(Le Caire) Des funérailles ont eu lieu dimanche soir dans deux églises du Caire pour les 41 victimes d’un incendie déclenché dans la matinée par un court-circuit au beau milieu d’une messe dans une église copte d’un quartier populaire de la capitale égyptienne.

L’église Abou Sifine — nommée d’après le saint Mercure de Césarée, révéré par les Coptes — est coincée dans une ruelle étroite d’Imbaba, quartier densément peuplé de la rive gauche du Nil.

Des centaines de personnes se sont rassemblées en soirée à l’intérieur et autour de deux églises de la capitale pour rendre hommage aux victimes de l’incendie qui a également fait 14 blessés avant que le feu ne soit maîtrisé.

« Le climatiseur d’une salle de classe au deuxième étage du bâtiment où se trouve l’église est tombé en panne et a dégagé une grande quantité de fumée, qui a été la cause principale des blessures et des décès », selon le ministère de l’Intérieur.

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L’église est au rez-de-chaussée d’un immeuble, séparé d’à peine quelques mètres par un vis-à-vis, surmonté d’une croix et abritant également un centre de services sociaux, selon un photographe de l’AFP.

Les Coptes sont la plus importante communauté chrétienne du Moyen-Orient et représente 10 à 15 des 103 millions d’Egyptiens à majorité musulmane.

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« Chercher les enfants »

Reda Ahmed, qui habite à proximité de l’église sinistrée, raconte que « les voisins se sont organisés pour aller chercher les enfants » quand le feu s’est déclenché.

Mais, a-t-il encore dit à l’AFP, « ceux qui revenaient ne pouvaient plus y retourner car l’incendie était trop important ».  

« Les ambulances sont arrivées après plus d’une heure […] les camions de pompiers aussi alors que la caserne se trouve à moins de cinq minutes », dénonce Mina Masry, un autre habitant.  

L’un des camions de pompiers intervenus pour éteindre le feu encombrait d’ailleurs quasiment toute la largeur de la rue.

Témoin du drame, Sayed Toufik décrit des scènes difficiles : « certains se sont jetés par les fenêtres pour échapper au feu, si vous regardez cette voiture, on voit les traces de l’impact laissé par une personne qui est maintenant hospitalisée, bras et dos cassés ».

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Un peu plus loin, près d’une voiture sur laquelle s’amoncellent bris de verre, débris et cendres, le père Farid Fahmy, officiant en l’église voisine de Mar Yemina, affirme que « le feu est parti d’un générateur qui s’est mis en route après une coupure d’électricité et a subi une surcharge ».  

Le parquet a annoncé une enquête.

Le président Abdel Fattah al-Sissi a dit avoir « mobilisé l’ensemble des services de l’État. »

Il a indiqué plus tard « avoir déjà donné des directives au génie militaire pour la reconstruction de l’église incendiée », selon un communiqué de la présidence.

Les autorités locales ont elles annoncé une aide d’environ 2500 euros pour chacune des familles des personnes décédées et de 500 euros pour les blessés.

La Conférence des Églises catholiques de Terre sainte et le grand imam de la plus haute institution de l’islam sunnite, al-Azhar, basée au Caire, ont présenté leurs condoléances au pape copte Tawadros II.  

Ils ont été précédés par M. Sissi qui a appelé Tawadros II, partisan proclamé du chef de l’État, premier président d’Égypte à assister chaque année à la messe de Noël copte alors que ses prédécesseurs y dépêchaient des représentants.

Le footballeur international égyptien Mohamed Salah a exprimé ses condoléances sur Twitter, souhaitant « un rétablissement rapide à tous les blessés ».

Dans la mégalopole tentaculaire du Caire, où des millions de personnes vivent dans des quartiers informels, les incendies accidentels ne sont pas rares.  

Dotée d’infrastructures vétustes et mal entretenues, l’Égypte connaît régulièrement des incendies meurtriers dans ses différentes provinces.

Une autre église lundi

Lundi déjà, une église avait pris feu à Heliopolis, quartier cossu de l’est du Caire, sans faire de morts ou de blessés.  

En mars 2021, au moins 20 personnes avaient péri dans l’incendie d’une usine textile dans la banlieue est du Caire. En 2020, deux incendies dans des hôpitaux avaient fait quatorze morts.  

Principale minorité du pays, les Coptes s’estiment tenus à l’écart de nombreux postes dans la fonction publique et déplorent une législation très contraignante pour la construction des églises et beaucoup plus libérale pour les mosquées.

Le sujet est sensible et le militant copte des droits de la personne Patrick Zaki a récemment passé 22 mois en détention pour « diffusion de fausses informations », à cause d’un article dénonçant des violations des droits des chrétiens en Égypte.

Les Coptes ont subi les représailles d’islamistes, notamment après le renversement par M. Sissi en 2013 du président islamiste Mohamed Morsi, avec des églises, des écoles et des maisons incendiées.

M. Sissi a récemment nommé pour la première fois de l’histoire un juge copte à la tête de la Cour constitutionnelle.