(Washington) Les immigrés aux États-Unis abordent la future présidence Biden avec un mélange d’espoir et d’appréhension : elle signe la fin de quatre ans de politiques draconiennes de Donald Trump sur l’immigration, mais rappelle aussi l’ère Obama, dirigeant surnommé « l’expulseur en chef ».

Joe Biden a promis qu’il chercherait dès ses 100 premiers jours au pouvoir à faire adopter une réforme de l’immigration pour régulariser quelque 11 millions de sans-papiers vivant aux États-Unis.

Le président désigné défend aussi plusieurs programmes de protection de migrants que son prédécesseur Donald Trump a tenté d’abroger, comme celui des « Dreamers » (rêveurs), pour les jeunes arrivés clandestinement dans leur enfance sur le sol américain.

« Je ne suis pas une grande fan de Biden », confie Gabriela Hernandez, venue à 5 ans du Salvador avec sa mère, et bénéficiaire de ce programme.  

« Mais je suis plutôt optimiste sur le fait que cette administration va essayer de travailler avec nous », assure la femme de 22 ans.

Créé par Barack Obama en 2012, ce programme a fourni un statut à 700 000 jeunes migrants, qui empêche de les expulser. Il a été validé en juin 2020 par la Cour suprême, un revers pour Donald Trump.

« En route pour la Géorgie »

Mais Joe Biden ne fait pas l’unanimité chez les migrants aux États-Unis.

Jorge Benitez, un autre « rêveur », dit ressentir toujours la peur qu’il a connue sous Obama, présidence lors de laquelle la déportation des étrangers sans papiers a atteint des niveaux records. Joe Biden, dit-il, « a fait partie de cela ». « Alors oui, nous devons toujours être prudents. »

Désormais, tout changement permanent au statut de ces jeunes migrants devra obtenir l’aval du Congrès.

William Martinez, 28 ans, ne s’attend pas à ce que Joe Biden fasse grand-chose sur le sujet et place donc ses espoirs sur le Congrès, qu’il espère plus actif en la matière, s’il est à majorité démocrate.

Le parti démocrate de Joe Biden est majoritaire à la Chambre des représentants, mais la couleur du Sénat dépend encore d’une élection partielle en Géorgie, le 5 janvier.

C’est pourquoi M. Martinez, 28 ans, part y faire campagne.  

« En route pour la Géorgie ! », lance l’homme, arrivé du Salvador avec sa famille après que leur pays a été dévasté par un tremblement de terre en 2001.

« Menace »

Avec ou sans une majorité au Congrès, le futur président américain aura de toute manière du pain sur la planche s’il veut revenir sur l’ensemble des directives anti-immigration du gouvernement Trump — des réformes « mises en place à un rythme sans précédent, voire frénétique », selon le Migration Policy Institute.

À travers plus de 400 mesures, l’administration Trump a « méthodiquement démantelé et reconstruit un système basé sur une vision de l’immigration comme menace sécuritaire et économique pour les Américains », estime le think tank.

Il incombera aussi à Biden de gérer les centres de détention de l’immigration et des douanes américaines, où quelque 15 000 personnes arrêtées alors qu’elles tentaient d’entrer illégalement dans le pays sont détenues.

Plusieurs observateurs ont témoigné de conditions d’hébergement désastreuses dans ces centres, qui ont mené à la mort de certains migrants. Joe Biden a promis que le personnel de l’ICE serait tenu responsable de tout abus.

Et pour diriger le ministère de la Sécurité intérieure, qui gère ces centres, M. Biden a nommé Alejandro Mayorkas, un immigré cubain.