Le régime syrien a décrété mercredi une trêve de 72 heures dans les combats contre les rebelles coïncidant avec l'Aïd el-Fitr, une annonce saluée par Washington qui veut travailler avec la Russie sur une cessation des hostilités durable.

Néanmoins sur le terrain, même si elles ont baissé d'intensité, les violences se sont poursuivies surtout à Alep (nord), où régime et rebelles ont continué de bombarder les quartiers adverses, selon un correspondant de l'AFP sur place et une ONG.

Plusieurs groupes rebelles syriens ont indiqué qu'ils respecteraient la nouvelle trêve temporaire qui coïncide avec l'Aïd el-Fitr, marquant la fin du mois de jeûne musulman du ramadan, tout en soulignant douter du sérieux du régime de Bachar al-Assad.

« Un "régime de silence" est appliqué sur le territoire syrien pour une durée de 72 heures à partir de 1 h le 6 juillet (18 h GMT mardi, heure de Montréal) et jusqu'à vendredi à minuit », a indiqué l'armée dans un communiqué.

Selon une source de sécurité syrienne, la trêve concerne seulement les combats avec les groupes rebelles syriens alors que les organisations djihadistes État islamique (EI) et Front al-Nosra, branche syrienne d'Al-Qaïda, qui occupent de vastes régions du pays, en sont exclues.

En soirée, le Kremlin a annoncé que les présidents russe Vladimir Poutine et américain Barack Obama avaient eu une conversation téléphonique au cours de laquelle ils ont « confirmé leur volonté d'intensifier la coordination entre les militaires russes et américains en Syrie ». Il n'a pas donné de détails sur la forme que prendrait cette coordination.

« Mieux que rien »

Des militaires russes sont déployés en Syrie et aident les prorégime à combattre rebelles et djihadistes. Des conseillers militaires américains s'y trouvent également pour aider les forces kurdes et certains groupes rebelles notamment dans la lutte antidjihadistes.

De plus, l'aviation russe intervient au côté du régime et celle de la coalition internationale dirigée par les États-Unis cible l'EI.

La conversation Poutine-Obama est intervenue après que le secrétaire d'État américain John Kerry a annoncé espérer que l'annonce de la trêve « sera respectée par toutes les parties ».

« Nous sommes engagés dans des discussions avec diverses parties, dont la Russie sur la possibilité d'étendre » ce nouveau cessez-le-feu, a précisé M. Kerry en soulignant qu'une trêve de 72 heures n'était pas suffisante, mais « mieux que rien ».

Plusieurs groupes rebelles ont annoncé dans un communiqué leur respect de la trêve « tant qu'elle l'est par l'autre camp ». « Jusqu'à cet instant, il (le régime) ne l'a pas respectée vu qu'il a lancé plusieurs attaques en ce jour ».

Ces derniers mois, toutes les tentatives de faire respecter durablement les trêves entre rebelles et régime, notamment à Alep, ont échoué de même que les efforts d'un règlement du conflit qui a fait plus de 280 000 morts et poussé à la fuite des millions de personnes depuis 2011.

Alep bombardée

La nouvelle trêve temporaire risque elle aussi de voler en éclats.

L'artillerie du régime a continué, après l'annonce de la trêve, de bombarder, mais moins intensément, les quartiers Est sous contrôle des rebelles à Alep, selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH) qui a fait état d'un mort et de plusieurs blessés.

En soirée, l'aviation du régime a mené des raids sur un quartier rebelle. « Le régime a annoncé une trêve et immédiatement après il a bombardé avec un baril d'explosifs notre quartier, alors que c'est le premier jour de l'Aïd », a indiqué Rajab Tahan, un habitant du quartier rebelle Tarik al-Bab.

« Tôt le matin, les obus sont tombés sur le quartier » al-Machad, a par ailleurs déploré Ahmad Nassif, un habitant. « J'avais prévu de rendre visite à mes proches et amis et d'emmener mes enfants jouer, mais on a finalement décidé de rester à la maison par peur d'une reprise des bombardements ».

« J'espère que la situation se calmera un peu durant l'Aïd », a-t-il ajouté.

Les insurgés pour leur part ont tiré des roquettes sur les quartiers gouvernementaux d'Alep, enjeu stratégique de la guerre qui ravage le pays.

Même à Damas, l'ambiance n'était pas à l'optimisme. « Je ne crois pas à cette trêve, les précédentes ont été violées à plusieurs reprises », dit Saad al-Sawwas, technicien du son de 25 ans.

À Homs, troisième ville de Syrie, M. Assad a assisté à la prière de l'Aïd el-Fitr, alors que les sorties en public du président syrien sont assez rares.

Déclenchée en mars 2011 par la répression de manifestations réclamant des réformes, la révolte contre le régime s'est transformée en guerre dévastatrice impliquant une multitude d'acteurs locaux, régionaux et internationaux, ainsi que des groupes djihadistes.