(Séoul) Le secrétaire d’État américain Antony Blinken a dénoncé jeudi les liens militaires « croissants et dangereux » entre Pyongyang et Moscou, à l’issue d’une visite en Corée du Sud.

« Nous partageons de profondes inquiétudes concernant la coopération militaire croissante et dangereuse de la Corée du Nord avec la Russie », a déclaré M. Blinken lors d’une conférence de presse avec son homologue sud-coréen, Park Jin, en clôture de sa visite.  

Le diplomate américain a également appelé la Chine à utiliser son influence pour prévenir tout « comportement dangereux » de Pyongyang, tels que ses essais de missiles interdits.  

La Corée du Nord et son rapprochement avec la Russie, avec le risque de voir Pyongyang aider Moscou dans sa guerre en Ukraine en échange de technologies spatiales, figure en tête des préoccupations de Séoul et Washington, proches alliés.  

La guerre entre Israël et le Hamas a également été évoquée lors des rencontres de M. Blinken avec de hauts responsables sud-coréens jeudi, notamment avec le président Yoon Suk Yeol.  Le chef de la diplomatie américaine a remercié ce dernier pour la « promesse de la République de Corée de livrer de l’aide humanitaire au peuple de Gaza ».  

Plus tôt jeudi, il a rencontré le conseiller à la sécurité nationale Cho Tae-yong, saluant l’engagement de Séoul à aider l’Ukraine. Les deux hommes ont condamné l’envoi par Pyongyang d’armes à la Russie pour soutenir son effort de guerre.  

Antony Bliken est arrivé mercredi soir en provenance du Japon, où il a assisté à une réunion des ministres des Affaires étrangères du G7, après une tournée marathon au Moyen-Orient.

Un million d’obus

La menace nord-coréenne apparaît croissante depuis le voyage en septembre en Extrême-Orient russe du dirigeant nord-coréen Kim Jong-un, qui y a rencontré le président russe Vladimir Poutine. Cette rencontre a été suivie de plusieurs livraisons d’armement, selon Séoul, qui estime que la Corée du Nord a fourni un million d’obus à la Russie pour sa guerre en Ukraine, en échange de savoir-faire en matière de technologies spatiales.

Moscou a jugé ces affirmations « sans preuve ».

Selon les analystes, il existe un chevauchement technologique important entre les capacités de lancement dans l’espace et le développement de missiles balistiques intercontinentaux (ICBM), dont Pyongyang s’est vu interdire l’utilisation en vertu de multiples sanctions des Nations unies.

Satellite-espion

Depuis un an, la Corée du Nord a procédé à un nombre record d’essais de missiles et d’autres armes, en dépit des sanctions internationales. Elle a également déclaré « irréversible » son statut de puissance nucléaire.

« Compte tenu de la coopération renouvelée entre la Corée du Nord et la Russie, la Corée du Sud veut, à juste titre, que les États-Unis lui réaffirment leur soutien et leur engagement à respecter les sanctions de l’ONU. Cette visite est conçue à cette fin », a expliqué à l’AFP Benjamin A. Engel, professeur à l’Université nationale de Séoul.

Alliées historiques, la Russie et la Corée du Nord font toutes deux l’objet de lourdes sanctions internationales : Moscou pour son invasion de l’Ukraine et Pyongyang pour ses essais d’armes nucléaires.

La Corée du Nord cherche à mettre en orbite un satellite militaire espion, mais deux tentatives en ce sens ont échoué cette année. Séoul estime que la troisième tentative, actuellement en préparation, pourrait réussir grâce à l’aide de Moscou.

La visite de M. Blinken en Corée du Sud sera suivie de celle du ministre américain de la Défense, Lloyd Austin, pour réaffirmer la coopération militaire entre les deux pays.

En octobre, un bombardier américain B-52 capable de transporter des bombes atomiques a effectué une rare mission en Corée du Sud, moins d’une semaine après la visite dans un port sud-coréen du porte-avions à propulsion nucléaire USS Ronald Reagan.  

Les États-Unis cherchent aussi à resserrer leur alliance « triangulaire » avec la Corée du Sud et le Japon, pour se renforcer dans l’Asie-Pacifique face à la menace nord-coréenne, mais aussi répondre à la montée en puissance de la Chine.

La Corée du Sud, un exportateur d’armes majeur, devrait également subir des pressions de la part de Washington pour aider davantage l’Ukraine. Séoul s’en tient jusqu’à présent à une doctrine de longue date qui lui interdit de vendre des armes à des pays en guerre.