Le rapport d'autopsie, publié lundi, permet au moins d'établir hors de tout doute la cause de la mort de Renisha McBride: la jeune femme noire, âgée de 19 ans et domiciliée à Detroit, a été tuée d'une balle en plein visage.

Autre fait indéniable: elle n'était pas armée.

Mais le tireur, homme blanc âgé de 54 ans habitant à Dearborn Heights, en banlieue de Detroit, n'a été ni arrêté ni inculpé. Et s'il finit par l'être, il pourrait s'appuyer sur les lois de son État, le Michigan, pour invoquer la légitime défense.

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La tragédie rappelle l'affaire Trayvon Martin, du nom de l'adolescent noir tué par un vigile blanc en Floride, il y a moins de deux ans. Et elle soulève la même indignation au sein de la communauté afro-américaine de Detroit et d'ailleurs aux États-Unis.

«Nous prions pour la famille de Renisha McBride, mais nous demandons aussi d'urgence que justice soit faite pour la perte de cette fille, cette soeur, cette amie», a déclaré la semaine dernière le pasteur noir Al Sharpton, qui avait mené la campagne pour l'arrestation et l'inculpation de George Zimmerman, le tueur de Trayvon Martin.

Les événements

Il était environ 4h du matin, le 2 novembre, lorsque Renisha McBride a sonné à la porte de l'homme qui allait lui enlever la vie. Selon sa famille, elle cherchait de l'aide après avoir eu un accident de voiture. Son téléphone cellulaire ne fonctionnant pas, elle frappait depuis une heure aux portes des résidences d'un quartier de Dearborn Heights, une ville dont 86% des habitants sont blancs.

Son tueur, qui n'a pas encore été identifié, a été le seul à lui répondre. Il a ouvert la porte et appuyé sur la détente d'un fusil de chasse. Atteinte au visage, la jeune femme s'est effondrée sur la véranda de la résidence.

Le tireur a d'abord déclaré à la police avoir ouvert le feu par accident. Son avocate a plus tard affirmé que son client pensait que Renisha McBride tentait d'entrer chez lui par effraction.

«Quand la preuve sera présentée, je ne doute pas qu'elle démontrera que mon client était justifié [d'agir comme il l'a fait] et qu'il s'est comporté comme une personne raisonnable qui craignait pour sa vie», a déclaré lundi Cheryl Carpenter.

L'avocat de la famille de la victime, Gerald Thurswell, a répliqué: «S'il craignait pour sa vie, il pouvait appeler le 911. Il a décidé d'ouvrir la porte, de sortir sur la véranda et de pointer un fusil de chasse dans son visage.»

Connaître les lois

Le Michigan est l'un des États américains où une loi, dite Stand Your Ground, autorise un individu à utiliser une arme à feu dès qu'il se sent menacé. On y trouve aussi une loi reconnaissant la Castle Doctrine, qui donne au propriétaire d'une résidence le droit de la défendre par tous les moyens.

Mais Lawrence Dubin, professeur de droit à l'Université de Detroit, doute que l'une ou l'autre de ces lois puissent aider le tireur dans un éventuel procès.

«À en juger par les faits connus, la Castle Doctrine ne semble pas s'appliquer ici parce qu'il n'y a aucune tentative de la part de la victime d'entrer dans la maison. Frapper à la porte d'une maison d'un individu ne peut être considéré comme une violation de domicile, a-t-il déclaré à La Presse hier.

«Quant à la loi Stand Your Ground, elle devient moins pertinente à partir du moment où le tireur déclare à la police avoir ouvert le feu par accident. Évidemment, il voudra l'invoquer s'il décide de plaider la légitime défense.»

Le bureau du procureur du comté de Wayne décidera d'inculper ou non le tueur de Renisha McBride après avoir reçu le rapport des enquêteurs.