Le Sénat américain a envoyé mercredi un nouvel avertissement à Donald Trump et à l'Arabie saoudite en autorisant la tenue d'un vote sur une résolution visant à interdire tout soutien militaire à Riyad dans la guerre au Yémen.

Les rangs républicains sont apparus plus clairsemés que lors du premier vote de procédure, fin novembre, qui avait sonné comme un camouflet pour le président.

Mais l'indignation face au rôle de Riyad dans la guerre civile au Yémen et le meurtre de Jamal Khashoggi reste toutefois très vive, y compris chez les républicains.  

Elle pourrait mener à l'adoption dans les prochains jours d'une mesure distincte, accusant le prince héritier Mohammed ben Salmane d'être directement impliqué dans la mort du journaliste saoudien.

Une posture en opposition directe avec le président républicain Donald Trump, qui a émis des doutes sur la responsabilité du prince et souligne depuis des semaines l'importance stratégique, et économique, de l'alliance avec Riyad.  

Les sénateurs ont accepté, à 60 votes pour - dont 11 républicains - et 39 contre, de faire avancer vers un vote final la résolution s'opposant au soutien militaire de Washington à Riyad dans la guerre au Yémen.

Puis, ils ont débattu de la mesure plusieurs heures. Le vote final aura probablement lieu jeudi.  

« Nous devons mettre fin au soutien de la guerre désastreuse menée par l'Arabie saoudite au Yémen », a déclaré le sénateur indépendant Bernie Sanders, l'un des promoteurs de cette résolution. Il a montré dans l'hémicycle la photo d'un enfant yéménite famélique.  

Même si elle était approuvée au Sénat, cette résolution serait toutefois ensuite promise à l'échec à la Chambre des républicains tant que les républicains y détiennent la majorité, jusqu'au 3 janvier.  

Et même si elle passait le Congrès, Donald Trump y mettrait certainement son veto. Mais sa portée symbolique reste forte.

Autre mesure contre « MBS »

Le chef des républicains au Sénat, Mitch McConnell, a appelé à voter contre cette résolution, qui s'attaque plus largement aux prérogatives présidentielles dans les déclarations de guerre.  

Mais, dans un signal fort du malaise dans ses rangs, cet allié de Donald Trump a en revanche annoncé son soutien à une mesure non contraignante qui dénoncera explicitement l'implication de Mohammed ben Salmane, surnommé « MBS », dans le meurtre de Jamal Khashoggi.  

Cette mesure est portée par le sénateur républicain Bob Corker, farouche critique de Donald Trump, qui prévoit un très large soutien.  

Une troisième mesure ordonnant le gel des ventes d'armes américaines à Riyad et des sanctions contre les responsables du meurtre de Jamal Khashoggi ne devrait pas être soumise à un vote avant 2019, admettent ses instigateurs.  

En parallèle mercredi, la directrice de la CIA, Gina Haspel, est venue informer à huis clos les chefs républicains et démocrates de la Chambre des conclusions de l'agence de renseignement sur le meurtre de Jamal Khashoggi.  

Les élus n'ont rien révélé du contenu à leur sortie. Les démocrates ont toutefois promis d'organiser des auditions sur le rôle de Riyad lorsqu'ils reprendront le contrôle de la Chambre en janvier.  

Des sénateurs avaient déjà reçu un breffage similaire le 4 décembre. Deux influents républicains en étaient ressortis furieux, affirmant que le prince héritier saoudien avait « ordonné » le meurtre de M. Khashoggi.  

Jeudi matin, le chef de la diplomatie américaine, Mike Pompeo, et le secrétaire de la Défense, Jim Mattis, viendront défendre l'alliance avec Riyad devant les élus de la Chambre, toujours à huis clos.