C'est la goutte d'eau qui fait déborder le vase: le candidat républicain milliardaire à la Maison-Blanche Donald Trump a scandalisé la classe politique américaine samedi en contestant à John McCain, prisonnier pendant la guerre du Vietnam, son statut de «héros».

La déclaration, dans un pays où les anciens combattants sont honorés quotidiennement, pourrait fournir un prétexte idéal aux républicains pour torpiller définitivement le magnat de l'immobilier, qui a réussi en un mois à transformer sa notoriété en pole position dans les sondages des primaires.

Les Américains sont habitués aux sorties outrancières de Donald Trump: il arrose souvent ses adversaires de «stupide» et «idiot». Mais il est allé plus loin samedi en s'en prenant à l'honneur militaire du sénateur John McCain, 78 ans, qui critiquait les déclarations de Donald Trump sur l'immigration.

«Ce n'est pas un héros de guerre. C'est un héros de guerre parce qu'il a été capturé», a lâché Donald Trump, agacé, lors d'un événement conservateur dans l'Iowa, le Family Leadership Summit. «J'aime les gens qui n'ont pas été capturés», a dit l'homme d'affaires, célèbre pour son mépris des «losers» (perdants).

John McCain était pilote pendant la guerre. En octobre 1967, son avion fut touché par un missile et il dut s'éjecter. Blessé et capturé à Hanoï, il resta cinq ans et demi en captivité et fut torturé.

Le match verbal à distance entre les deux hommes s'intensifiait depuis quelques jours. John McCain, favorable à une réforme migratoire, a déclaré que Donald Trump excitait «les tarés» en s'en prenant aux immigrés clandestins mexicains, que Trump a assimilés en juin à des délinquants et des «violeurs». En réponse, Donald Trump avait traité John McCain d'«idiot».

Représailles républicaines

«Je n'arrive pas à croire ce que je lis ce matin. Horrifiée. Dégoûtée. Les mots me manquent», a réagi la fille de John McCain, Meghan McCain, sur Twitter.

Les 14 rivaux déclarés de Donald Trump aux primaires avaient jusqu'à présent redoublé de prudence pour ne pas se fâcher avec un homme qui, s'ils considèrent qu'il n'a aucune chance d'être élu, a prouvé sa capacité de nuisance. Mais il n'a fallu que quelques minutes pour qu'ils prennent le parti de l'ex-candidat à la présidentielle en 2008.

«Ça suffit les attaques calomnieuses», a écrit Jeb Bush sur Twitter. «John McCain et tous nos anciens combattants, surtout les prisonniers de guerre, ont gagné notre respect et notre admiration». «John McCain est un héros américain, point final», ont chacun écrit Scott Walker, Chris Christie et Rick Santorum.

Le président du parti républicain, Reince Priebus, est sorti de sa réserve, déclarant qu'il n'y avait «pas de place dans notre parti ou notre pays pour des commentaires qui dénigrent ceux qui ont servi honorablement dans l'armée».

Certains relevaient aussi le contraste entre l'ancien militaire et le milliardaire, qui a bénéficié de multiples sursis au moment de la guerre du Vietnam.

Donald Trump a tenté de rectifier le tir dans un communiqué ultérieur, en expliquant que John McCain passait trop de temps à la télévision et pas assez à défendre les intérêts des anciens combattants au Congrès.

«Capturés ou pas, tous nos soldats sont des héros!», a-t-il aussi écrit.

Mais la crédibilité militaire de Donald Trump semble bien faible face à celle de John McCain, qui préside la commission de la Défense du Sénat, et dont le père et le grand-père étaient amiraux.

Les deux derniers grands sondages publiés, chez Fox News et USA Today, placent Donald Trump en tête de la course à l'investiture, devant Jeb Bush avec respectivement 18 % et 17 % des intentions de vote.

Des chiffres de popularité qui lui garantissaient, jusqu'à présent, de se qualifier pour le premier débat télévisé des primaires, le 6 août sur la chaîne d'informations Fox News.