(Los Angeles) Une cour d’appel fédérale a suspendu vendredi le renvoi au Mexique des migrants demandant l’asile sur le sol américain pendant l’examen de leur dossier, un des piliers de la politique du gouvernement de Donald Trump pour fermer sa frontière au sud.

Annoncé en décembre 2018 et mis en œuvre un mois plus tard, le plan « Rester au Mexique » du président américain a été vivement critiqué des deux côtés de la frontière. Cette politique, officiellement appelée « Protocoles de protection des migrants », s’appliquait à toutes les personnes déposant une demande d’asile en provenance du Mexique, mais ne concernait pas les Mexicains eux-mêmes.

Quelque 59 000 migrants, en grande majorité fuyant la pauvreté et la violence en Amérique centrale, ont été renvoyés au Mexique dans le cadre de ce dispositif, selon des chiffres officiels publiés jeudi.

Une cour d’appel de San Francisco a jugé vendredi cette pratique « non valide dans son intégralité » au regard de la loi américaine, ordonnant qu’elle soit stoppée sur tout le territoire.

En première instance l’an dernier, un tribunal avait également jugé ces mesures illégales, s’inquiétant de l’absence de structures d’accueil suffisantes dans les zones frontalières côté mexicain, ainsi que des discriminations et des violences physiques et sexuelles auxquelles les migrants renvoyés étaient exposés.

La cour d’appel de San Francisco avait toutefois autorisé le maintien de ce plan le temps de rendre sa décision.

La puissante organisation américaine de défense des droits civiques ACLU, partie prenante de la procédure en justice, s’est réjouie de cette suspension.

« Il est temps pour le gouvernement de respecter la loi et d’arrêter de mettre en danger les demandeurs d’asile », a déclaré dans un communiqué Judy Rabinovitz, avocate pour l’ACLU.

La Maison-Blanche a au contraire vivement critiqué « une nouvelle injonction dangereuse », et dit considérer toutes les options judiciaires pour faire réévaluer cette décision.

« S’il est permis au jugement d’aujourd’hui de rester en vigueur », « cela menacera de submerger le système migratoire de la nation, présentera des risques d’entrées non contrôlées du coronavirus, nuira profondément à notre relation positive avec le gouvernement mexicain et nos autres partenaires régionaux, et rallumera la crise humanitaire et sécuritaire à la frontière », a-t-elle déclaré dans un communiqué.  

Un porte-parole du ministère de la Justice a quant à lui affirmé que « le gouvernement Trump » n’avait fait qu’exercer « loyalement » des prérogatives accordées voici plus de vingt ans par le Parlement et « ratifiées par le président Clinton » à l’époque.  

Dans un jugement distinct, la même cour d’appel de San Francisco a rejeté une autre mesure du gouvernement empêchant toute personne ayant pénétré illégalement sur le sol américain d’y déposer une demande d’asile.

« Ces deux décisions constituent un revers significatif pour les tentatives du gouvernement Trump de restreindre les conditions de l’asile », a estimé dans un communiqué Stephen Yale-Loehr, professeur de droit à l’Université Cornell.

Il estime que la Cour suprême va certainement être saisie de ces questions.  

Donald Trump avait placé au cœur de sa campagne électorale de 2016 la lutte contre l’immigration, promettant notamment de construire un mur le long de la frontière mexicaine.