Les États-Unis ont utilisé pour la première fois mercredi une base turque pour envoyer des avions bombarder les positions du groupe djihadiste État islamique (EI) en Syrie, alors que le président turc Erdogan a réitéré sa «détermination» dans sa «guerre contre le terrorisme» visant les rebelles kurdes et l'EI.

«Aujourd'hui, les États-Unis ont commencé des missions avec pilote contre l'EI depuis la base aérienne d'Incirlik, en Turquie. Des frappes ont été menées», a déclaré la commandante Elissa Smith, porte-parole du Pentagone.

Selon elle, ces missions font suite au feu vert donné en juillet par Ankara aux Américains pour utiliser cette base du sud du pays pour mener l'offensive contre l'EI en Syrie.

Jusqu'à présent, la coalition menée par les Américains n'avait utilisé la base turque d'Incirlik que pour envoyer des drones en Syrie tandis que ses avions de chasse s'élançaient de porte-avions ou d'autres sites militaires dans la région.

Membre de l'OTAN, la Turquie avait jusqu'à récemment refusé de participer aux opérations de la coalition contre l'EI, de peur de favoriser l'action des Kurdes de Syrie combattant sur le terrain les djihadistes à proximité de sa frontière.

Mais l'attentat survenu le 20 juillet à Suruç, qui a fait 32 morts et attribué à l'EI, a changé la donne et contraint Ankara à effectuer un tournant stratégique.

PKK, principale cible

S'exprimant devant un parterre d'élus locaux réunis dans son palais à Ankara, le président islamo-conservateur Recep Tayyip Erdogan a promis mercredi de poursuivre avec «détermination» les opérations armées contre les rebelles en Turquie, confrontée à une vague de violences.

La guérilla du PKK est dans la ligne de mire de la Turquie, qui a lancé le 24 juillet une «guerre contre le terrorisme».

Officiellement, si l'armée vise à la fois les rebelles kurdes et les combattants du groupe État islamique (EI), dans les faits, les raids ciblent essentiellement les bases arrières du PKK en Irak.

«Ces opérations vont se poursuivre (...) Nous allons mener cette lutte avec détermination. Nous ne nous arrêterons jamais», a dit le président turc devant un parterre d'élus locaux réunis dans son palais, à Ankara.

Le processus de paix engagé en 2012 avec le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) est «gelé», a-t-il martelé, affirmant que les combats dureraient jusqu'à ce que les rebelles kurdes «quittent la Turquie et enterrent leurs armes».

Sur le terrain, les accrochages, désormais quotidiens depuis trois semaines entre les forces d'Ankara et les rebelles kurdes, se sont poursuivis mercredi.

Dans la région d'Hakkari, à la frontière avec l'Iran et l'Irak, des policiers turcs et des militants kurdes se sont affrontés mercredi après les funérailles d'un responsable du PKK, tué dans des combats avec l'armée la veille.

Un autre rebelle du PKK a été tué dans l'est et 20 autres se sont rendus à l'armée dans le sud-est, a précisé l'état-major turc, tandis qu'un soldat est mort dans une attaque à la roquette près de Diyarbakir.

Crise politique

Recep Tayyip Erdogan s'est aussi vivement attaqué au parti prokurde HDP (Parti démocratique des peuples), dont la percée lors des élections législatives (13% des suffrages, 80 députés sur 550) a privé son Parti de la justice et du développement (AKP, au pouvoir) d'une majorité gouvernementale.

Le pouvoir turc accuse ce parti, union de courants kurdes et d'une partie de la gauche, d'être largement à la solde du PKK. La justice pourrait d'ailleurs lancer contre le HDP une procédure d'interdiction pour «terrorisme».

Outre les violences, la Turquie, privée de gouvernement depuis les législatives du 7 juin, est en proie à une crise politique.

L'AKP a entamé le 13 juillet des pourparlers avec le parti social-démocrate CHP, deuxième force du Parlement, pour former trouver un accord sur un gouvernement de coalition avant le 23 août. En cas d'échec, le président convoquera de nouvelles élections.

Le premier ministre en exercice, Ahmet Davutoglu, et le chef du CHP, Kemal Kiliçdaroglu, doivent se rencontrer une dernière fois jeudi après-midi.