Alors qu'une majorité d'Américains clame son opposition à l'édification d'un centre islamique au sud de New York, à quelques mètres de là -et dans la discrétion- le vide laissé par les attentats du 11 septembre à Ground Zero commence lentement à être comblé.

Jusqu'à l'année dernière, cette plaie béante infligée à Manhattan par la destruction des tours jumelles du World Trade Center n'attirait guère que touristes, curieux et proches des quelque 3000 personnes mortes dans les attentats du 11 septembre. La reconstruction du site, elle, se faisait attendre.

En huit années, les polémiques entre promoteurs immobiliers et propriétaires se sont succédées, ponctuées par les austères hommages rendus aux victimes chaque 11 septembre, sans que l'Amérique ne se décide à enfin tourner la page et à aller de l'avant.

C'est dans ce contexte qu'est née la controverse autour d'un projet de construction d'un centre islamique. Peu importe que ce centre -qui doit comprendre une mosquée- doive être érigée non pas à Ground Zero même, mais à deux pâtés de maison plus au nord, les adversaires du projet n'en démordent pas: construire un lieu de prières musulman dans le quartier constitue, à leurs yeux, une insulte à la mémoire de victimes.

Selon un sondage réalisé pour CNN, 68% des Américains sont opposés au projet. Le maire de New York, Michael Bloomberg, est bien seul au milieu de ses administrés à prêcher le contraire.

Ironie du sort: c'est justement au moment où Ground Zero revient au devant de l'actualité que le tout nouveau «World Trade Center» commence à prendre forme.

Après des années de bisbilles, Larry Silverstein, le principal promoteur du «World Trade Center», et l'Autorité portuaire de New York et du New Jersey, propriétaire des lieux, ont conclu en mars dernier un accord permettant de sortir de l'impasse.

La pièce-maîtresse de cette renaissance est le «One World Trade Center», produit de l'imagination de l'architecte David Childs. Selon son concepteur, la tour pourra revendiquer le titre de bâtiment le plus haut du pays, culminant à 1776 pieds (541 m), comme un clin d'oeil à l'année où les États-Unis ont pris leur indépendance de la Grande-Bretagne (le 4 juillet 1776).

La tour s'élève déjà à 100 m. Lors de son inauguration, prévue en 2013, elle aura 104 étages, indique la société immobilière chargée de commercialiser les 269 000 m2 de bureaux et les 46 000 m2 de restaurants et autres boutiques qu'elle comptera.

À en croire Tara Stacom, vice-présidente de Cushman & Wakefield, le chantier n'est en rien affecté par la controverse autour de la mosquée.

Le débat, a-t-elle dit, «n'a eu aucune répercussion» sur les ventes d'espaces dans la future tour. «La demande est très forte», a-t-elle ajouté.

«Ce bâtiment va transformer la ville. De nombreuses sociétés, dont de grandes banques, veulent y participer. Nous avons reçu une déclaration d'intention (du groupe de presse) Condé Nast qui souhaite acquérir une partie significative du bâtiment», a précisé Mme Stacom.

À la fin de l'année, le «One World Trade Center», dont les promoteurs assurent qu'il sera le bâtiment le plus «écologique» de la planète, devrait atteindre les 50 étages.

Cinq autres gratte-ciels viendront accompagner le «One WTC», dont la «Tour 4» qui culminera à 288 m.

S'ajouteront un monument en hommage aux victimes du 11 septembre, ainsi qu'une gare ferroviaire et routière, dont le hall sera «plus grand que celui de Grand Central», la majestueuse gare centrale de New York, insiste Tara Stacom.