Après des mois sur la défensive, la candidate démocrate à la Maison Blanche Hillary Clinton a choisi l'humilité et présenté ses excuses pour son usage d'une messagerie privée, une tentative de tourner la page dans une affaire qui enfle depuis mars.

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«Désolée»: le mot a enfin été prononcé sans équivoque par Hillary Clinton mardi dans une interview à la chaîne ABC.

«C'était une erreur. Je suis désolée, j'en prends la responsabilité», a-t-elle dit, tentant de mettre un point final à la polémique.

La controverse a commencé avant même l'officialisation de sa candidature, en mars, quand le New York Times a révélé qu'en tant que secrétaire d'État, de 2009 à 2013, elle avait exclusivement utilisé un serveur et une messagerie personnels, à la place du compte gouvernemental, soulevant des questions sur la sécurité de ses communications et l'exhaustivité de leur archivage légal.

Dans les mois suivants, elle avait reconnu sa responsabilité, jugé que ce n'était pas «la meilleure décision», présenté ses excuses pour la confusion suscitée, mais elle avait toujours refusé de s'excuser pour une décision qui, martèle-t-elle, n'avait rien d'illégal.

Ses excuses de mardi se sont accompagnées d'un message envoyé dans la soirée à ses listes de soutien.

«J'aurais pu, et j'aurais dû, mieux faire pour répondre aux questions plus tôt», y écrit-elle. Avec un lien vers le site du département d'État où des milliers de messages ont été mis en ligne, dans un but de transparence - un travail titanesque d'expurgation qui requiert 50 fonctionnaires, a confirmé le département d'État mercredi.

L'équipe Clinton a fait volte-face vraisemblablement face à l'érosion constante de la cote d'Hillary Clinton.

Dans son interview à ABC, Hillary Clinton admet qu'être candidate est «difficile», et laisse sa voix trembler en évoquant le souvenir de sa mère. Elle répond patiemment aux questions, et encaisse poliment quand on lui rappelle que les mots «menteuse» et «indigne de confiance» sont cités par les électeurs dans les enquêtes d'opinion.

Son équipe tente aussi de promouvoir une image plus douce et plus franche - Hillary Clinton a donc également accepté l'invitation de la populaire présentatrice Ellen Degeneres dans son émission de l'après-midi, où la candidate de 67 ans s'est laissée aller à quelques timides mouvements de danse sur scène (diffusion jeudi).

L'espoir affiché est que la transparence mettra fin à la controverse, afin que les sujets de fond de la campagne, et les propositions de la démocrate, inaudibles dans le contexte actuel, reviennent à la Une.

Souvenirs de 2008 

L'institut de référence Gallup a publié un chiffre choc la semaine dernière: jamais le nombre d'Américains ayant une opinion favorable d'Hillary Clinton n'avait été aussi bas depuis 1992, soit 41%, bien loin des 66% dont elle bénéficiait lorsqu'elle était à la tête de la diplomatie.

Elle qui démarra la course en avril avec plus de 60% des intentions de vote des électeurs démocrates des primaires se retrouve à 45% en moyenne, selon le Huffington Post, rattrapée et même dépassée dans le stratégique New Hampshire par le sénateur indépendant Bernie Sanders, 74 ans.

Mais les prochaines semaines ne devraient pas être propices à enterrer l'affaire.

Hillary Clinton est attendue le 22 octobre devant la commission d'enquête sur les attaques contre la mission diplomatique de Benghazi en Libye, en 2012, à la Chambre des représentants, dirigée par les républicains. Hillary Clinton était chef de la diplomatie à l'époque et est accusée de négligence.

Les démocrates ont demandé la dissolution de la commission, dénoncée comme une arme anti-Clinton, mais l'enquête républicaine se poursuit et s'est élargie au serveur de la candidate.

Au Sénat, deux commissions s'intéressent aussi au serveur et leurs présidents républicains ont annoncé mardi qu'ils envisageaient de proposer l'immunité à l'ex-employé des Clinton chargé d'installer le serveur, Bryan Pagliano, afin de l'inciter à témoigner.

Les plus de 30 000 messages d'Hillary Clinton continueront en outre d'être rendus publics, chaque fin de mois, par paquets, jusqu'à janvier, par le département d'État.

L'embarras d'Hillary Clinton rappelle la campagne de 2008. Le sénateur Barack Obama n'avait alors cessé de rappeler aux électeurs que la sénatrice Hillary Clinton avait voté pour autoriser George W. Bush à envahir l'Irak, en octobre 2002.

Pendant des années, elle avait refusé de reconnaître que son vote était, rétrospectivement, une erreur... un mot qu'elle n'a assumé qu'en 2014.