Le débat virulent qui a opposé François Hollande à Nicolas Sarkozy mercredi soir a confirmé l'avantage du socialiste face au président sortant, même si les deux hommes estimaient jeudi que rien n'était encore joué à trois jours du second tour de la présidentielle.

Très «violent», mais sans K.O., le débat de presque trois heures a mis en valeur les différences entre les deux hommes, qui ont rendu coup pour coup, de l'économie à l'immigration en passant par le style de présidence.

«L'opinion interprétera ce débat comme un match nul avec un avantage pour François Hollande uniquement parce que Nicolas Sarkozy était le président sortant. Cela ne fera pas bouger les choses», a estimé le politologue proche de la gauche Gérard Le Gall.

Selon un sondage de l'institut LH2 pour Yahoo! publié jeudi, François Hollande a été jugé légèrement plus convaincant (45%) que Nicolas Sarkozy (41%).

Jeudi matin, le président conservateur Nicolas Sarkozy, qui a qualifié lors du débat son adversaire de «petit calomniateur», a jugé leur face à face «assez républicain». «Jamais une élection n'aura été aussi indécise» et le résultat du second tour «se jouera dans un mouchoir de poche», a-t-il ajouté sur RTL.

«Je pensais que ce serait âpre et cela l'a été (...), mais c'est sur mes propositions que le débat a tourné», a jugé de son côté François Hollande sur France 2. Le scrutin de dimanche comprend «encore bien des inconnues», a-t-il prévenu.

Les deux hommes repartaient immédiatement en campagne, pour le tout dernier sprint avant le scrutin de dimanche. Après les interviews à la radio et à la télévision, Nicolas Sarkozy devait tenir un rassemblement en fin d'après-midi à Toulon (sud-est), François Hollande à Toulouse (sud-ouest).

Pour la plupart des éditorialistes, le débat «ne devrait pas provoquer de séisme électoral», alors que le favori des sondages François Hollande est donné largement vainqueur avec 53 à 54% des voix.

«La seule faiblesse de François Hollande par rapport à Nicolas Sarkozy, être quelqu'un de mou et de flou, a été cassée hier soir», selon Gaël Sliman, de l'institut de sondage BVA.

La gauche a aussitôt revendiqué la victoire. «Hollande préside le débat», titrait en une le quotidien de gauche Libération.

«Je crois vraiment qu'hier soir la France a trouvé son président en François Hollande», a déclaré jeudi la patronne du Parti socialiste Martine Aubry.

Le quotidien de droite Le Figaro, proche de Nicolas Sarkozy, croit de son côté encore à la victoire face à «François Hollande, son langage daté et sa gauche disparate».

«Sarkozy a poussé Hollande au plus loin de ses retranchements, au point que Hollande a vacillé, ce qu'il a immédiatement compensé par une certaine agressivité», a estimé le patron du parti présidentiel UMP Jean-François Copé.

Les invectives ont volé au-dessus de la table de 2,50 mètres qui séparait les deux hommes mercredi soir.

François Hollande a surpris en rompant avec son image d'homme consensuel pour passer régulièrement à l'offensive. Sur le style de son éventuelle future présidence, il a longuement énuméré les différences qu'il apporterait à la manière d'exercer la fonction. Chacune de ses phrases commençant par: «Moi, président de la République, je....».

Le ministre de l'Intérieur Claude Guéant, proche de Nicolas Sarkozy, a accusé jeudi François Hollande de s'être montré «plein d'arrogance», mais a aussi reconnu que le socialiste avait été «très pugnace».

Après la chef de l'extrême droite Marine Le Pen qui a implicitement appelé à voter blanc mardi, c'est jeudi soir que le candidat centriste François Bayrou, qui a obtenu 9,1% des voix au premier tour le 22 avril, devait annoncer sa position pour le second tour.

Les responsables de son parti, le Modem, sont partagés entre partisans d'un vote blanc et partisans d'un soutien à François Hollande, selon l'un d'eux.

Mais les consignes de vote de M. Bayrou, comme le duel de mercredi, ne semblaient pas devoir inverser une tendance constante depuis le début de la campagne: course en tête pour François Hollande, avec un écart jamais inférieur à six points dans les sondages. Soit quelque 2 millions de voix.

Le duel télévisé a réuni 17,79 millions de téléspectateurs sur sept chaînes. Dimanche, ce seront plus de 46 millions d'électeurs qui seront appelés aux urnes pour élire le président de la cinquième puissance mondiale.