(Genève) La Chine détient de « façon arbitraire » le militant anticorruption Zhang Baocheng, arrêté en 2019 pour « promotion du terrorisme », a conclu le Groupe de travail de l’ONU sur la détention arbitraire, réclamant sa libération.

Dans un avis datant de novembre, mais rendu public par l’une des parties plaignantes lundi, ce groupe-dont les avis ne sont pas contraignants-souligne la détention « arbitraire » de ce défenseur des droits de l’homme.

Le Groupe de travail, composé de cinq experts, demande aux autorités chinoises de le libérer « immédiatement », de lui accorder une indemnisation et d’enquêter sur les circonstances ayant conduit à sa détention.

Pékin a intensifié les mesures répressives dont pâtissent militants et ONG depuis l’arrivée au pouvoir de Xi Jinping en 2012.

Le Groupe de travail de l’ONU souligne qu’au cours de ses 30 ans d’existence, il a constaté que la Chine avait violé ses obligations internationales en matière de droits dans plus de 1000 cas, s’inquiétant que cela « indique un problème systémique de détention arbitraire ».

Zhang Baocheng, 63 ans, faisait partie d’un réseau informel de militants exigeant notamment au cours de manifestations publiques la transparence du patrimoine du personnel politique.  Il avait été condamné en 2014 à deux ans de prison en raison de sa participation aux activités de ce groupe.

Il a été arrêté cinq ans plus tard parce que soupçonné d’« avoir cherché querelle et suscité des troubles, d’avoir fait la promotion du terrorisme et de l’extrémisme et d’avoir incité à commettre des activités terroristes » et purge une peine de trois ans et demi de privation de liberté à Pékin.

Ces charges sont, selon le Groupe de travail, « si vagues et si larges qu’elles pourraient être utilisées pour priver des individus de leur liberté sans base juridique spécifique ».

Les experts de l’ONU estiment qu’il n’y avait aucune information permettant de lier M. Zhang à des actes violents ou criminels spécifiques et notent que le principal élément apporté par l’accusation pendant le procès sont des tweets critiquant le traitement des Ouïghours dans le Xinjiang.

Des études occidentales accusent Pékin d’avoir interné dans des « camps » de cette région du nord-ouest de la Chine au moins un million de personnes, majoritairement ouïghoures, d’effectuer des stérilisations et des avortements « forcés » ou encore d’imposer des mesures de « travail forcé ».

La Chine rejette ces accusations et évoque des « centres de formation professionnelle » destinés à éloigner les habitants du Xinjiang de l’extrémisme religieux.

Pour les experts de l’ONU, il n’y avait aucune raison de priver M. Zhang de sa liberté, puisqu’il a simplement exercé son droit à la liberté d’expression et d’association. Ils estiment aussi que son procès n’était pas conforme aux normes internationales relatives à l’indépendance du pouvoir judiciaire et à l’équité des procès.

Ils se disent préoccupés par les conditions de sa détention « dans une prison surpeuplée, où les lumières restent allumées toute la journée et où il souffre d’une mauvaise alimentation et d’inspections physiques inhumaines ».

Le Groupe de travail a fait savoir qu’il ne s’était pas appuyé sur des informations fournies par le gouvernement chinois dans cette affaire, car les autorités avaient dépassé de plusieurs mois le délai de soumission.

L’ONG UN Watch, à Genève, a déclaré lundi être l’une des parties plaignantes dans cette affaire, aux côtés de l’ONG Citizen Power Initiatives for China, qui a son siège à Washington.

« Nous appelons les autorités chinoises à respecter la décision de l’ONU et à libérer immédiatement M. Zhang », a réagi le responsable d’UN Watch, Hillel Neuer.