Le médiateur international Lakhdar Brahimi a appelé à une trêve en Syrie durant la grande fête musulmane d'Al-Adha fin octobre, alors que le conflit dévastateur est entré lundi dans son 20e mois.

L'appel de M. Brahimi, en tournée régionale, survient alors que les combats entre rebelles et troupes gouvernementales ne connaissent aucun répit dans le pays, où plus de 33 000 personnes, dont une majorité de civils, ont péri en 19 mois, selon une ONG syrienne.

L'armée syrienne, qui bombarde quotidiennement les fiefs rebelles, a par ailleurs démenti avoir recours à des bombes à sous-munitions comme l'en accuse l'ONG Human Rights Watch.

Alors qu'aucune solution au conflit n'est en vue en raison des divergences entre les pays occidentaux d'une part et la Russie, la Chine et l'Iran d'autre part, l'Union européenne a renforcé lundi ses sanctions contre le régime du Bachar al-Assad.

Lors d'une visite à Téhéran, un allié de M. Assad, M. Brahimi a «appelé les autorités iraniennes à aider pour la mise en oeuvre d'un cessez-le-feu en Syrie durant l'Aïd al-Adha» et «souligné l'urgence de mettre fin au bain de sang».

Cette grande fête musulmane sera célébrée cette année du 26 au 28 octobre.

L'Iran a proposé de son côté à M. Brahimi une «période de transition aboutissant à la tenue d'élections présidentielle et législative (...) sous la supervision du président Assad», selon le vice-ministre iranien des Affaires étrangères Hossein Amir-Abdollahian.

Le 10 octobre, Damas avait rejeté un appel du chef de l'ONU Ban Ki-moon à décréter un cessez-le-feu unilatéral.

«Une menace pour la paix dans le monde»

Après Téhéran, M. Brahimi s'est rendu lundi à Bagdad dont le gouvernement se garde d'appeler au départ de M. Assad.

À l'issue de ses entretiens avec les dirigeants irakiens, M. Brahimi a déclaré avoir «discuté de la Syrie, de ses multiples problèmes et du danger que cela représente pour le peuple syrien, les voisins de la Syrie et la paix dans le monde».

Le Premier ministre Nouri al-Maliki, de son côté, a réitéré le «soutien» de l'Irak aux efforts de l'émissaire «pour parvenir à une solution politique à la crise», selon son bureau.

M. Brahimi a par ailleurs démenti qu'il envisageait de demander le déploiement d'une force de maintien de la paix en Syrie, comme l'avait affirmé un dirigeant de l'opposition syrienne depuis Doha.

Après l'Arabie saoudite, la Turquie, l'Iran et l'Irak, l'émissaire doit se rendre en Égypte où, selon une source au sein de la Ligue arabe, il devrait arriver lundi soir.

Sur le terrain, au moins 130 personnes ont péri lundi dans les violences, dont 78 civils, selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH).

Les violences n'ont pas épargné non plus le patrimoine historique. Joyau historique de la deuxième ville de Syrie, une partie de la Grande Mosquée des Omeyyades d'Alep a subi d'importants dommages en raison des combats, selon un correspondant de l'AFP.

À l'intérieur de cette mosquée construite au VIIIe siècle puis rebâtie au XIIIe siècle, des tapis étaient brûlés et le sol couvert de douilles et de vitres brisées, selon un correspondant de l'AFP sur place. Des reliques appartenant selon la tradition au prophète Mahomet ont été subtilisées.

Dimanche, l'armée a repris le contrôle de la mosquée que les rebelles avaient partiellement pris la veille.

Dans l'ancien poumon économique du pays, les rebelles ont multiplié leurs offensives meurtrières, selon l'OSDH.

Damas dément utiliser des bombes à sous-munitions

L'armée, forte de sa puissance aérienne, mène une contre-attaque au sud d'Alep et dans la région voisine d'Idleb pour reprendre des positions clés conquises par les insurgés.

Elle tente aussi de repousser une offensive rebelle contre la base militaire de Wadi Deif, la plus importante d'Idleb. Dans cette région, les insurgés ont encore une fois coupé la route à des renforts sur la route d'Alep, selon l'OSDH.

Les rebelles ont pris le contrôle le 9 octobre de la ville stratégique de Maaret al-Noomane située sur cette route, pouvant ainsi freiner l'acheminement des renforts militaires vers la métropole du Nord.

Dans un communiqué publié par l'agence officielle Sana, l'armée syrienne a démenti avoir recours à des bombes à sous-munitions contre les «groupes armés terroristes», appellation donnée aux rebelles.

Dimanche, HRW avait affirmé qu'elle avait récemment largué des bombes à sous-munitions «dans des zones habitées».

Le conflit se double d'une crise ouverte avec la Turquie voisine -qui soutient la rébellion et héberge plus de 100 000 réfugiés syriens- depuis la mort le 3 octobre de cinq civils turcs dans la chute d'un obus syrien près de la frontière.

Quelques jours après avoir intercepté un avion civil syrien accusé de convoyer du matériel militaire russe à destination du régime, la Turquie a procédé lundi au contrôle d'un avion de transport arménien à destination d'Alep.

Elle a en outre répété que l'avion syrien assurant la liaison Moscou-Damas intercepté mercredi transportait du «matériel de guerre», alors que selon la Russie il s'agissait d'équipement radar «légal».

Par ailleurs, une journaliste ukrainienne travaillant en Syrie, qui soutenait ouvertement le régime de Bachar al-Assad, a été enlevée par des rebelles syriens, ont annoncé lundi les autorités ukrainiennes.