Le régime de Damas a donné son accord au projet américano-russe de cessez-le-feu en Syrie, l'opposition l'ayant accepté sous conditions, tandis que John Kerry a évoqué un plan «B» en cas d'échec du processus diplomatique.

L'entrée en vigueur de la trêve, prévue pour vendredi, pourrait cependant être entravée car elle n'implique pas d'influents groupes djihadistes comme le groupe État islamique (EI) et le Front Al-Nosra, branche syrienne d'Al-Qaïda, qui contrôlent de larges pans du territoire syrien.

Le ministère syrien des Affaires étrangères a indiqué mardi à l'AFP que le régime acceptait la trêve, mais qu'il poursuivrait ses «opérations militaires pour lutter contre le terrorisme de Daech (acronyme en arabe de l'EI), le Front Al-Nosra et les autres groupes terroristes qui leur sont liés».

Le gouvernement syrien est prêt à se coordonner avec les Russes pour déterminer quelles sont les régions et les groupes armés qui feront l'objet du cessez-le-feu, a ajouté le ministère dans un communiqué.

Depuis le début en 2011 du conflit en Syrie, qui a fait plus de 270 000 morts selon un nouveau bilan de l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), le régime ne fait aucune distinction entre militants, rebelles et djihadistes, les qualifiant tous de «terroristes».

Les groupes clés de l'opposition, réunis dans le Haut comité des négociations (HCN), avaient annoncé lundi qu'ils acceptaient le cessez-le-feu à condition que les dispositions de la résolution 2254 de l'ONU soient respectées, dont celles prévoyant un accès aux civils dans les zones assiégées et la livraison d'aide humanitaire.

Des convois humanitaires étaient en route mardi vers Mouadamiyat al-Cham et Kafra Batna - deux localités rebelles de la périphérie de Damas assiégées par le régime - pour livrer de l'aide à plusieurs dizaines de milliers de civils, selon l'ONU.

La semaine dernière, une centaine de camions avaient livré de l'aide à 80 000 personnes dans cinq zones assiégées, dont Mouadamiyat al-Cham.

«Plan B»

Parallèlement, le secrétaire d'État américain John Kerry a admis mardi au Sénat qu'un éventuel «plan B» pour la Syrie était examiné en cas d'échec du processus diplomatique et politique que les États-Unis et la Russie tentent de faire avancer notamment via le cessez-le-feu attendu vendredi.

Les accords internationaux prévoient aussi un processus de transition politique, comme des élections et une Constitution dans les prochains mois.

«Nous allons savoir dans un mois ou deux si ce processus de transition est vraiment sérieux», a relaté M. Kerry, qui mise tout depuis trois ans sur la diplomatie pour trouver une porte de sortie à la guerre. «Si ce n'est pas le cas (...) des options d'un plan B sont évidemment examinées», a-t-il insisté, mais sans donner de précisions.

Des informations sur cet hypothétique «plan B», qui mettrait davantage l'accent sur l'option militaire, ont circulé début février entre des diplomates et dans la presse.

«Difficilement applicable»

Sur le terrain, des rebelles et des civils ont exprimé leurs doutes sur le cessez-le-feu.

«C'est un accord difficilement applicable», a affirmé à l'AFP Abou Ibrahim, un commandant de la faction rebelle «Brigade 10» qui combat les troupes loyalistes dans l'ouest et le nord-ouest du pays. «Qui peut garantir que le régime cesse ses frappes (contre les rebelles)?».

Pour certains, c'est surtout l'exclusion du Front Al-Nosra, allié à des groupes rebelles dans plusieurs régions, qui est un obstacle majeur à l'entrée en vigueur de la trêve.

«Les milices alliées du régime (...) seront à l'abri de tout acte hostile mais eux auront le droit d'attaquer les zones contrôlées par Al-Nosra et l'EI», indique le militant Zein el-Basha, originaire de Damas, sur sa page Facebook.

De son côté, la Turquie, farouche opposante au régime de Damas, a salué l'accord de cessez-le-feu mais s'est déclarée peu optimiste sur sa portée. Elle a en outre promis, en cas d'attaque, de riposter à sa frontière contre les milices kurdes qu'elle bombarde depuis plus d'une semaine dans le nord de la Syrie.

Les dirigeants français, américain, allemand et britannique, qui ont eu un entretien téléphonique sur le cessez-le-feu en Syrie, ont souhaité que l'accord puisse entrer en vigueur «dans les meilleurs délais», selon l'Élysée.