La trentaine de personnes, dont une majorité d'enfants, abattues par un tireur lourdement armé vendredi dans une école primaire américaine pousseront-elles Washington à légiférer sur les armes d'assaut? Après une année particulièrement sanglante, le débat est réactivé.

La Maison Blanche a refusé de s'engager sur la question de la réforme des lois régulant la vente d'armes à feu vendredi, alors que le bilan final de la fusillade n'était pas encore connu.

«Ce n'est pas le jour» de discuter de politique, a déclaré son porte-parole Jay Carney. «Je pense qu'il est important, dans un tel jour (...), de ressentir une énorme empathie pour ceux qui ont été touchés», a-t-il ajouté. Le président Barack Obama lui-même devait s'exprimer à 20H15 GMT sur la tragédie.

Mais l'élu démocrate Jerrold Nadler a immédiatement répondu à l'instar de nombreux Américains sur Twitter: «si ce n'est pas le moment d'avoir une discussion sérieuse sur le contrôle des armes, je ne sais pas quand cela arrivera».

«Encore une personne instable qui a eu accès à des armes à feu et commis un crime horrible contre des enfants innocents», ajoute l'élu. «Je mets le président Obama, le Congrès et le public américain au défi d'agir au-delà du choc, et d'enfin faire quelque chose».

Après une autre tuerie contre un temple sikh, cet été, la Maison Blanche avait rejeté toute idée de nouvelle législation pour le contrôle des armes.

Le porte-parole de Barack Obama avait rappelé que la position du président en la matière restait de s'assurer que ceux qui ne sont pas autorisés à porter des armes ne puissent pas s'en procurer, tout en garantissant aux autres Américains le droit inscrit dans la Constitution à posséder des armes --le fameux Second Amendement défendu bec et ongles par le lobby des armes.

Sans dissimuler leur lassitude et leur colère, les médias américains ont réactivé une nouvelle fois le débat, comme ils l'avaient fait après les tueries d'Aurora dans le Colorado cet été (12 morts dont le tireur) et cette semaine après une fusillade dans un centre commercial de l'Oregon (trois morts dont le tireur).

«Ce n'est pas un jour pour faire de la politique», a dit Susan Page, la chef du bureau de Washington du grand quotidien USA Today, citée par Politico. Mais «est-ce le point de non-retour? Je ne sais pas».

«Il faut qu'on voit du changement, qui soit mesurable», a déclaré sur son antenne Alex Wagner, journaliste de la chaîne de gauche MSNBC. «On espère qu'il y aura suffisamment de poids politique pour réformer la façon dont nous traitons les armes et la violence par armes à feu dans ce pays».

Mais les défenseurs du Second Amendement sont rodés. Comme à chaque tuerie, ils confient leur choc et rappellent que la solution n'est pas à chercher du côté des restrictions sur les ventes d'armes semi-automatiques dites d'assaut. Les armes automatiques, elles, restent interdites à la vente.

«Nous déplorons la mauvaise utilisation des armes à feu», explique à l'AFP Alan Gottlieb, fondateur de la Fondation du Second Amendement.

«Mais il y a un bon côté aux armes qu'on ne peut pas oublier. Ce qui me reste en travers de la gorge, c'est que tous ces crimes complètement fous se sont déroulés dans des lieux où il est interdit d'avoir des armes», poursuit-il, estimant que les adultes de l'école devraient avoir le droit d'être armés.

«Je suis sûr que la personne qui a commis cet horrible crime savait qu'il pouvait y aller et que personne ne pourrait l'arrêter».

Barack Obama argumente que l'opposition des républicains du Congrès rend impossible toute réforme des lois fédérales réglementant le commerce des armes, et notamment la réintroduction de l'interdiction des fusils d'assaut votée durant le mandat du démocrate Bill Clinton, dans les années 1990, mais qui a expiré en 2004 sous son successeur républicain, George W. Bush.