Défiant Nidal Hasan du regard avec l'unique oeil qui lui reste, Alonzo Lunsford a décrit mardi à l'ouverture du procès de l'ex-psychiatre de l'armée américaine comment il avait survécu à la fusillade de Fort Hood au Texas en 2009.

Le sergent-chef aujourd'hui retraité était la première victime à témoigner lors du premier jour du procès de Nidal Hasan, accusé d'avoir tué 13 personnes et d'en avoir blessé 32 autres en novembre 2009 sur la base militaire de Fort Hood, au Texas.

Après avoir expliqué avoir tenté de «faire le mort» avant de réaliser que ce n'était pas crédible parce que «les morts ne suent pas», Alonzo Lunsford a montré les sept parties de son corps dans lesquelles Nidal Hasan a tiré --dans la tête, le dos et le ventre.

Michelle Harper, une civile qui travaillait sur la base au moment de la fusillade, s'est quant à elle cachée sous un bureau quand les coups de feu ont éclaté, a-t-elle expliqué à la cour. Dans l'enregistrement du coup de fil qu'elle passe alors aux secours, diffusé mardi, on entend distinctement des coups de feu quand elle gémit «faites vite, je vous en prie».

«Oh mon dieu, il a tiré sur tout le monde», lance-t-elle ensuite à l'opérateur.

Nidal Hasan, qui a obtenu le droit de se défendre lui-même lors de son procès devant la cour martiale, a revendiqué son geste dès l'ouverture du procès, se présentant comme un «moudjahidine» qui avait «changé de camp». «Le 5 novembre 2009, 13 soldats américains ont été tués et de nombreux autres blessés. Les preuves vont clairement montrer que je suis le tireur», a-t-il affirmé dans une courte déclaration liminaire.

«J'ai changé de camp»

Né en Virginie de parents palestiniens, Nidal Hasan, 42 ans, devenu paraplégique à la suite de la fusillade, encourt la peine de mort s'il est reconnu coupable. Le code militaire lui interdit de plaider coupable et l'ancien psychiatre à la barbe très fournie va donc tenter de convaincre les 13 jurés militaires qu'il ne mérite pas la peine de mort.

«Les preuves présentées lors de ce procès vont aussi montrer que j'ai changé de camp», a poursuivi Nidal Hasan, en tenue militaire dans son fauteuil roulant. «Nous, les moudjahidines, sommes des musulmans loin d'être parfaits qui tentons d'établir une religion parfaite sur la terre de Dieu», a-t-il poursuivi: «Je m'excuse pour les erreurs que j'aurais pu commettre en faisant cela».

Selon l'accusation, trois semaines avant le massacre, il avait assuré à un médecin: «Il va se passer quelque chose s'ils pensent qu'ils vont m'envoyer sur le terrain».

La fusillade de novembre 2009 est la pire jamais survenue sur une base militaire américaine dans l'histoire du pays. Le haut commandement de l'armée avait été soumis à d'intenses critiques pour avoir ignoré des signes avant-coureurs dans le comportement de Hasan qui, selon le FBI, correspondait par courriel avec l'imam radical Anwar Al-Aulaqi, tué dans une attaque de drone américain au Yémen en septembre 2011.

L'accusé, considéré comme un «loup solitaire» d'Al-Qaïda, qui se préparait à être déployé en Afghanistan avant son attaque, avait avant son procès déclaré avoir commis cet acte pour défendre ses frères musulmans contre une guerre «illégale» dans ce pays.

La juge militaire Tara Osborn --qui a aussi interdit à l'accusation d'évoquer le «terrorisme» comme motif de la fusillade-- lui avait toutefois signifié qu'il ne pourrait se prévaloir de cela pour bâtir sa défense. Le droit à «défendre les autres» peut dans certains cas être utilisé de la même manière que la légitime défense devant un tribunal lorsque des personnes sont en situation de danger immédiat.