(Washington) Le secrétaire d’État américain Mike Pompeo a nommé lundi une opposante à l’avortement à la tête d’une commission chargée d’examiner la manière dont les États-Unis protègent les droits humains dans leur politique étrangère.

Mary Ann Glendon, professeure de droit à Harvard et figure du mouvement contre le droit à l’avortement, va diriger une commission des «droits inaliénables» au sein du département d’État.

Ce panel «doit réfléchir à la question la plus fondamentale : Qu’est-ce que cela signifie de dire, ou de prétendre, que quelque chose est un droit humain?», a dit M. Pompeo.

Car pour le secrétaire d’État américain, un chrétien évangélique qui évoque souvent sa foi, «les institutions internationales, pensées et construites pour défendre les droits humains, se sont éloignées de leur mission originelle».

M. Pompeo a toutefois souligné la diversité de la nouvelle commission, composée «d’experts des droits humains, de philosophes et d’activistes, de républicains, de démocrates et d’indépendants». Parmi eux figure Katrina Lantos Swett, une démocrate dont le père, Tom Lantos, a été un opposant des régimes dictatoriaux.

Amnistie Internationale a critiqué cette nouvelle commission, affirmant que les différentes administrations américaines avaient soutenu la Déclaration universelle des droits de l’Homme, adoptée par l’ONU en 1948.

«Cette politisation des droits humains pour ce qui semble être une tentative de poursuivre des politiques haineuses visant les femmes et la communauté LGBT est honteuse», a déclaré Joanne Lin, d’Amnistie Internationale USA.

Ce panel «risque de saper de nombreuses normes internationales sur les droits humains que les États-Unis ont aidé à établir», a aussi regretté Eliot Engel, le chef démocrate de la commission des Affaires étrangères à la Chambre des représentants.

Le Conseil de recherche sur la famille, qui s’oppose farouchement à la reconnaissance de l’homosexualité, a au contraire salué la création «historique» de cette commission.

Certains conservateurs dénoncent les grandes organisations des droits humains, en leur reprochant leur défense des droits reproductifs des femmes, des droits des homosexuels ou de l’égalité salariale.

Mme Glendon, ancienne ambassadrice américaine au Saint-Siège, représentait le Vatican lors de la conférence de l’ONU sur les femmes à Pékin en 1995 quand Hillary Clinton, alors première dame des États-Unis, avait affirmé que «les droits des femmes sont un droit humain».

L’universitaire avait critiqué l’accent mis par la conférence sur les politiques de contraception dans les pays en voie de développement.

La commission travaillera «au niveau des principes, pas de la politique», a-t-elle assuré lundi.

Dans un mémo dévoilé dans la presse peu après l’élection de Donald Trump, le gouvernement américain était appelé à utiliser la question des droits humains pour condamner ses rivaux comme la Chine, l’Iran ou Cuba, sans insister auprès de ses alliés comme l’Égypte ou l’Arabie saoudite.  

Les États-Unis ont en outre quitté le Conseil des droits de l’Homme de l’ONU en dénonçant le «sectarisme» de l’instance à l’égard d’Israël.  

La droite religieuse a lancé depuis quelques mois une grande offensive contre le droit à l’avortement dans les États conservateurs, espérant faire revenir la Cour suprême sur son arrêt emblématique qui avait légalisé l’IVG aux États-Unis en 1973.