Jared Kushner, gendre et fidèle conseiller du président Donald Trump, a répété lundi à la presse qu'il n'avait rien fait d'inapproprié durant la campagne lors de ses échanges avec des Russes, après avoir été interrogé à huis clos devant une commission du Congrès.

« Tous mes actes ont été appropriés, dans le cadre normal d'une campagne sans équivalent », a-t-il déclaré depuis la Maison-Blanche, lors d'une très rare déclaration publique.

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« Je n'ai pas commis de collusion avec la Russie, et je ne connais personne au sein de l'équipe de campagne qui l'ait fait. Je n'ai aucun contact inapproprié », a-t-il répété, ajoutant: « Je n'ai pas dépendu de fonds russes pour mes entreprises ».

« Donald Trump avait le meilleur message et il a mené la campagne la plus intelligente, c'est pour cela qu'il a gagné », a aussi dit Jared Kushner. « Ne pas le reconnaître ridiculise ceux qui ont voté pour lui ».

Jared Kushner, 36 ans, sortait de plus de deux heures d'interrogatoire par la commission du Renseignement du Sénat, qui enquête sur d'éventuelles collusions au sein de l'équipe de campagne de Donald Trump et la Russie contre Hillary Clinton.

Il avait auparavant transmis une déclaration écrite dans laquelle il décrivait ses quelques contacts avec des responsables russes comme banals, dans le cadre de ses responsabilités avant et après l'élection, en tant qu'interlocuteur principal pour les gouvernements étrangers.

>>> La déclaration de Jared Kushner (en anglais)

Les élus voulaient interroger depuis longtemps cet homme discret de 36 ans, qui ne s'exprime jamais dans les médias. Son nom est apparu à plusieurs reprises depuis des mois, notamment en raison de rencontres avec plusieurs personnes russes durant la campagne et la transition présidentielle.

Jared Kushner confirme qu'il a bien vu l'ambassadeur de Russie aux États-Unis deux fois ainsi qu'un banquier proche de Vladimir Poutine, Sergueï Gorkov, à sa demande. Il se souvient aussi d'avoir participé quelques minutes à une étrange réunion avec une avocate russe organisée par son beau-frère, Donald Trump Jr., en juin 2016. Quatre rencontres au total, allant d'une minute à une vingtaine.

Mais il plaide une relative inexpérience et replace ces réunions parmi des milliers de rendez-vous, coups de fil et messages échangés dans une période frénétique.

Il raconte que lorsque son beau-père lui a demandé d'être le point de contact de la campagne pour les gouvernements étrangers, il a demandé conseil à Henry Kissinger. Au total, dit-il, il a eu plus d'une centaine de contacts avec des responsables de plus de 20 pays.

« Je n'ai pas eu de contacts inappropriés. Je ne dépendais pas de fonds russes pour financer mes affaires dans le secteur privé », martèle M. Kushner.

Et jamais, assure-t-il, la question des sanctions américaines contre Moscou n'a été évoquée. Son message, à chaque fois, a été de proposer un nouveau départ dans la relation bilatérale.

Enfin, il est vrai qu'il a demandé si le conseiller à la sécurité nationale de Donald Trump, Michael Flynn, pouvait recevoir des informations militaires russes sur la Syrie depuis la ligne sécurisée de l'ambassade russe à Washington, mais selon lui, le but n'était pas d'établir une ligne secrète de communication. Il s'agissait seulement de rassurer les généraux russes. Finalement cette ligne n'a jamais été utilisée, écrit-il.

Sanctions russes

Avec Jared Kushner, mari d'Ivanka Trump, les élus se rapprochent non seulement de la garde rapprochée du dirigeant américain mais aussi du coeur de sa famille.

Il n'est pas le seul à intéresser les élus, qui enquêtent sur les ingérences russes dans la campagne et sur d'éventuels appuis aux États-Unis, notamment au sein de l'équipe de campagne du républicain. Ces enquêtes parlementaires s'ajoutent à celle du procureur spécial Robert Mueller.

Le fils aîné du milliardaire, Donald Jr., est actuellement en négociation avec le Congrès pour donner sa version des faits. Pour l'instant, il a réussi à éviter une audition publique, mais c'est l'objectif de nombreux parlementaires, démocrates comme républicains.

Il lui est reproché d'avoir invité à la Trump Tower cette fameuse avocate russe, Natalia Veselnitskaya. Elle lui avait été présentée par un intermédiaire comme porteuse d'informations compromettantes du gouvernement russe sur Hillary Clinton - bien qu'à la fin, elle n'ait apparemment pas été en possession desdites informations.

Paul Manafort aussi est appelé à témoigner au Congrès, mais cette séance publique n'a pas encore été négociée.

« Des assignations seront sans doute nécessaires pour forcer Trump Jr. et Paul Manafort à témoigner », a averti le sénateur démocrate Richard Blumenthal, membre de la commission de la Justice, lundi sur MSNBC.

La « chasse aux sorcières » dénoncée par Donald Trump se poursuit donc malgré les admonestations du président.

Il a tweeté lundi que les commissions, et son propre ministre de la Justice « assiégé », feraient mieux d'enquêter sur Hillary Clinton.

Mais au Congrès, les élus n'ont aucune tolérance pour la Russie.

Mardi, la Chambre des représentants votera ainsi pour imposer un nouveau train de sanctions contre Moscou, une initiative jugée « extrêmement négative » pour la relation bilatérale par le porte-parole du Kremlin.

PHOTO J. SCOTT APPLEWHITE, ASSOCIATED PRESS

Jared Kushner était accompagné de son avocat Abbe Lowell pour son témoignage devant une commission du Sénat, lundi.