Un juge américain a rejeté lundi la demande d'examen en urgence de la citoyenneté d'une jeune femme qui souhaite revenir aux États-Unis après avoir rejoint le groupe État islamique (EI) et dont Washington refuse le retour, estimant qu'elle n'est pas américaine.

« Il y a beaucoup de spéculations » sur le fait que Hoda Muthana subisse des « souffrances irréparables » si elle reste dans le camp de réfugiés du nord-est syrien où elle a été transférée en janvier après s'être rendue aux forces kurdes, a estimé le juge Reggie Walton à l'issue d'une audience à Washington.

Le père de la jeune femme demandait l'examen en urgence de sa situation, expliquant que les conditions de sécurité dans le camp étaient insuffisantes pour elle et son enfant âgé de 18 mois.

Son avocat, Charles Swift, a évoqué les risques qu'elle puisse « être capturée de nouveau (par l'EI), tuée, ou perdre la capacité de revenir » alors que Donald Trump a annoncé le retrait prochain des troupes américaines de Syrie.

Après l'audience, il s'est toutefois dit « encouragé » car les débats ont montré selon lui « la faiblesse des arguments du gouvernement » et le fait que Hoda Muthana « est en réalité une citoyenne américaine ».

Et « un citoyen américain ne perd par ses droits en commettant un acte criminel ou en faisant des commentaires politiques incroyablement impopulaires », a ajouté M. Swift.

Le représentant du ministère de la Justice, Scott Stewart, a au contraire affirmé qu'il n'y avait « aucune indication » qu'elle soit en danger imminent.

« Il existe des mécanismes pour étudier sa situation » selon la procédure normale, qui peut durer plusieurs mois, a-t-il expliqué.       

Le gouvernement américain refuse de la voir revenir, affirmant qu'elle n'est pas citoyenne américaine même si elle est née sur le territoire. Son père était alors un diplomate yéménite, et une loi américaine veut que les enfants de diplomates nés aux États-Unis pendant qu'il y sont en poste n'acquièrent pas automatiquement la nationalité américaine.  

Elle n'avait donc légalement pas le droit de posséder un passeport.

« En fait, c'est une terroriste et nous ne devrions pas faire revenir des terroristes étrangers aux États-Unis », a affirmé à la radio WOC le secrétaire d'État Mike Pompeo, en visite dans l'Iowa.

« Nous n'avons pas besoin de ce genre de risque, nous n'avons pas besoin de gens comme elle qui menacent la vie des Américains et des gens de l'Iowa », a-t-il ajouté.

Hoda Muthana est née le 28 octobre 1994 dans le New Jersey avant que sa famille s'installe dans l'Alabama. Ses parents ont été naturalisés américains avant la naissance de leurs trois enfants, dont Hoda, la plus jeune.  

Mais, selon l'avocat, son père a quitté son poste de diplomate à l'ONU un mois avant la naissance de Hoda et celle-ci avait un passeport valide quand elle est partie en secret en Syrie en 2014.

Successivement mariée à trois combattants de l'EI, tous tués, elle a activement participé à la propagande du groupe sous le pseudonyme de « Oum Djihad », selon l'organisation Counter Extremism Project.

Elle avait appelé à « faire couler le sang américain » et félicité les auteurs de l'attentat de janvier 2015 contre l'hebdomadaire satirique français Charlie Hebdo, qui fait 12 morts.

Elle affirme aujourd'hui avoir été « manipulée » par les recruteurs de l'EI et regretter ses actes, alors que le groupe djihadiste a perdu la quasi-totalité des territoires qu'il contrôlait en Syrie et en Irak.