Jimmy Carter a soulevé une vive polémique aux États-Unis en attribuant à la couleur de la peau de Barack Obama «une part considérable des démonstrations intenses d'animosité contre» lui, y compris la sortie du représentant républicain de Caroline-du-Sud, Joe Wilson, qui a crié «Vous mentez !» en plein discours du président devant le Congrès la semaine dernière.

«Je vis dans le Sud (des États-Unis) et j'ai vu le Sud faire un grand chemin contre le racisme et j'ai vu le reste du pays qui partageait l'attitude du Sud face aux minorités faire aussi un long chemin. Mais le racisme existe toujours et je pense qu'il remonte à la surface parce que beaucoup de Blancs croient - pas seulement dans le Sud mais dans tout le pays - que les Afro-Américains ne sont pas qualifiés pour diriger cette grande nation. C'est une attitude abominable et cela me peine et me préoccupe beaucoup», a déclaré l'ancien président, qui vit en Géorgie, lors d'une entrevue diffusée lundi soir sur la chaîne de télévision NBC.

L'ancien président faisait notamment référence à la colère exprimée contre Barack Obama lors des réunions publiques sur la réforme du système de santé et de la manifestation anti-gouvernement de samedi dernier à Washington. Il n'était pas le premier démocrate à relier au racisme une partie de l'opposition au premier président noir des États-Unis. Certains élus de son parti ont d'ailleurs tenu le même discours lundi lors du débat à la Chambre des représentants qui a précédé l'adoption d'une résolution de «désapprobation», par 240 voix contre 179, pour sanctionner Joe («Vous mentez!») Wilson.

Mais Jimmy Carter est de loin le démocrate le plus important à exprimer une telle opinion. Les critiques de Barack Obama ont dénoncé avec vigueur son commentaire.

«C'est une diversion pathétique orchestrée par les démocrates pour faire oublier l'impopularité des propositions du président en matière de santé», a déclaré Michael Steele, le premier président noir du Parti républicain. «Dire que l'opposition des Américains à l'égard des politiques du président Obama est reliée à la couleur de sa peau constitue un outrage et démontre de façon troublante jusqu'où les démocrates sont prêts à aller pour dénigrer tous ceux qui ne sont pas d'accord avec eux.»

La Maison-Blanche s'est gardée d'appuyer les dires de Jimmy Carter.

«Le président ne croit pas que la critique à son endroit soit reliée à la couleur de sa peau», a déclaré le porte-parole de la présidence, Robert Gibbs.

Larry Sabato, politologue à l'Université de Virginie, espère, de son côté, que le commentaire de Jimmy Carter servira de point de départ à une réflexion sur la critique au temps de Barack Obama.

«Carter a partiellement raison», a-t-il déclaré au cours d'un entretien téléphonique. «Des millions d'Américains fondent en partie leur jugement du président Obama sur la couleur de sa peau. C'était évident durant la campagne de 2008. Mais il a gagné. Il n'y a pas beaucoup de sociétés qui élisent à la présidence un membre d'un groupe minoritaire qui a été longtemps opprimé.

«Cela dit, nous devons trouver un terrain d'entente sur la façon dont nous allons procéder pendant la présidence d'Obama. Nous devons être capables de critiquer le président. C'est notre sport national. Le compromis évident est d'éviter les caricatures grossières et les stéréotypes. Mais nous devons permettre une critique libre et vigoureuse des politiques d'Obama. Agir autrement serait également raciste.»