La justice américaine a abandonné vendredi contre toute attente les charges pesant sur une princesse saoudienne accusée d'avoir fait travailler dans des conditions abusives une employée kényane et inculpée pour trafic d'être humain, en raison de preuves insuffisantes.

«Les accusations étaient fortes et nous avions de bonnes raisons de penser qu'elles étaient vraies», a expliqué devant la presse le procureur du comté d'Orange, en Californie, Tony Rackauckas.

En juillet, une mère de famille kényane assurant s'être échappée, avait été recueillie par un chauffeur de bus, portant sur elle un dépliant sur la lutte contre l'esclavagisme et les droits des victimes.

Elle avait alors accusé Meshael Alayban, 42 ans, l'une des six épouses d'un petit-fils du roi Abdallah d'Arabie saoudite, de la faire travailler 16 heures par jour, sept jours sur sept, pour un salaire mensuel de 220 dollars, dans son palais saoudien, puis dans une résidence à Irvine, au sud-est de Los Angeles. Toujours selon ses accusations, Meshael Alayban lui avait confisqué son passeport pour l'empêcher de s'échapper.

La princesse, arrêtée et inculpée en Californie dans la foulée, encourait 12 ans de prison si elle avait été reconnue coupable de trafic d'être humain. Elle avait été remise en liberté contre une caution de cinq millions de dollars, avec l'obligation de porter en permanence un système de géolocalisation et de ne pas quitter le comté d'Orange sans permission.

«Évidemment déçus»

La Kényane --dont l'identité n'a pas été dévoilée-- avait selon des informations de presse quitté son pays pour travailler et payer des soins médicaux à sa fille. Elle travaillait depuis 2012 dans le palais saoudien où vit Meshael Alayban, puis l'avait suivie en mai 2013 en Californie, dans sa résidence d'Irvine.

Selon l'accusation, elle avait signé un contrat lui promettant un salaire mensuel de 1.600 dollars pour 40 heures de travail hebdomadaire. Mais ses avocats assurent qu'elle travaillait en réalité 16 heures par jour, sans aucun jour de repos.

«Il semblait que des preuves corroboraient la plainte déposée, mais au fur et à mesure que nous les avons étudiées en profondeur, il est apparu que ce n'était pas le cas», s'est justifié vendredi Tony Rackauckas, qui avait pourtant auparavant évoqué «un cas exemplaire de travail forcé».

«Nous avions affaire à une famille qui pouvait quitter la juridiction très rapidement, je pense donc que nous avons bien fait d'intenter des poursuites à l'époque, étant donné les circonstances», a-t-il poursuivi.

Les avocats de la princesse ont pour leur part accusé l'employée kényane d'avoir menti dans l'espoir d'obtenir un visa américain. «Il est évident qu'elle cherchait à avoir un visa», a affirmé Paul S. Meyer, disant soupçonner l'employée d'avoir menti «depuis le moment où la plainte a été déposée». «Tout ça sentait mauvais», a-t-il estimé.

Les avocats de la princesse ont également souligné que la Kényane avait voyagé jusqu'en Californie en première classe et faisait du shopping dans les centres commerciaux d'Irvine aux frais de sa patronne.

Le conseil de l'employée a récusé les accusations de mensonge: «Dire que tout cela était pour obtenir un visa est ridicule», a commenté Steve Baric, ajoutant que lui-même et sa cliente étaient «évidemment déçus» de l'abandon des charges.