Barack Obama présente mardi une série de mesures visant à mieux contrôler les ventes d'armes à feu aux États-Unis, une initiative à la portée limitée qui suscite cependant une véritable tempête politique.

Assurant avoir le droit et l'écrasante majorité de la population de son côté, le président américain a décidé de court-circuiter le Congrès, contrôlé par ses adversaires républicains qui refusent de légiférer sur ce thème.

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Il déclinera, à 11 h 40 depuis la Maison-Blanche, un ensemble de décrets et propositions visant à faire bouger les lignes face à des chiffres glaçants : quelque 30 000 personnes trouvent la mort par armes à feu aux États-Unis chaque année.

Principal objectif : étendre l'obligation du contrôle des antécédents judiciaires et psychiatriques requis avant une vente.

L'exécutif entend en particulier colmater les failles du système en vigueur en clarifiant la définition d'un vendeur d'armes, qui a l'obligation d'obtenir une licence fédérale et de contrôler les antécédents de ses clients.

Dans les foires itinérantes, mais aussi sur l'internet, il est en effet aujourd'hui aisé aux États-Unis d'acquérir une arme sans aucun des contrôles exigés des armuriers homologués.

«Ce n'est pas parce que vous achetez une arme d'un clic en ligne au lieu de vous rendre dans un magasin que vous devriez échapper aux contrôles», a résumé Valerie Jarrett, proche conseillère de M. Obama.

La portée et l'efficacité de ces mesures seront cependant extrêmement difficiles à mesurer. Et la Maison-Blanche se garde bien d'avancer la moindre prévision chiffrée sur le nombre de personnes concernées.

«Il faut être très clair : cela ne va pas empêcher tous les crimes violents, toutes les fusillades», a prévenu M. Obama dès lundi, répondant par avance aux critiques de ses opposants. «Mais cela permettra, potentiellement, de sauver des vies dans ce pays».

Afin d'assurer une meilleure application des lois existantes, M. Obama propose par ailleurs la création de 200 nouveaux postes au sein de l'Agence fédérale sur l'alcool, le tabac et les armes (ATF). Il suggère par ailleurs au Congrès un investissement de 500 millions de dollars pour améliorer la prise en charge des personnes souffrant de troubles psychiatriques.

«Les décisions du président sur les armes représentent une victoire importante pour la sécurité publique», a réagi sur Twitter l'ex-maire de New York Michael Bloomberg, impliqué de longue date dans ce combat.

«Pas d'impact majeur»

Avant même de connaître la teneur exacte des propositions présidentielles, les républicains avaient, eux, dénoncé l'initiative avec virulence.

«Nous ne serons bientôt plus en mesure d'acquérir des armes», a lancé dans son style lapidaire le milliardaire Donald Trump, qui fait la course en tête dans le «Grand Old Party».

À l'unisson, les candidats républicains à la Maison-Blanche ont promis d'effacer d'un trait de plume toute mesure sur ce thème s'ils l'emportent lors de la présidentielle de novembre. «Dès mon premier jour au pouvoir, tous ces décrets disparaîtront», a ainsi assuré le sénateur de la Floride Marco Rubio.

Les opposants au durcissement des lois sur les armes mettent en avant le deuxième amendement de la Constitution qui stipule qu'«il ne pourra être porté atteinte au droit du peuple de détenir et de porter des armes». Mais ce paragraphe, ratifié en 1791, donne lieu à de multiples interprétations et est au coeur d'innombrables procédures judiciaires.

Le président de la Chambre des représentants, le républicain Paul Ryan, a dénoncé le «mépris» du président pour les Américains qui tiennent à cet amendement : «Il agit comme si le droit de porter des armes était quelque chose qui devait être toléré alors que, comme l'a réaffirmé la Cour suprême en 2008, c'est fondamental».

Conscient qu'il existe une «forte tradition de possession d'armes» aux États-Unis, M. Obama assure que ses mesures, scrutées à la loupe par les juristes de la Maison-Blanche, sont en tout point conformes à la Constitution et entrent pleinement dans le cadre de ses pouvoirs présidentiels.

Il reste cependant persuadé de la nécessité, à moyen terme, d'une évolution législative pour véritablement «prendre le problème à bras-le-corps».

«Aucune des décisions (annoncées par la Maison Blanche) n'aura un impact majeur sur l'épidémie de violence par les armes en Amérique», constate, amer, le New York Times dans son éditorial.

«Mais c'est parce que M. Obama, seul, a une marge de manoeuvre limitée», ajoute le quotidien qui dénonce l'attitude des élus républicains du Congrès «qui ont choisi d'êtres aux ordres d'un lobby des armes qui est incroyablement en décalage avec le public».