(New York) Donald Trump n’a aucun atome crochu avec Barack Obama, pas plus qu’il n’en avait avec George Bush père de son vivant. Mais il devra répéter des exploits réalisés par l’un ou l’autre pour éviter d’être évincé de la Maison-Blanche à l’issue d’un seul et unique mandat.

À un peu plus de quatre mois de l’élection présidentielle, Donald Trump se retrouve dans une position de grande vulnérabilité. Sa cote de popularité se compare à celle des rares présidents sortants qui n’ont pas réussi à se faire réélire. Et son retard sur Joe Biden semble se creuser non seulement à l’échelle nationale, mais également dans les États clés du scrutin de 2020.

Tout cela dans un contexte de crises multiples où sa gestion soulève des critiques constantes dans les médias et chez la majorité des électeurs.

Le président républicain peut certes tenter de se consoler ou se rassurer en pensant à sa victoire inattendue de 2016. Même si la plupart des sondeurs ne se sont pas trompés sur le vote populaire – Hillary Clinton l’a gagné par 2,1 points de pourcentage –, ils n’ont pas vu venir les résultats dans les trois États clés qui ont fait pencher la balance : la Pennsylvanie, le Wisconsin et le Michigan.

L’expérience d’Obama

N’empêche : Donald Trump a une pente abrupte à remonter. Sa cote de popularité permet d’illustrer le défi qui l’attend. Selon la moyenne des sondages du site RealClearPolitics, 42,2 % des Américains sont satisfaits de sa performance à la Maison-Blanche (le site FiveThirtyEight situe ce taux à 41,5 %).

Or, aucun président crédité de moins de 48 % d’opinions favorables (le taux de George W. Bush en 2004) n’a réussi à assurer sa réélection, si l’on se fie aux données de la maison de sondage Gallup, qui a longtemps été LA référence en la matière. 

En juin 1980, 32 % des Américains approuvaient le travail de Jimmy Carter. En juin 1992, 37 % avaient la même opinion concernant George Bush père.

Le jour du vote, les taux de satisfaction de ces deux présidents ne dépassaient pas 40 %. Ils ont été vaincus.

L’ironie veut que Donald Trump puisse aujourd’hui se tourner vers l’expérience de Barack Obama pour se rassurer. Son prédécesseur est celui dont le taux de satisfaction a le plus progressé dans les derniers mois d’un premier mandat, selon les sondages réalisés par Gallup.

De juin à novembre 2012, le 44président a vu ce taux passer de 46 % à 52 %, alors que son équipe de réélection dépeignait son rival républicain, Mitt Romney, comme un ploutocrate déconnecté de la réalité des Américains.

PHOTO JASON REED, ARCHIVES REUTERS

Barack Obama, le soir de sa réélection, en novembre 2012. À droite, on aperçoit son vice-président, Joe Biden, aujourd’hui candidat à la présidentielle.

L’exemple de Bush père

Donald Trump peut aussi s’inspirer de George Bush père. Non pas celui qui a été humilié par Bill Clinton en 1992, mais celui qui a effectué une remontée spectaculaire pour battre de façon décisive le gouverneur du Massachusetts Michael Dukakis en 1988.

Selon la moyenne des sondages de RealClearPolitics, le président Trump a un retard de 10 points de pourcentage sur Joe Biden à l’échelle nationale. Un sondage New York Times–Sienna College publié la semaine dernière a même attribué une avance de 14 points de pourcentage à l’ancien vice-président.

Cet écart a rappelé à certains observateurs l’avance dont jouissait Michael Dukakis, selon Gallup, après la convention du Parti démocrate fin juillet 1988. Une avance de 17 points de pourcentage qui a fondu comme neige au soleil lorsque George Bush père et ses alliés ont lancé une attaque en règle contre le gouverneur démocrate et ses idées « trop libérales ». L’ancien vice-président de Ronald Reagan a remporté l’élection par 7,8 points de pourcentage.

La leçon de cette élection est évidente : s’ils veulent effacer l’avance de Joe Biden dans les sondages, Donald Trump et ses alliés devront ternir son image au point de le rendre inacceptable aux yeux des électeurs modérés ou indécis.

Le hic, c’est que le camp républicain doit se battre sur plusieurs fronts en même temps.

L’avantage du président

Les sondages réalisés dans les États clés ne sont pas plus rassurants pour Donald Trump que les baromètres nationaux. Ceux que le New York Times et le Sienna College viennent de publier confirment une tendance lourde. Joe Biden jouit d’une avance d’au moins 6 points de pourcentage dans les six États clés sondés par les partenaires new-yorkais – Floride, Pennsylvanie, Michigan, Wisconsin, Arizona et Caroline du Nord.

D’autres sondages créditent Joe Biden de l’avance dans d’autres États remportés par Donald Trump en 2016, dont l’Ohio et la Géorgie. Même au Texas, le président républicain ne peut plus tenir la victoire pour acquise.

Ces sondages reflètent l’effritement des appuis de Donald Trump chez les hommes blancs, les personnes âgées et même les chrétiens évangéliques. 

Certains d’entre eux sont aussi insatisfaits que les autres électeurs de la façon dont le président a géré la pandémie de coronavirus et les manifestations qui ont suivi la mort de George Floyd.

Joe Biden jouit par ailleurs d’une avance colossale de 21 points de pourcentage chez les femmes blanches qui ont un diplôme universitaire, selon le sondage NYT–Sienna College.

Heureusement pour Donald Trump, la plupart des sondages continuent à lui donner l’avantage sur le plan économique. C’est l’un des rares éléments positifs de ces baromètres. Dans quatre mois, cet avantage pourrait contribuer à une victoire du président aussi inattendue, sinon plus, que celle de 2016.