(Washington) Le Congrès américain « semble être la cible d’une campagne » de désinformation orchestrée depuis l’étranger, ont assuré lundi des responsables démocrates très « préoccupés » par ces efforts qui visent selon eux à peser sur la présidentielle du 3 novembre.

La chef des démocrates à la Chambre des représentants Nancy Pelosi et trois de ses confrères ont fait part, il y a une semaine, de leurs inquiétudes au chef du FBI Christopher Wray, en lui réclamant d’informer les élus du Congrès avant les vacances parlementaires d’août.

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La chef des démocrates à la Chambre des représentants, Nancy Pelosi

Dans leur courrier, qu’ils ont décidé de rendre public lundi, ils évoquent des « menaces spécifiques, graves » et « persistantes », mais ne fournissent aucun détail. Une pièce jointe contenant des informations classifiées accompagne leur lettre mais reste confidentielle.

« Nous sommes profondément préoccupés, en particulier parce que le Congrès semble être la cible d’une campagne concertée d’ingérence étrangère, qui vise à propager et amplifier des informations inexactes afin d’influencer l’activité du Congrès, le débat public et l’élection présidentielle de novembre », écrivent-ils.

Les quatre parlementaires demandent au chef du FBI de leur transmettre un calendrier ce lundi, en vue d’un briefing à huis clos de l’ensemble des parlementaires, le plus tôt possible.

Le FBI a déclaré à l’AFP avoir reçu ce courrier mais n’a pas voulu en dire plus.

Les quatre signataires font partie d’un groupe de huit parlementaires ayant les accréditations les plus élevées pour accéder aux informations sensibles. Les quatre républicains membres de ce groupe ne se sont pas associés à leur démarche.

Nouveau 2016 ?

Accusant le président Donald Trump de ne pas faire suffisamment pour lutter contre ces interférences, son rival démocrate pour la présidentielle de novembre Joe Biden a menacé lundi : « J’avertis le Kremlin et les autres gouvernements étrangers […] Si un gouvernement étranger tente d’interférer dans notre démocratie, je n’hésiterai pas à répondre en tant que président pour imposer des coûts durables et substantiels ».

Les services de renseignement américains accusent tous la Russie de s’être ingérée dans l’élection présidentielle de 2016, notamment à l’aide de pirates informatiques et de campagnes massives sur les réseaux sociaux, pour favoriser la candidature de Donald Trump et gêner sa rivale démocrate Hillary Clinton, ce que Moscou a toujours fermement démenti.

Une fois élu, le président républicain a fait l’objet d’une longue enquête sur des soupçons de collusion entre son équipe de campagne et le Kremlin, sans qu’aucune preuve ne soit mise au jour.  

En février, des responsables du renseignement ont mentionné de nouvelles interférences russes dans la campagne 2020, toujours destinées à favoriser Donald Trump, lors d’un briefing au Congrès censé rester confidentiel, mais qui avait fuité dans les médias.

Courroucé, le président avait dans la foulée limogé son chef du renseignement par intérim et l’avait remplacé par un de ses fidèles.

Christopher Wray a pour sa part évoqué début juillet « une campagne d’influence pernicieuse de la Chine » sur la politique américaine. Pékin a « ses préférences » pour les prochains scrutins, avait-il également assuré.

« Objectif numéro un » du renseignement américain

La sécurité du scrutin présidentiel de novembre est « l’objectif numéro un » de la NSA, a indiqué lundi le directeur de l’agence de renseignement, le général Paul Nakasone, prévenant que les États-Unis étaient prêts à « agir » en réponse à toute cyberattaque contre les élections.

« L’objectif numéro un de la National Security Agency et du Cyber Command, c’est un scrutin 2020 sûr, sécurisé et légitime », a déclaré le général Nakasone, qui chapeaute à la fois l’agence de renseignement militaire et le commandement militaire américain pour le cyberespace.

Pour y parvenir, « nous allons obtenir des informations sur nos adversaires », a-t-il ajouté lors d’une conférence en ligne organisée par l’armée de terre américaine. « Nous allons les connaître mieux qu’ils ne se connaissent eux-mêmes ».

Et surtout, « nous allons agir », a-t-il poursuivi. « Nous agirons quand nous verrons nos adversaires tenter de s’ingérer dans nos élections ».

Le patron de la NSA n’a pas précisé quel genre de mesures les États-Unis pourraient prendre, invoquant le secret défense, mais il a rappelé le concept sur lequel le Cyber Command fonde sa stratégie : la « défense vers l’avant », c’est-à-dire la neutralisation des menaces avant qu’elles n’atteignent le territoire américain.

Pour assurer la sécurité des élections, les militaires veulent aussi coopérer avec plusieurs grandes universités qui effectuent des recherches sur les campagnes d’influence sur les réseaux sociaux, a-t-il ajouté.

L’armée américaine avait révélé en début d’année avoir piraté avec succès le groupe État islamique en 2016 pour perturber leur campagne de recrutement.

Les services de renseignement américains accusent la Russie de s’être ingérée dans l’élection présidentielle de 2016 ayant porté Donald Trump au pouvoir, ce que le président américain dément.