(Washington) Le président américain Donald Trump a vanté jeudi le recours à la chloroquine, un antipaludéen, comme possible traitement pour le coronavirus, après des résultats encourageants en Chine et en France même si nombre d’experts appellent à la prudence.

« Nous allons pouvoir rendre ce médicament disponible quasiment immédiatement », a assuré M. Trump lors d’une conférence de presse à la Maison-Blanche, au moment où les sénateurs républicains présentaient un plan de sauvetage d’environ 1000 milliards de dollars pour l’économie.

« C’est très excitant. Je pense que cela pourrait changer la donne. Ou peut-être pas. Mais d’après ce que j’ai vu, cela pourrait changer la donne », a-t-il ajouté.

La Food and Drug Administration (FDA), l’organisme fédéral qui supervise la commercialisation des médicaments aux États-Unis, a un peu tempéré l’enthousiasme présidentiel en soulignant que le traitement n’avait pas été approuvé pour le coronavirus.

Mais elle va mettre en place « un essai clinique étendu », a expliqué Stephen Hahn, son dirigeant.

Si la FDA était prête à « abattre des barrières » pour favoriser les percées, elle a aussi la responsabilité de garantir que les produits soient sûrs et efficaces, a-t-il insisté.  

La chloroquine est un antipaludéen peu cher utilisé depuis plusieurs décennies et commercialisé notamment sous le nom de Nivaquine.

Ce traitement est souvent recommandé lorsque l’on prévoit de se rendre en zone infestée par le parasite du paludisme, transmis par les moustiques.

Selon une étude chinoise publiée mi-février, un essai clinique mené dans une dizaine d’hôpitaux a donné des résultats prometteurs avec des tests sur plus de 100 patients.  

Le professeur Didier Raoult, directeur de l’Institut Méditerranée Infection à Marseille, dans le sud de la France, s’est félicité de cette annonce des autorités américaines.

« C’est juste la preuve que ce sont des gens sérieux, des gens raisonnables », a déclaré à l’AFP ce spécialiste des maladies infectieuses qui vient de mener une étude également prometteuse, mais sur 24 patients seulement.

« Petit nombre de patients »

Le gouvernement français a donné en début de semaine l’autorisation pour qu’un vaste essai soit mené par plusieurs équipes à travers la France.

Interrogée par l’AFP, Karine Le Roch, qui enseigne la biologie l’Université de Californie-Riverside, s’est dite encouragée par les résultats obtenus en Chine et en France.

« Il s’agit d’un petit nombre de patients, mais si les résultats sont corrects, cela semble en effet réduire la charge virale des patients infectés », a-t-elle expliqué.

« Nous devons nous assurer que les résultats sont exacts puis les confirmer avec un grand nombre de patients », a-t-elle ajouté.

Nombre d’experts se montrent cependant pour l’heure circonspects en l’absence de données cliniques solides et publiques.

Dans un article publié dans l’Antiviral Research, les chercheurs français Franck Touret et Xavierde de Lamballerie appellent à la prudence, rappelant que la piste de la chloroquine a été avancée à plusieurs reprises, sans succès, face à des virus, y compris le VIH.

La première puissance mondiale, qui a beaucoup tardé à lancer les tests à la COVID-19, compte désormais plus de 13 000 cas confirmés, dont 176 décès.  

Les autorités s’attendent à une augmentation spectaculaire de ces chiffres dans les jours qui viennent avec le développement de l’accès aux tests.

Lors d’une conférence de presse durant laquelle il s’est parfois montré très agressif, Donald Trump a adopté une posture particulièrement belliqueuse vis-à-vis de Pékin.

« Cela se serait beaucoup mieux passé si on avait su tout cela quelques mois plus tôt, cela aurait pu être endigué dans une région de Chine d’où c’est parti », a-t-il dit, employant une nouvelle fois la formule controversée « virus chinois ».

« Le monde paie le prix fort pour ce qu’ils ont fait », a-t-il martelé.

Le nouveau coronavirus à l’origine de la pandémie de COVID-19 a été détecté pour la première fois en décembre à Wuhan, en Chine.

Les autorités de Pékin ont initialement été critiquées pour un certain manque de transparence et une certaine lenteur à réagir face à la propagation du virus. Mais la Chine a ensuite pris des mesures de confinement draconiennes et l’épidémie a connu un net ralentissement tout en se propageant hors du pays.

Pour la première fois jeudi, les autorités chinoises n’ont rapporté aucune nouvelle contamination d’origine locale.

« Doit-on croire ce qu’ils disent maintenant ? J’espère que c’est vrai », a dit Donald Trump. « Qui sait ? J’espère que c’est vrai. »