Les États-Unis ont fermement condamné les tirs de missiles sur la ville syrienne d'Alep, au lendemain de l'annonce par l'opposition syrienne qu'elle suspendait sa participation à plusieurs rencontres à l'étranger pour dénoncer le «silence international sur les crimes» commis par le régime.

Dans le même temps, la Coalition de l'opposition a annoncé la création prochaine d'un gouvernement en zone rebelle qui, selon des experts, devrait lui permettre de rattraper son retard sur les groupes islamistes implantés sur le terrain et pousser à l'action une communauté internationale récalcitrante.

Le chef de la Coalition, Ahmed Moaz al-Khatib, a affirmé que le retrait de l'opposition des réunions internationales était «un message de protestation adressé à tous les gouvernements du monde qui voient comment le peuple syrien est en train d'être tué et ne font que regarder».

Ce cri est lancé alors qu'aucune issue n'est en vue dans ce conflit qui a fait selon l'ONU plus de 70 000 morts en près de deux ans.

Assimilant le «silence international» à «une participation à la tuerie», l'opposition a dit qu'elle allait suspendre sa participation à la prochaine réunion des Amis du peuple syrien, prévue le 28 février à Rome, de même que ses visites en Russie, allié du régime de Bachar al-Assad, et aux États-Unis.

Elle a affirmé tenir en particulier aux dirigeants russes «pour responsables éthiquement et politiquement, car ils continuent à soutenir le régime par les armes».

M. Khatib était attendu dans les prochaines semaines à Moscou. Il avait aussi été invité à Washington par le sous-secrétaire d'État William Burns.

«Nous ne pouvons visiter aucun pays s'il n'y a pas de décision claire concernant ce régime sauvage et barbare», a affirmé M. Khatib au Caire, en référence au régime de M. Assad.

Londres a appelé l'opposition à reconsidérer sa décision, affirmant préparer «une nouvelle offre de soutien à la Coalition à Rome».

«Si vous êtes nos vrais amis, aidez-nous à arrêter les massacres qui sont en train d'être commis contre notre peuple», a répliqué le porte-parole de la Coalition, Walid al-Bounni.

«Le gouvernement des États-Unis condamne dans les termes les plus forts les tirs de missiles contre Alep, l'attaque la plus récente ayant été lancée au moyen de Scuds sur un quartier de l'est de la ville», a déclaré la porte-parole du département d'État Victoria Nuland dans un communiqué.

«Nous attendons avec impatience de rencontrer les représentants légitimes du peuple syrien, la Coalition de l'opposition syrienne, afin de discuter de la manière avec laquelle les États-Unis et d'autres amis du peuple syrien peuvent faire plus pour l'aider à achever la transition politique qu'ils demandent et qu'ils méritent», a encore indiqué la porte-parole.

Un gouvernement «rebelle»

La Coalition, reconnue par plusieurs pays occidentaux comme le représentant légitime du peuple syrien, a aussi annoncé son intention de former un gouvernement chargé de gérer les territoires rebelles. Elle se réunira le 2 mars à Istanbul pour décider de la composition de ce cabinet «provisoire» et choisir son chef.

Souvent accusée d'être déconnectée du terrain, l'opposition «veut établir une présence en Syrie qui lui donnerait plus de crédibilité», a commenté Salman Shaikh, directeur du Brookings Doha Center.

Sur le terrain, les violences ne montrent aucun signe de répit, faisant samedi au moins 64 morts, dont 34 civils, à travers le pays, selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), qui s'appuie sur un large réseau de militants et de sources médicales civiles et militaires.

Vendredi, au moins 37 personnes, dont 19 enfants, avaient été tuées par trois missiles sol-sol à Alep (nord). Selon des militants, ces missiles étaient des Scud tirés de la région de Damas. Cette information n'a pu être vérifiée de source indépendante.

Et selon une source militaire s'exprimant sous couvert de l'anonymat, des renforts sont en route pour l'aéroport international d'Alep, où des combats opposent soldats et rebelles «qui ont utilisé des matériaux explosifs sur les routes pour essayer d'empêcher la progression des troupes».

Dans la province de Deir Ezzor (est), les rebelles ont pris le contrôle total d'Al-Kibar, un site détruit en 2007 par Israël qui soupçonnait Damas d'y abriter des activités nucléaires, s'assurant ainsi le contrôle de la route reliant la ville de Deir Ezzor à celle Raqa, plus au nord-ouest, selon l'OSDH.

De violents combats ont éclaté dans la nuit de samedi à dimanche, à la frontière entre la Syrie et le Liban, entre l'armée syrienne d'un côté et des hommes armés de l'autre, selon un responsable des services de sécurité libanais. La source, qui n'a pas fait état de victime dans l'immédiat, n'était pas en mesure de préciser si les hommes armés étaient des Libanais ou des Syriens opposés au régime de Damas.

Ces violences ont éclaté quelques heures après la mort d'un Libanais par des tirs en provenance du côté syrien, alors qu'il se trouvait à proximité d'un fleuve séparant les deux pays.