Le milliardaire Donald Trump caracole en tête des sondages dans le camp républicain, mais, s'il devait gagner l'investiture, ses positions extrêmes contre les immigrés pourraient venir le hanter pour l'élection présidentielle en 2016.

«Ce que fait Trump c'est du suicide politique», estime Patricio Zamorano, directeur général de la firme de consultants Infoamericas.info.

Depuis le lancement de sa campagne présidentielle en juin, Donald Trump a distancé ses adversaires républicains dans les sondages à coup de déclarations intempestives, notamment sur l'immigration qui s'est érigée comme l'un des thèmes majeurs de ce début de campagne pour l'élection de novembre 2016.

Mais s'il a pu s'attirer de la sympathie chez les conservateurs et la base électorale du parti républicain, certes déterminante pour les primaires, il s'est attiré les foudres de la communauté hispanique.

Or, les Hispaniques représentent la minorité ayant la plus forte expansion aux États-Unis avec quelque 54 millions de personnes. Ils constituent 11 % de l'électorat.

Les sondeurs de Latino Decisions estiment que pour gagner la présidentielle en 2016, il faudra que les républicains obtiennent 47 % du vote latino, soit le double de ce qu'à obtenu Mitt Romney lors de la présidentielle de 2012.

«Le vote latino sera crucial pour élire le prochain président», assure même M. Zamorano qui parle d'une «stratégie risquée» mise en place par M. Trump.

Selon un récent sondage Gallup, Donald Trump est le moins populaire chez les Hispaniques parmi les 17 candidats républicains à la Maison-Blanche, avec 51 % de personnes disant avoir une image négative du candidat.

«C'est personnel», lance même Jorge Ramos, journaliste d'origine mexicaine de la chaîne Univision, qui a eu maille à partir avec Donald Trump lors d'une récente conférence de presse où il s'est vu prier de sortir de la salle par le candidat.

Pas le seul

Et de nombreuses personnalités de la communauté hispanique ne disent pas autre chose en lançant une campagne, «Basta ya (Ça suffit)».

Le magnat de l'immobilier, 69 ans, s'est notamment illustré en juin par une tirade contre le Mexique en assurant que les immigrés venant illégalement de ce pays étaient des «violeurs».

Il a aussi proposé, s'il était élu, d'expulser les immigrés venus illégalement dans le pays et a promis de construire un mur à la frontière du Mexique et des États-Unis, et de le faire payer par les autorités mexicaines.

M. Trump n'est pas le seul sur ce terrain.

Le gouverneur du New Jersey Chris Christie, lui aussi candidat, a dit vouloir utiliser la technologie de suivi des colis employée par les messageries express comme Fedex pour lutter contre l'immigration clandestine.

Un autre candidat, l'ex-gouverneur de Floride Jeb Bush, qui est marié à une Mexicaine, a lui accusé les immigrés d'abuser de la loi offrant la nationalité américaine aux enfants nés aux États-Unis. Il a utilisé pour cela le terme péjoratif de «bébés d'ancrage», considéré comme insultant par les associations de soutien aux immigrés.

L'ascension de Donald Trump et cette vague anti-immigration suscitent quelques craintes au sein de la hiérarchie du parti républicain, qui se faisait fort de vouloir reconquérir le vote hispanique après les déboires de Mitt Romney en 2012.

Celui-ci s'était attiré les foudres de cette communauté en suggérant que les immigrés illégalement installés dans le pays devaient se porter volontaires pour repartir chez eux.

Pour Michael Cornfield, politologue à l'Université George Washington, personne n'aurait parié sur Donald Trump il y a quelques mois.

«Les candidats, les donateurs, les dirigeants des partis, tous sont sonnés de voir la réaction du public face à Trump. Personne ne s'attendait à le voir durer aussi longtemps et influencer le débat».

Selon lui, «la soudaine et forte ascension d'un candidat anti-immigration est sans précédent dans le contexte d'une course présidentielle» aux États-Unis.

Et «nous n'avons pas encore mesuré l'impact que cela aura sur le discours public, l'élection et les politiques publiques», ajoute-t-il.