaît-il, évoquant comme possibles explications le climat ou le fait que les restrictions dans des États plus rigoureux puissent, en fait, mener à des rassemblements clandestins finissant par être plus contagieux, et donc dangereux.