Le deuxième débat des primaires présidentielles républicaines aux États-Unis aura lieu mercredi, avec 11 candidats. Au centre figureront deux hommes qui n'ont jamais été élus, Donald Trump et Ben Carson, portés par une vague de rejet des politiques «traditionnels».

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Le premier a fait fortune dans l'immobilier, son nom orne des gratte-ciels, des hôtels et des golfs de New York à Istanbul, et il a animé jusqu'à cette année une grande émission de télévision, The Apprentice, où Arnold Schwarzenegger vient de le remplacer.

Donald Trump avait souvent flirté dans le passé, dont en 2012, avec une candidature aux primaires, que beaucoup imaginaient motivée par une volonté de s'offrir un coup de pub. Mais à la surprise générale, son discours brutal de rejet de la classe politique, accusée d'être corrompue et d'avoir coulé l'Amérique, convainc aujourd'hui près d'un républicain sur trois, dans un contexte de défiance généralisée à l'égard des élus de Washington, notamment du Congrès.

Son envol s'est accompagné de l'ascension, plus discrète, de Ben Carson, ancien chef du service de neurochirurgie pédiatrique de l'hôpital Johns Hopkins à Baltimore, connu pour avoir participé à une opération pionnière de séparation de deux jumeaux attachés par la tête, en 1987.

Sa nouvelle notoriété date de 2013, quand ce républicain noir a commencé à critiquer violemment Barack Obama et sa réforme du système de santé, qu'il a un temps comparée à l'esclavage.

Un sondage New York Times/CBS paru mardi le place quasiment à égalité de Donald Trump, (23 et 27% des intentions de vote des républicains, avec 6 points de marge d'erreur).

A eux deux, ils rassemblent la moitié des républicains. Un choc pour le parti, qui avait commencé l'année en imaginant une longue bataille entre gouverneurs et sénateurs, entre élus pour qui la Maison-Blanche représentait l'étape naturelle d'une carrière sans faute.

Les Américains «cherchent un outsider, c'est évident», a analysé Donald Trump samedi dans une interview.

Donald Trump sera au centre de la scène du débat télévisé de mercredi, qui sera diffusé sur la chaîne CNN. Il sera entouré des 10 autres candidats qui se sont qualifiés, dont Ben Carson et le troisième des sondages, Jeb Bush.

«Il paraît qu'ils vont tous essayer de m'attaquer», s'est amusé Donald Trump lundi devant plusieurs milliers de personnes dans la grande arène sportive de Dallas, au Texas. «Ça m'est égal».

Une candidature autofinancée

Fidèle à ses habitudes, il s'est vanté de la taille de la foule venue le voir, et de sa popularité: «les sondages sont sortis et on casse la baraque. On casse la baraque».

Selon lui, la «majorité silencieuse», un terme popularisé par Richard Nixon, est de retour, mais elle n'est plus silencieuse. «On devrait peut-être l'appeler la majorité bruyante, agressive, la majorité qui veut gagner. On en a marre d'être baladés par des gens incompétents».

Donald Trump s'est fait beaucoup d'ennemis, et s'en amuse, car chaque dispute ajoute à la distance qu'il veut mettre entre lui et la classe des «politiciens». Le milliardaire clame qu'il est le seul incorruptible de la campagne, puisqu'il finance sa candidature avec sa propre fortune, estimée par Forbes à quatre milliards de dollars.

Le sénateur Rand Paul l'a attaqué sur ses liens supposés avec les Clinton. Très bas dans les sondages, le gouverneur de Louisiane Bobby Jindal a traité Donald Trump d'«égocentrique».

Carly Fiorina, ex-PDG de Hewlett-Packard et relative novice de la politique, est la dernière en date à se disputer avec le milliardaire, après qu'il a apparemment jugé son visage indigne d'une présidente.

«C'est le visage d'une femme de 61 ans. Je suis fière de chaque année et de chaque ride», lui a-t-elle répondu à distance lundi, en exploitant la polémique à son profit avec une vidéo très reprise dans les médias.

Donald Trump était resté Trump lors du premier débat: brusque et provocateur, se plaignant parfois que ses contradicteurs ne soient pas «gentils» avec lui. Il assure qu'il n'attaque jamais le premier.

«Il y aura sûrement des coups échangés au débat, je pense que vous serez très occupés», a prévenu sur CNN le président du parti républicain, Reince Priebus.

«Nous avons autre chose à faire que ça», a quant à lui assuré l'imperturbable Ben Carson.

Les novices

Donald Trump, 69 ans, a fait fortune dans l'immobilier, et pour sa première candidature en politique, il se retrouve loin devant ses rivaux dans les sondages. Malgré ou grâce aux tollés déclenchés par ses déclarations sur les Mexicains, les femmes ou ses adversaires, il recueille aujourd'hui plus de 30 % des intentions de vote chez les républicains.

Il n'a rien abandonné de ses manières brutales lors du premier débat en août, sans que cela ne semble lui avoir coûté en popularité.

Ben Carson : 63 ans, ancien chef du service de neurochirurgie pédiatrique de l'hôpital Johns Hopkins de Baltimore, seul Noir de la course. Il était inconnu jusqu'en 2013, mais n'a cessé de gagner en notoriété chez les conservateurs les plus fervents. Sa voix douce et sa foi tranchent avec celles de Donald Trump, mais les deux hommes ont en commun un manque de détails dans leurs propositions.

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Donald Trump

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Ben Carson

Carly Fiorina : 61 ans, ancienne PDG de Hewlett-Packard, seule femme en course. Elle n'est pas totalement nouvelle en politique (elle a perdu la sénatoriale de 2010 en Californie), mais fonde toute sa candidature sur son expérience en entreprises. Grâce à sa bonne prestation au débat d'août, elle a pris assez de points dans les sondages pour se qualifier au débat de mercredi soir.

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Carly Fiorina

Les gouverneurs

Jeb Bush : 62 ans, gouverneur de Floride de 1999 à 2007, frère et fils des anciens présidents Bush. Il est la première victime de l'ascension de Donald Trump : Jeb Bush était en tête des sondages jusqu'à l'arrivée du milliardaire, qui regarde Bush de haut en se moquant de sa mollesse. Figure de l'establishment républicain, héritier des réseaux Bush, il promeut son bilan, qu'il décrit comme conservateur et réformateur, dans le grand État de Floride.

Scott Walker : 47 ans, gouverneur du Wisconsin, ennemi public des syndicats pour avoir remis en cause des acquis sociaux de fonctionnaires en 2011. Cette bataille a fait sa réputation nationale et lui a fait gagner l'admiration des cercles conservateurs. Il cultive une image d'Américain ordinaire du Midwest, mais sa cote dans les sondages est désormais très ordinaire.

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Jeb Bush

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Le gouverneur du Wisconsin, Scott Walker.

Mike Huckabee : 60 ans, ancien gouverneur de l'Arkansas (1996-2007) et pasteur baptiste. Il s'est déjà présenté en 2008 et a animé entre-temps une émission sur la chaîne d'informations conservatrice Fox News. Récemment, il a pris la défense d'une greffière du Kentucky emprisonnée, car elle refusait de marier des couples de même sexe.

John Kasich : 63 ans, gouverneur de l'Ohio, réélu dans un fauteuil en novembre, il tente comme les autres gouverneurs de transformer au niveau national l'essai de son expérience exécutive locale. Mais sa réputation d'homme au franc-parler ne lui a permis de gagner que quelques voix.

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Mike Huckabee

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John Kasich

Chris Christie : 53 ans, gouverneur du New Jersey. Les démocrates ne l'aiment pas à cause de ses manières rudes et d'un scandale sur des embouteillages créés artificiellement dans la commune d'un adversaire politique. Les républicains, eux, se méfient de lui depuis qu'il a donné l'accolade à Barack Obama qui visitait la côte ravagée en 2012 par l'ouragan Sandy.

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Le gouverneur du New Jersey Chris Christie.

Les sénateurs

Ted Cruz : 44 ans, sénateur du Texas, excellent orateur et agitateur au Congrès de la faction tumultueuse du Tea Party, ce qui lui vaut d'être en conflit ouvert avec les chefs du parti républicain.Marco Rubio : 44 ans, sénateur de Floride. Né de parents immigrés cubains à Miami, parfaitement bilingue. Il impressionne ses pairs par le sérieux de ses propositions et sa maîtrise des sujets de politique étrangère.

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Ted Cruz

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Marco Rubio

Rand Paul : 52 ans, sénateur du Kentucky, représentant de l'aile libertaire du parti républicain, fils d'un ancien candidat à la présidentielle. Après un départ sur les chapeaux de roues, il peine à réaliser la révolution qu'il avait promise : attirer jeunes et minorités dans le giron républicain.

Le débat aura lieu mercredi à la bibliothèque présidentielle Ronald Reagan à Simi Valley en Californie, à 17 h locales (20 h à Montréal).

Quatre autres candidats moins bien placés dans les sondages ont été invités à un débat deux heures avant : l'ancien sénateur de Pennsylvanie Rick Santorum, le sénateur de Caroline du Sud Lindsey Graham, le gouverneur de Louisiane Bobby Jindal et l'ancien gouverneur de New York George Pataki.

Un 16e candidat, l'ex-gouverneur de Virginie Jim Gilmore, ne participera à aucun débat, car trop bas dans les sondages. L'ex-gouverneur du Texas Rick Perry a lui abandonné la semaine dernière.

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Rand Paul