(Le Caire) Les combattants d’une force paramilitaire et leurs alliés des milices arabes se sont déchaînés sur une ville de la région soudanaise du Darfour ravagée par la guerre, tuant plus de 800 personnes au cours d’une attaque qui a duré plusieurs jours, ont déclaré des médecins et l’Organisation des Nations unies (ONU).

L’attaque contre la ville d’Ardamata, dans la province du Darfour occidental, au début du mois, était la dernière d’une série d’atrocités au Darfour qui ont marqué la guerre de plusieurs mois entre l’armée soudanaise et les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR).

Le Soudan est plongé dans le chaos depuis la mi-avril, lorsque les tensions latentes entre le chef militaire, le général Abdel-Fattah Burhan, et le commandant des FSR, le général Mohamed Hamdan Dagalo, ont explosé en guerre ouverte.

La guerre a éclaté 18 mois après que les deux généraux ont renversé un gouvernement de transition lors d’un coup d’État militaire. La prise de pouvoir militaire a mis fin à la transition fragile et de courte durée du Soudan vers la démocratie, à la suite d’un soulèvement populaire qui a forcé le renversement du dictateur de longue date, Omar al-Bashir, en avril 2019.

Ces dernières semaines, les FSR ont progressé au Darfour, prenant le contrôle de villes entières dans cette région tentaculaire, malgré le retour des parties belligérantes à la table des négociations en Arabie saoudite à la fin du mois dernier. La première série de pourparlers, organisée par les États-Unis et l’Arabie saoudite, n’a pas permis d’établir un cessez-le-feu.

L’attaque d’Ardamata, qui a duré plusieurs jours, a eu lieu après que les FSR ont pris le contrôle d’une base militaire dans la ville après de brefs combats le 4 novembre avec les troupes, a déclaré Salah Tour, chef du Syndicat des médecins soudanais du Darfour occidental. Il a indiqué que l’armée s’était retirée de la base, ajoutant qu’environ deux dizaines de soldats blessés avaient fui vers le Tchad, le pays à l’ouest du Soudan.

Les porte-parole de l’armée et des FSR n’ont pas répondu aux demandes de commentaires.

Après avoir pris la base militaire, les FSR et leurs milices arabes alliées ont saccagé la ville, tuant des non-Arabes dans leurs maisons et incendiant des abris abritant des personnes déplacées, a dit M. Tour.

« Ils ont violemment attaqué la ville », a-t-il déclaré, ajoutant que les FSR et leurs milices avaient pris pour cible la communauté masalit.

« Ils allaient de maison en maison, tuant et arrêtant les gens. »

L’Association du Barreau du Darfour, un groupe de défense des droits de la personne, a accusé les combattants des FSR d’avoir commis « tous les types de violations graves contre des civils sans défense » à Ardamata. L’organisation cite une attaque du 6 novembre, au cours de laquelle les FSR ont tué plus de 50 personnes, dont un chef de tribu et sa famille.

Le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés a déclaré que plus de 800 personnes auraient été tuées et que 8000 autres auraient fui vers le Tchad. L’agence a toutefois affirmé que le nombre de personnes qui ont fui était probablement sous-estimé, en raison des difficultés d’enregistrement des nouveaux arrivants au Tchad.

L’agence a indiqué qu’environ 100 abris de la ville ont été rasés et que d’importants pillages y ont eu lieu, incluant l’aide humanitaire appartenant à l’agence.

Le Département d’État des États-Unis s’est dit « profondément troublé par les rapports de témoins oculaires faisant état de graves violations des droits de la personne commises par les FSR et les milices affiliées, notamment des meurtres à Ardamata et des attaques ethniques contre les dirigeants et membres de la communauté masalit ».

« Ces actions horribles mettent une fois de plus en évidence les abus commis par les FSR dans le cadre de leurs offensives militaires », a-t-il soutenu dans un communiqué.