Barack Obama semble déterminé à en finir avec la politique de l'administration Bush concernant les interrogatoires de terroristes présumés. Le président a approuvé la création d'une unité spéciale d'interrogateurs placée sous la responsabilité de la Maison-Blanche, et le ministre de la Justice pourrait rouvrir les dossiers des interrogatoires musclés de la CIA.

Un haut responsable gouvernemental a déclaré à l'Associated Press lundi, sous le couvert de l'anonymat, que, comme l'affirmait le «Washington Post», Barack Obama avait donné son feu vert à la mise en place du Groupe d'interrogation des détenus de haute valeur (High-Value Detainee Interrogation Group, HIG) sous supervision du Conseil de la sécurité nationale (NSC). Cela ne signifie pas que la CIA est dessaisie des interrogatoires, a assuré Bill Burton, porte-parole adjoint de la Maison-Blanche. Virulent détracteur de la politique de son prédécesseur George W. Bush en matière d'interrogatoires, M. Obama s'est récemment déclaré peu enclin à poursuivre les responsables gouvernementaux dans des affaires de violences sur des prisonniers, mais le bureau de l'éthique du ministère de la Justice recommande précisément le contraire.

Peu après son arrivée à la Maison-Blanche en janvier dernier, le président a créé des groupes de travail chargés d'étudier la politique et les pratiques des États-Unis concernant le traitement des détenus soupçonnés de terrorisme. Il a également décidé de fermer le camp de Guantanamo d'ici la fin de l'année et de mettre fin au statut extrajudiciaire de ses prisonniers.

À l'heure où Washington annonce la création de l'unité HIG, le groupe de travail sur le sort de Guantanamo et de ses prisonniers n'a pas encore achevé sa tâche.

L'HIG devra suivre le seul Manuel de terrain de l'armée pour l'interrogatoire des prisonniers, ce qui devrait mettre fin à certaines pratiques souvent assimilées à de la torture, comme l'exposition prolongée à de la musique forte ou la privation de sommeil. La technique du «waterboarding», ou simulation de noyade, utilisée et justifiée par l'administration Bush, est déjà interdite.

Selon Bill Burton, la CIA ne sera pas mise à l'écart et l'HIG inclura des «tous ces différents éléments dans un seul groupe». L'unité sera basée au siège du FBI à Washington et sera dirigée par un responsable de la police fédérale. Le directeur-adjoint sera issu de l'appareil fédéral du renseignement et les membres des différentes agences de renseignement et de sécurité.

L'HIG sera supervisée directement par la Maison-Blanche mais ce seront les dirigeants de l'unité qui prendront les décisions opérationnelles, ont affirmé de hauts responsables gouvernementaux. D'après ces mêmes sources, dans le cas de transfert de suspects de terrorisme vers d'autres pays, les États-Unis prendront davantage d'assurances de ce que le prisonnier ne sera pas torturé.

Les méthodes d'interrogation de la CIA étaient encore à l'ordre du jour lundi avec la publication attendue d'un rapport de l'inspection générale des services secrets sur le traitement des suspects à l'ère Bush. Des techniques très discutables devraient être de nouveau exposées, comme des simulacres d'exécution, et un cas de menaces avec une perceuse. Menacer un prisonnier de mort constitue une violation de la législation américaine contre la torture.

L'examen des allégations de violences commises sur des prisonniers, d'abord annoncé par le «New York Times», pourrait par ailleurs déboucher sur la mise en cause d'employés de la CIA ou de sous-traitants de l'agence dans le traitement des terroristes présumés, notamment des membres supposés d'Al-Qaeda, depuis les attentats du 11 septembre 2001.

Bill Burton a affirmé que le ministre de la Justice Eric Holder prendrait seul sa décision quant à la recommandation du bureau d'éthique, sans intervention du président Obama.