Des raids meurtriers ont frappé mercredi les territoires rebelles dans le sud syrien, des organisations humanitaires tirant la sonnette d'alarme face à l'offensive du régime et de son allié russe, qui fait craindre une nouvelle crise humanitaire.

Après avoir consolidé son pouvoir sur la capitale Damas et ses environs en chassant factions rebelles et groupes djihadistes, le pouvoir de Bachar al-Assad a porté son attention sur le sud, une région sensible bordant la frontière avec la Jordanie et le plateau du Golan, en partie occupé par Israël.

Les forces du régime, appuyées par des raids russes, ont lancé mardi une offensive contre les quartiers insurgés de la ville de Deraa, après une semaine de bombardements meurtriers visant principalement l'est de la province.

Mercredi, dix civils, dont trois enfants, ont été tués dans les raids aériens et tirs d'artillerie visant l'est de la province de Deraa, selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH).

Dans la nuit de mardi à mercredi, trois hôpitaux du même secteur ont été mis hors service - à Saïda, Al-Mseifra et Al-Jiza -, dans des bombardements pour certains imputés à la Russie, a annoncé l'ONG.

La fermeture de ces établissements porte à cinq le nombre d'hôpitaux mis hors service depuis le début des hostilités.

Et alors que les combats en une semaine ont poussé à la fuite des dizaines de milliers de personnes, plusieurs organisations humanitaires ont dénoncé des violences envers les civils.

L'«horreur» en Syrie

«L'horreur ne connaît aucune limite en Syrie, où les enfants sont encore une fois pris entre deux feux, dans la dernière vague de violence» qui ravage le sud, a déploré dans un communiqué la directrice du Fonds des Nations unies pour l'enfance (UNICEF), Henrietta Fore.

«Les enfants et les familles ont besoin de nourriture, (...) de médicaments et de protection», a-t-elle insisté.

Au total, au moins 56 civils ont été tués depuis le début des opérations dans la province de Deraa le 19 juin, selon l'OSDH.

«Les civils devraient avoir, comme toujours, la possibilité de fuir la violence et de chercher refuge et protection ailleurs», a de son côté déploré le Comité international de la Croix-Rouge, appelant les belligérants à «épargner les civils» et «les infrastructures essentielles à leur survie».

Dans le sud, les insurgés contrôlent encore 70% de la province de Deraa et de la région voisine de Qouneitra.

Mais le régime syrien, qui enchaîne les victoires et contrôle désormais 65% du territoire, est déterminé à asseoir son pouvoir sur l'ensemble du pays, ravagé depuis 2011 par une guerre meurtrière qui a fait plus de 350 000 morts.

Frontière fermée

Au total, quelque 750 000 civils vivant en zone rebelle dans le sud sont menacés par les opérations militaires, a récemment averti l'ONU.

«Ce que nous avons vu à Alep, dans le nord rural de Homs, dans la Ghouta orientale, se produit actuellement dans le sud, où des villes sont bombardées quotidiennement, des personnes déracinées», a déploré le directeur de l'ONG CARE pour la Syrie, Wouter Schaap.

Environ 45 000 civils ont été déplacés par les bombardements sur la province de Deraa, la majorité se rapprochant de la frontière avec la Jordanie, selon l'ONU.

Parmi eux, Ahmad Abazeid, un militant qui a fui Hirak, dans l'est de la province, pour trouver refuge dans un village voisin.

«Les gens sont perdus, ils ne savent pas où aller. Certains sont près de la frontière avec la Jordanie, d'autres de celle avec Israël», lâche-t-il. «Mais les avions les suivent où qu'ils aillent».

Réitérant la position officielle d'Amman, le chef de la diplomatie jordanienne Ayman al-Safadi a averti mardi soir que son pays ne pourrait pas accueillir un nouvel afflux de réfugiés.

«Nous allons continuer à faire tout ce que nous pouvons pour eux. Mais nous ne pouvons pas accueillir plus» de réfugiés, a-t-il indiqué sur twitter.

En Jordanie, quelque 650 000 réfugiés syriens ont été enregistrés auprès des Nations unies, mais les autorités évaluent leur nombre à près de 1,3 million.

Le refus d'Amman d'ouvrir une frontière fermée depuis 2016 inquiète.

«Avec les combats en Syrie, les gens sont de plus en plus acculés dans le sud. À terme, ils n'auront nulle part où aller», a déploré une autre ONG, le Conseil norvégien pour les réfugiés (NRC).