(Washington) Le président Donald Trump fait pression pour qu’un procureur spécial soit nommé afin de mener une enquête fiscale sur le fils du président élu Joe Biden, ce qui pourrait mener à une éventuelle confrontation avec le nouveau procureur général par intérim Jeffrey Rosen.

M. Trump, mécontent que le procureur général sortant William Barr n’ait pas annoncé publiquement l’enquête qu’il mène depuis deux ans sur Hunter Biden, a consulté à ce sujet le chef de cabinet de la Maison-Blanche Mark Meadows, l’avocat de la Maison-Blanche Pat Cipollone et des alliés extérieurs.

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Le fils du président désigné Joe Biden, Hunter Biden, s’adressant par vidéo lors du congrès à la chefferie du parti démocrate, le 20 août 2020. Il a récemment a révélé publiquement qu’il faisait l’objet d’une enquête fédérale liée à ses finances.

Ces informations ont été transmises par plusieurs responsables de l’administration Trump et des républicains proches de la Maison-Blanche, qui se sont entretenus avec l’Associated Press sous le couvert de l’anonymat pour discuter de ces questions délicates.

Au-delà de la nomination d’un procureur spécial pour enquêter sur le fils de M. Biden, ces sources ont déclaré que M. Trump souhaitait qu’un autre procureur spécial soit nommé pour examiner ses propres allégations sans fondement de fraude électorale. Mais s’il s’attend à ce que son nouveau procureur général par intérim aille plus loin que M. Barr sur l’un ou l’autre sujet, il pourrait être déçu.

Donald Trump a annoncé lundi que M. Barr quitterait son poste la semaine prochaine, environ une semaine après que Hunter Biden a révélé publiquement qu’il faisait l’objet d’une enquête fédérale liée à ses finances. Le département de la Justice a généralement pour politique de ne pas divulguer de détails sur les enquêtes en cours, bien que l’objet de ces enquêtes puisse être révélé.

M. Rosen, qui est actuellement procureur général adjoint, dirigera le département de la Justice de façon intérimaire. Cet avocat expérimenté est le principal adjoint de M. Barr depuis mai 2019, mais s’est rarement retrouvé sous les projecteurs.

Il aimerait nommer lui-même un procureur

Les détails des intentions de M. Trump sur la nomination d’un procureur spécial ont d’abord été rapportés par le Wall Street Journal. Le président envisagerait de faire pression sur M. Rosen pour qu’il nomme un procureur spécial ou, si nécessaire, de le remplacer par une personne plus susceptible de réaliser ses souhaits. Il a même demandé à son équipe d’avocats, dont Rudy Giuliani, de vérifier si le président avait le pouvoir de désigner lui-même un procureur spécial.

Une question clé sera de savoir si M. Rosen pourra résister à la pression présidentielle — et aux potentielles attaques cinglantes — dans les dernières semaines de l’administration Trump. M. Rosen pourrait aussi être écarté au profit d’un autre candidat plus disposé à satisfaire les demandes de M. Trump.

Estimant qu’une enquête par un procureur spécial pourrait nuire à l’administration Biden avant même qu’elle soit en poste, les collaborateurs de M. Trump l’ont exhorté à poursuivre dans cette voie et de faire en sorte que l’enquête ne puisse pas être facilement arrêtée par le nouveau président. Aucune décision ferme n’a encore été prise à ce sujet.

Trump en colère contre Barr

M. Trump a annoncé que M. Barr démissionnerait de son poste le 23 décembre, alors que s’accroissaient les tensions entre le président et le procureur général au sujet de l’enquête visant Hunter Biden. Le président aurait été en colère pendant des jours après avoir appris que M. Barr était au courant de l’enquête fiscale sur Hunter Biden avant les élections, mais qu’il n’en avait pas parlé publiquement.

Il était également mécontent que le procureur général ait déclaré, en entrevue avec l’Associated Press, que le département de la Justice n’avait pas trouvé de preuve d’une prétendue fraude électorale généralisée qui aurait influencé les résultats de l’élection.

Pendant une grande partie de son mandat, William Barr a été perçu comme l’un des membres les plus fidèles du cabinet du président, en particulier après avoir présenté les résultats de l’enquête de Robert Mueller sur la Russie d’une manière favorable à M. Trump, même si le procureur spécial n’a pas disculpé le président d’avoir fait obstruction à la justice.

En vertu de la réglementation fédérale, un procureur spécial ne peut être congédié que par le procureur général, et pour des raisons spécifiques telles qu’une inconduite, un manquement au devoir ou un conflit d’intérêts — raisons qui doivent être énoncées par écrit. La nomination d’un procureur spécial pour l’enquête sur Hunter Biden signifierait également une enquête plus longue et plus compliquée que l’enquête en cours, jusqu’à présent largement centrée sur ses impôts.

Quoi qu’il en soit, l’enquête complique le choix par Joe Biden d’un nouveau procureur général, sur les épaules duquel cette enquête atterrirait. Tout candidat au poste de procureur général sera probablement confronté à une montagne de questions lors de son audience de confirmation quant à la façon dont il superviserait l’enquête.

M. Biden pourrait aussi décider de laisser M. Rosen en poste pendant quelques semaines après le changement d’administration le 20 janvier. Si M. Trump ne le licencie pas d’ici là, bien entendu.