L'ordre catholique de la Légion du Christ, désormais en disgrâce au Vatican, aurait commis une entorse à ses propres règles internes à l'endroit d'une dame âgée et fortunée, et l'aurait maintenue à distance de ses proches.

C'est du moins ce que révèlent de nouveaux documents de la cour, rendus publics vendredi aux États-Unis. Et selon un avocat, la direction de l'ordre religieux convoitait la fortune de 60 millions de dollars de Gabrielle Mee avant d'en hériter à sa mort, en 2008.

La nièce de Mme Mee, Mary Lou Dauray, a poursuivi en justice la Légion après la mort de sa parente. Elle affirmait alors que sa tante s'était fait extorquer par un ordre qui tentait de lui cacher le passé criminel de son fondateur.

En septembre, un juge de la Cour supérieure du Rhode Island a débouté Mme Dauray, affirmant qu'elle n'avait pas les motifs nécessaires pour intenter une poursuite. Mais le juge Michael Silverstein a néanmoins tenté de décrire en détail le processus par lequel la Légion du Christ avait fraudé Mme Mee, violant ses propres règles pour lui permettre de devenir une membre «consacrée», l'invitant à des séjours à Rome et au Mexique et lui accordant un accès privilégié au prêtre Maciel.

Selon l'avocat de Mme Dauray, l'organisation a tenté d'empêcher Mme Mee de faire des dons à d'éventuels bénéficiaires. Dans un document de la cour, Bernard Jackovny écrit que lorsqu'une «oie est assise sur des oeufs en or, on lui coupe ses ailes pour l'empêcher de quitter la ferme».

Entre autres documents rendus publics vendredi, une amie de la défunte, Joanne McKosker raconte comment elle avait été attristée de ne pas pouvoir renouer avec Gabrielle Mee. Les deux femmes, de ferventes catholiques, s'étaient liées d'amitié dans les années 1980 et Mme McKosker avait rendu visite à sa richissime amie après qu'elle eut déménagé dans un centre de la Légion du Christ à Smithfield, dans le Rhode Island. Mme McKosker a déclaré qu'après avoir demandé à Gabrielle Mee de verser un don de 5000 $ à un organisme antiavortement, elle s'était vue refuser l'accès au centre pour de nouvelles visites.

La Légion du Christ a été mise sous la tutelle du pape Benoît XVI en 2010, après qu'une enquête du Vatican eut déterminé que le défunt fondateur, Marcial Maciel, avait vécu une double vie en ayant deux femmes et étant père de trois enfants. Par ailleurs, le Saint-Siège a su pendant des décennies que le prêtre Maciel agressait sexuellement des personnes, le présentant malgré tout comme un bienfaiteur en raison de la réputation conservatrice de son ordre et de ses habiletés à recruter des prêtres et recueillir des fonds.