Le président des États-Unis Barack Obama a accepté mardi de retirer Cuba de la liste noire américaine des États soutenant le terrorisme, une décision qualifiée de «juste» par La Havane et qui marque une étape-clé vers la normalisation des relations entre les deux pays.

Cette initiative, qui suscite déjà l'espoir sur l'île, intervient trois jours après un tête-à-tête historique avec son homologue cubain Raul Castro à Panama, le premier depuis que les deux pays ont rompu leurs relations diplomatiques en 1961, année de la naissance d'Obama.

«Le gouvernement de Cuba reconnaît la juste décision prise par le président des États-Unis de supprimer Cuba d'une liste sur laquelle il n'aurait jamais dû figurer», affirme la directrice générale chargée des États-Unis au ministère cubain des Affaires étrangères, dans une déclaration.

L'île avait posé ce retrait comme préalable au rétablissement de ses relations diplomatiques avec Washington, qui ont fait l'objet de deux sessions de pourparlers, en janvier à La Havane, et en février à Washington, après l'annonce historique en décembre de leur rapprochement.

L'objectif est de rouvrir des ambassades dans les deux capitales. Les deux pays entretiennent depuis 1977 des sections d'intérêts qui font office de chancelleries.

Dans un rapport présenté au Congrès, le président américain a fait part de son «intention de supprimer» Cuba de cette liste, avait annoncé plus tôt la Maison-Blanche. Il a fait valoir que «le gouvernement cubain n'a apporté aucun soutien au terrorisme international ces six derniers mois».

Les élus ont maintenant 45 jours pour manifester leur opposition. S'ils s'opposent à ce retrait, M. Obama peut exercer un droit de veto.

Le retrait de Cuba de cette liste, sur laquelle l'île figure depuis 1982, avait été recommandé par le département d'État américain.

Dans un premier temps, Washington ne souhaitait pas associer ce dossier aux négociations, mais le département d'État avait entamé les démarches pour la levée de cet obstacle.

D'autres départements ainsi que les agences américaines de renseignement ont aussi plaidé en faveur de ce retrait, a précisé l'exécutif américain.

Décision «terrible»

La nouvelle, retransmise sur l'île par internet et la télévision vénézuélienne Telesur, suscitait déjà l'espoir.

«Cette décision d'Obama nous permet, à nous les Cubains, de mesurer le sérieux des étapes qui sont en train d'être franchies, et c'est clair que cela donne espoir», a déclaré à l'AFP Natalia Diaz, travailleuse indépendante de 53 ans de La Havane.

«C'est un geste très courageux d'Obama, même si Cuba n'aurait jamais dû faire partie de cette liste», a réagi l'actrice à la retraite Glice Fariñas, âgée de 68 ans, en ajoutant qu'elle attendait également «la levée par Obama de l'embargo, qui lui aussi nous a fait beaucoup de mal».

«Les circonstances ont changé depuis 1982», a souligné le secrétaire d'État John Kerry. «Notre hémisphère et le monde sont très différents aujourd'hui par rapport à il y a 33 ans.»

Dick Durbin, numéro deux des démocrates du Sénat, a soutenu l'initiative de M. Obama. «Bien que je ne sois pas un fervent soutien du régime de Castro, je continue à croire que l'ouverture de l'île aux idées, au commerce et à l'élan américains est la manière la plus efficace de voir un pays plus ouvert et plus tolérant», a-t-il déclaré.

Parmi les républicains, qui sont hostiles à ce rapprochement, le sénateur et candidat à la Maison-Blanche Marco Rubio a qualifié cette décision de «terrible». «Cuba est un État qui soutient le terrorisme. Ils abritent des gens qui ont fui la justice américaine, y compris quelqu'un qui a tué un policier dans le New Jersey il y a 30 ans», s'est-il insurgé.

M. Rubio et Jeb Bush, autre républicain favori dans la course à la Maison-Blanche, ont beaucoup de partisans parmi les Cubains exilés en Floride.

Ed Ryce, président républicain de la commission des Affaires étrangères à la Chambre des représentants, a accusé la Maison-Blanche de ne pas avoir consulté le Congrès et taxé le processus de «bâclé».

Cuba figure sur cette liste au côté de la Syrie, du Soudan et de l'Iran. L'administration Reagan l'y avait placée pour son soutien aux séparatistes basques de l'ETA et aux rebelles Farc en Colombie.

Si l'île en était retirée, elle pourrait à nouveau prétendre à des financements d'organismes internationaux, à l'ouverture d'une ambassade aux États-Unis ou encore à l'accès au système bancaire américain.

Cela pourrait surtout ouvrir la voie à une éventuelle levée de l'embargo économique qui frappe Cuba depuis 1962.