Le diplomate américain Richard Holbrooke, décédé lundi aux Etats-Unis, était l'émissaire de l'administration Obama pour l'Afghanistan et le Pakistan. Il était connu pour avoir été l'artisan de l'accord de paix de Dayton, qui a mis fin en 1995 à la guerre en Bosnie.

Surnommé «le Kissinger des Balkans» ou le «Bulldozer», M. Holbrooke, 69 ans, était un homme brillant et très ambitieux, qui a partagé sa vie entre la diplomatie et Wall Street.

Le président Barack Obama lui avait confié en janvier 2009 à son arrivée à la Maison Blanche la tâche difficile de représenter la diplomatie américaine dans une région où les Etats-Unis mènent depuis 2001 une guerre contre les talibans.

Barack Obama va d'ailleurs s'exprimer jeudi sur l'Afghanistan et le Pakistan, à l'occasion de la remise d'un rapport d'étape qui devrait évoquer des «progrès», un an après l'annonce de sa nouvelle stratégie dans cette région.

Richard Holbrooke était aux côtés de la secrétaire d'Etat Hillary Clinton le 20 juillet à Kaboul lors d'une conférence pour apporter le soutien de la communauté internationale au projet du président afghan Hamid Karzaï d'assurer avec ses propres forces la sécurité du pays d'ici à la fin 2014, ainsi qu'à sa politique de main tendue aux talibans.

Récemment, après des inondations dévastatrices au Pakistan, il avait plaidé auprès des Européens pour l'envoi d'aide à la reconstruction au Pakistan.

Né le 24 avril 1941 à New York, il entame sa carrière diplomatique à 21 ans au Vietnam, grâce à sa connaissance de la langue vietnamienne.

Il grimpe rapidement les échelons et devient à 35 ans secrétaire d'Etat adjoint chargé des Affaires asiatiques, sous le président démocrate Jimmy Carter. C'est pendant son mandat que les Etats-Unis normalisent leurs relations diplomatiques avec la Chine.

A l'arrivée au pouvoir du républicain Ronald Reagan, en 1981, il entre à la banque d'affaires Lehman Brothers, dont il devient directeur général.

Bill Clinton le rappelle en 1993 et le nomme ambassadeur en Allemagne. En 1995, il devient secrétaire d'Etat adjoint aux Affaires européennes. C'est à ce titre qu'il entreprend plusieurs voyages en ex-Yougoslavie pour y susciter des négociations de paix.

Parfois critiqué pour son franc-parler, voire son arrogance et son goût des projecteurs, cet homme grand, massif et réputé pour son appétit phénoménal fait merveille dans les négociations marathon sur la base militaire de Dayton, dans l'Ohio, qui débouchent en 1995 sur l'accord de paix pour la Bosnie, encore considéré comme l'un des plus grands succès diplomatiques américains.

La presse américaine souligne à l'époque «son énergie et sa détermination» face aux chefs de guerre.

Alternant charme et coups de gueule, il est capable de manipulation et de cynisme, et paraît trouver dans le président serbe Slobodan Milosevic un adversaire à sa mesure. Lors du décès de ce dernier dans sa prison de La Haye en 2006, Holbrooke confie qu'il ne versera «pas de larmes» pour ce «monstre».

Son nom a refait surface à l'été dernier lorsque l'ancien chef politique des Serbes de Bosnie, Radovan Karadzic, a assuré après son arrestation que Richard Holbrooke lui avait promis l'impunité en 1995.

Après la signature des accords de Dayton, Richard Holbrooke est de nouveau tenté par Wall Street et prend en 1996 la vice-présidence de la banque Credit Suisse First Boston. Mais Bill Clinton le rappelle en 1999 et il devient ambassadeur à l'ONU jusqu'à l'arrivée au pouvoir du président George W. Bush en 2001.

Il a siégé dans de nombreux conseils d'administration dont celui de Coca-Cola. Son nom avait été cité en 2004 comme secrétaire d'Etat éventuel en cas de victoire à la présidentielle du candidat démocrate John Kerry.

Père de deux garçons, il a épousé en 1994 sa troisième épouse, Kati Marton, ancienne journaliste et ex-femme du présentateur vedette décédé Peter Jennings.