Deux jours après sa mortelle randonnée, le chauffeur Uber qui a semé la mort dans un coin tranquille du Michigan, abattant six personnes et blessant deux autres a été formellement inculpé pour ces meurtres, dont le mobile reste la grande inconnue.

Assis en combinaison orange de détenu, Jason Brian Dalton, 45 ans, qui travaillait en indépendant pour le service de réservation de voitures avec chauffeur, s'est vu notifier son inculpation par vidéoconférence depuis sa prison par un juge de Kalamazoo, où a eu lieu une série de trois fusillades.

Il a également été inculpé de deux chefs d'agression avec l'intention de commettre un meurtre et de huit chefs liés à l'utilisation d'une arme à feu pendant un crime, a détaillé le juge, précisant que le prévenu risquait la prison à vie pour chaque inculpation de meurtre.

Cheveux coiffés sur le côté, bouc poivre et sel et épaisses lunettes, le père de deux enfants a écouté, impassible, la liste des inculpations.

«Je souhaite garder le silence», a dit M. Dalton quand on lui a demandé au cours de l'audience s'il avait quelque chose à déclarer.

Il a été placé en détention sans caution, avant son audience préliminaire fixée au 3 mars.

Selon les chaînes ABC News et CNN, des responsables auraient affirmé, au cours d'une autre audience, que Jason Brian Dalton a avoué aux enquêteurs avoir «ôté la vie à des gens».

Les autorités n'ont aucun doute: samedi en fin d'après-midi à Kalamazoo, petite ville de 76.000 âmes du nord des États-Unis, il a tué six personnes choisies semble-t-il au hasard. Entre chaque fusillade, il aurait pris des passagers pour des courses. Il possédait une arme semi-automatique.

Des faits d'autant plus troublants que, a reconnu le procureur Jeff Getting, «il n'avait aucun passif criminel» et «rien qui aurait pu le placer sur le radar de la police».

Une information sur laquelle a d'ailleurs insisté la société Uber, affirmant qu'«aucune procédure de vérification des antécédents (autre que celle déjà utilisée par l'entreprise) n'aurait fait de différence dans cette affaire».

«Faire davantage» contre les armes

Le président Barack Obama a - comme après chaque fusillade faisant de nombreuses victimes - appelé lundi à un renforcement de l'encadrement des ventes d'armes à feu.

«En début d'année, j'ai pris des mesures pour qu'il soit plus difficile pour des individus dangereux d'acquérir une arme. Mais nous allons clairement devoir faire davantage si nous voulons assurer la sécurité des Américains», a-t-il ajouté.

M. Dalton s'est rendu sans opposer de résistance à la police lors d'un contrôle routier vers 00h40 dimanche, soit plus de six heures après les premiers tirs.

Dans son véhicule, les enquêteurs ont saisi son téléphone ainsi que d'«autres preuves», pour reconstituer son parcours exact.

«C'est probablement la question à un million de dollars: "Pourquoi cet individu a fait ça?"», a résumé Jeffrey Hadley, chef de la sécurité publique de la ville.

La prochaine audience de M. Dalton, prévue le 3 mars, pourrait permettre de lever une partie du voile.

«Monsieur tout-le-monde»

Rapidement après la fusillade, Uber a expliqué avoir «contacté la police afin de faire tout notre possible pour l'aider dans son enquête».

«C'était Monsieur tout-le-monde. Ce qui s'est passé ne pouvait pas être anticipé», a encore regretté M. Hadley.

Selon des propos du procureur dimanche, le suspect a d'abord ouvert le feu à 18h00 locales sur le parking d'un lotissement dans le nord-est de Kalamazoo, tirant à plusieurs reprises sur une femme et ses trois enfants. La femme a été grièvement blessée mais sa vie n'est pas en danger, et les enfants n'ont pas été touchés.

Peu après 22h00, il tire sur le parking d'un concessionnaire automobile dans le sud-ouest de la ville, tuant deux hommes, dont un âgé de 18 ans.

Entre 10 et 15 minutes plus tard, il tue quatre femmes dans le stationnement d'un restaurant.

Le gouverneur du Michigan, Rick Snyder, a demandé la mise en berne des drapeaux pendant six jours à partir de lundi, en hommage aux six victimes.

Dans un communiqué, la famille du tireur présumé a présenté ses condoléances aux proches des victimes. «Il n'y a aucun mot pour exprimer notre choc et notre incrédulité, nous sommes effondrés et attristés», a-t-elle indiqué, assurant qu'elle coopérerait avec les autorités «pour déterminer pourquoi et comment c'est arrivé».

«Ce type de violence n'a aucune place dans notre société», a poursuivi la famille, exprimant sa «gratitude» envers les forces de l'ordre qui ont permis «d'éviter d'autres actes de violence».

Les fusillades sont quasi-quotidiennes aux États-Unis. Le site gunviolencearchive.org en a dénombré 330 ayant tué ou blessé au moins quatre personnes en 2015.