(Washington) Donald Trump a estimé jeudi qu’il était temps de faire « redémarrer l’Amérique », mise en sommeil pour endiguer la pandémie de nouveau coronavirus, mais a laissé la main aux gouverneurs des 50 États.

Le président américain a précisé que la réouverture du pays aurait lieu par étapes, « État par État » et sur la base de données « vérifiables » pour éviter une nouvelle vague de contaminations.  

Les États-Unis ont recensé plus de 660 000 cas de COVID-19 et plus de 32 000 morts, mais des signes de ralentissements ont été enregistrés, notamment dans l’État de New York le plus touché.

« Sur la base des dernières données, notre équipe d’experts est désormais d’accord pour dire que nous pouvons entamer la prochaine phase de notre guerre, que nous appelons : “faire redémarrer l’Amérique” », a déclaré Donald Trump lors d’une conférence de presse à la Maison-Blanche.

Les gouverneurs des 50 États, qui ont pris des mesures variées de confinement de leur population, fixeront la marche à suivre, mais le gouvernement fédéral a publié ses « recommandations » pour les guider.

Cette feuille de route prévoit trois étapes qui pourront se déclencher sur la base de critères précis. « Nous n’ouvrons pas tout d’un coup, on rouvre prudemment pas à pas », a précisé Donald Trump.

Mais les gouverneurs pourront adopter « une approche sur mesure qui répond aux circonstances spécifiques dans leur État », a déclaré le président républicain, qui avait un temps laissé entendre qu’il pourrait leur imposer les mesures à adopter.

« Quand vous regardez le Montana, le Wyoming, le Dakota du Nord », des États relativement épargnés par la pandémie, « c’est très différent de New York, c’est très différent du New Jersey », les plus touchés, a relevé le président. Certains États pourraient redémarrer « littéralement demain », a-t-il estimé.

En s’appuyant sur une généralisation des tests de dépistage, il faudra ensuite « identifier rapidement et répondre à toute résurgence du virus », a-t-il poursuivi. « Nous serons très vigilants pour empêcher le virus de revenir par l’étranger », a encore dit Donald Trump.

Les manifestations anti-confinement se multiplient

Le confinement face au coronavirus est difficilement supportable pour certains Américains qui ont manifesté cette semaine contre les mesures de distanciation sociale et en soutien de Donald Trump, pour qui il est temps de faire « redémarrer l’Amérique ».

Plusieurs dizaines d’opposants aux mesures de quarantaine se sont retrouvés jeudi devant le Capitole de Richmond, siège du gouvernement de l’État de Virginie.

Ils protestaient contre la prolongation jusqu’au 8 mai d’un décret d’urgence sanitaire qui a fermé de nombreux commerces et interdit les rassemblements de plus de dix personnes, pour freiner l’épidémie de coronavirus.

La veille, environ 3000 personnes avaient manifesté en voiture à Lansing, la capitale de l’État du Michigan, défiant le décret de confinement émis par la gouverneure démocrate Gretchen Whitmer.

L’opération escargot, organisée par une coalition de groupes conservateurs baptisée « Les habitants du Michigan contre la quarantaine excessive », a provoqué un embouteillage dans le centre-ville.

Plusieurs centaines de personnes se sont ensuite rassemblées devant le siège du gouvernement local, arborant des pancartes « Mettez fin au confinement », « Nous voulons travailler » ou « Vivre libre ou mourir ».

Des groupes portant armes automatiques et gilets pare-balles étaient mêlés aux familles venues protester contre les mesures jugées trop restrictives mises en place jusqu’au 30 avril.

Ils fustigeaient notamment la fermeture des commerces considérés comme « non essentiels », qui ont plongé propriétaires et salariés de ces magasins dans la crise.

Deux plaintes ont été déposées contre la gouverneure, au motif que son décret violerait la Constitution.

« On peut être en colère », a commenté jeudi sur CNN la démocrate. « Si ça vous fait du bien de diriger ça contre moi, ça me va », a-t-elle ajouté à l’adresse des manifestants.

Elle a assuré comprendre ceux qui « deviennent un peu fous en restant à la maison » et qui s’inquiètent « pour leur travail ou comment payer les factures ».

« Le malheur, c’est qu’en étant dehors ils ont plus de risques de propager la COVID-19 », qui a fait 1900 morts dans cet État industriel, l’un des bilans les plus lourds dans le pays, a-t-elle rappelé.

La gestion de la crise par Gretchen Whitmer est pourtant saluée par une majorité des habitants du Michigan, un État remporté de justesse par Donald Trump en 2016.

Ailleurs dans le pays, des manifestations pour mettre fin au confinement ont eu lieu ces derniers jours en Caroline du Sud, dans le Kentucky ou dans l’Ohio. D’autres rassemblements sont prévus samedi à Concord (New Hampshire) et à Austin (Texas).

Trump trop lent à réagir, pour une majorité d’Américains

Près des deux tiers des Américains estiment que Donald Trump a tardé à prendre des mesures décisives face à la menace du coronavirus qui se répandait dans d’autres pays, affirme un sondage publié jeudi.

Selon le centre de recherche Pew, 65 % des personnes interrogées critiquent la gestion du début de la crise sanitaire par le président américain, qui a minimisé pendant plusieurs semaines la gravité de l’épidémie apparue fin décembre 2019 en Chine, et son impact sur les États-Unis.

Si les opinions suivent largement les lignes politiques, une légère majorité des républicains modérés et libéraux (53 %) rejoignent toutefois les 92 % de démocrates dénonçant sa lenteur à agir, qui fait l’objet d’une polémique.

Selon cette enquête, conduite du 7 au 12 avril sur un échantillon de 4917 personnes, une majorité (52 %) des sondés estiment que le président a embelli la situation dans ses déclarations publiques. Seulement 39 % pensent que le milliardaire républicain présente au public la situation « telle qu’elle est » lors de ses conférences de presse quasi quotidiennes retransmises en direct à la télévision.

Alors que les États-Unis sont le pays le plus frappé au monde par l’épidémie de COVID-19 (près de 660 000 cas positifs et au moins 32 000 morts) une large majorité d’Américains (73 %) affirment que « le pire est encore à venir » dans la crise sanitaire et économique.

Ils ne semblent pas suivre le président qui veut rapidement faire redémarrer la première économie mondiale, 66 % s’affirmant inquiets d’une levée des restrictions trop rapide, alors que seulement 32 % s’inquiètent qu’elle soit trop lente.