L'ancien chef de la CIA à Milan, condamné à neuf ans de prison pour l'enlèvement d'un imam égyptien en 2003 en Italie, a été arrêté à Panama, a annoncé jeudi le ministère italien de la Justice.

La ministre de la Justice, Anna Maria Cancellieri, a signé une requête de détention provisoire à l'encontre de Bob Seldon Lady, surnommé «Mister Bob», et a deux mois pour réclamer son extradition.

Il est accusé d'être responsable de l'enlèvement en 2003 d'un imam égyptien, Abou Omar, membre de l'opposition islamiste radicale, qui bénéficiait de l'asile politique en Italie. L'imam avait ensuite été transféré en Égypte où il affirme avoir été torturé.

Dans cette affaire, la Cour d'appel de Milan avait confirmé en décembre 2010 des peines allant de sept ans à neuf ans de prison pour 23 agents, la plus lourde étant infligée à «Mister Bob», âgé aujourd'hui de 59 ans.

Ces peines, prononcées alors que tous les accusés étaient en fuite, avaient été confirmées en septembre 2012 par la Cour de cassation.

Alors que le Parquet réclamait que des recherches soient engagées à leur encontre au niveau international, le prédécesseur de Mme Cancellieri avait signé cette requête seulement pour le principal responsable de l'enlèvement.

Abou Omar, de son vrai nom Osama Hassan Nasr, avait été enlevé dans une rue de Milan le 17 février 2003 au cours d'une opération coordonnée entre le Sismi (services de renseignement militaire italien), et la CIA, puis transféré en Égypte. Ses avocats affirment qu'il a été torturé dans la prison de haute sécurité où il était détenu en Égypte et avaient réclamé 10 millions d'euros de dommages et intérêts.

La Cour d'appel avait confirmé un dédommagement décidé en première instance de 1,5 million d'euros, dont 1 million pour Abou Omar et le reste pour sa femme.

Les responsables des services de renseignements italiens avaient pour leur part été acquittés en première instance, décision confirmée en appel. Mais à la suite d'un arrêt de la Cour de cassation, ils doivent être rejugés.

Le 5 avril dernier, le président Giorgio Napolitano avait concédé la grâce à Joseph Romano, responsable de la base américaine d'Aviano d'où l'avion transférant l'imam vers son pays était parti. Cette décision, au bénéfice de l'unique militaire du Pentagone et de l'OTAN condamné dans cette affaire, avait été saluée par les États-Unis.

Le procès en première instance, ouvert en juin 2007, était hautement symbolique, car c'était le premier en Europe sur les transfèrements secrets par la CIA de personnes soupçonnées de terrorisme vers des pays connus pour pratiquer la torture, après les attentats du 11 septembre 2001 aux États-Unis.

Après les condamnations en première instance en novembre 2009, les États-Unis s'étaient déclarés «déçus», tandis qu'Amnesty International avait salué «un pas en avant».

Jeudi soir, le Parti démocrate (gauche) a «pris acte avec satisfaction» de cette arrestation. Un autre parti de gauche non membre de la coalition gouvernementale, Sinistra e Libertà, a réclamé l'extradition du responsable, «un mode tardif de réaffirmer la souveraineté sur notre territoire et sur le respect des droits fondamentaux de la personne qui ont été violés à l'occasion de l'enlèvement d'Abou Omar».