A deux jours de la date-butoir, les coupes budgétaires massives qui se profilent aux États-Unis alimentent les craintes des marchés et les doutes sur la capacité du pays à réduire sa dette en évitant les psychodrames politiques.

Dans ce qui s'apparente à une réunion de la dernière chance, la Maison-Blanche a annoncé mercredi que le président Barack Obama recevrait les chefs de file du Congrès vendredi, le jour même où ces réductions automatiques dans les dépenses de l'État doivent commencer à entrer en vigueur.

Faute d'accord, le budget fédéral sera amputé de 85 milliards de dollars jusqu'à fin septembre, affectant principalement les dépenses de défense et les programmes sociaux, avant d'être sabré de 109 milliards par an pendant les dix prochaines années.

Tout en assurant que les coupes ne se feraient pas sentir avant plusieurs semaines pour la plupart des Américains, M. Obama a prévenu qu'elles constitueraient à terme «un gros choc pour l'économie».

«Tant le secteur privé que le secteur public estiment que nous pourrions perdre 0,6 point de croissance économique», a-t-il rappelé mercredi soir devant un parterre d'hommes d'affaires. «Cela veut dire que moins de consommateurs auront de l'argent. Cela veut dire que l'économie mondiale sera plus faible».

«Le pire, c'est que (cette rigueur) est entièrement superflue», s'est-il lamenté, en répétant son credo d'une «approche équilibrée» pour réduire le déficit budgétaire: des coupes mais aussi une hausse des impôts pour les contribuables les plus aisés.

Depuis plusieurs jours, l'administration démocrate dresse la liste des conséquences, parfois bien concrètes, de cette cure d'austérité forcée: mises au chômage partiel massives, baisses des aides aux enseignants, retards dans le transport aérien...

«Jeux politiques»

«Les coupes auront un impact négatif sur l'économie, cela ne fait aucune doute. La question est plutôt de savoir si cela aura aussi un effet sur les bénéfices des entreprises et leur capacité à prospérer dans cet environnement», a expliqué à l'AFP David Levy, de Kenjol Capital Management.

Hugh Johnson, de Hugh Johson Advisors, relativise et assure que l'inquiétude suscitée par cette cure de rigueur a «diminué».

Au-delà de ce nouveau psychodrame politique, c'est la capacité même des États-Unis à réduire leur dette qui suscite des doutes.

Le président de la Banque centrale américaine (Fed) Ben Bernanke l'a martelé mercredi lors d'une audition au Congrès: «Le processus difficile devant permettre de régler les déséquilibres de long terme ne fait que commencer».

Mais depuis deux ans, toute ébauche de compromis bute sur l'opposition entre démocrates, majoritaires au Sénat, et républicains, qui dominent la Chambre des représentants et refusent par principe toute hausse de la fiscalité, privilégiant les coupes dans les budgets sociaux chers aux démocrates.

A l'été 2011, la bataille sur le plafond de la dette avait conduit l'agence Standard and Poor's à priver les États-Unis de leur triple A, le sésame permettant d'emprunter aux meilleures conditions sur les marchés financiers. Les conditions de financement du pays n'en ont toutefois pas pâti.

Après des mois de discussions, un accord arraché début janvier avait permis de repousser l'échéance sur les coupes budgétaires jusqu'au 1er mars. La question du plafond de la dette reste en suspens et l'adoption du budget promet de nouvelles batailles.

Selon l'économiste Joel Naroff, si un accord était conclu dans les prochaines semaines, les conséquences des coupes budgétaires pourraient être neutralisées «assez rapidement», mais puisqu'«il s'agit de jeux politiques, il est très difficile de faire la moindre projection».