(Berlin) La ministre allemande des Affaires étrangères Annalena Baerbock a jugé mercredi que l’engagement militaire des Européens au Mali, où la junte au pouvoir vient d’expulser l’ambassadeur français, devait être réévalué.

« Au vu des dernières mesures prises par le gouvernement malien, nous devons honnêtement nous demander si les conditions pour le succès de notre engagement commun sont toujours réunies. Notre engagement n’est pas une fin en soi », a déclaré Mme Baerbock dans une interview au quotidien Süddeutsche Zeitung.

« Nous sommes en étroite concertation avec nos partenaires internationaux et l’Union européenne, notamment la France, sur la manière dont nous allons poursuivre notre engagement sur le terrain », a-t-elle affirmé.

« Nous allons également aborder ces questions primordiales avec le gouvernement malien dans les prochains jours », a-t-elle ajouté.  

Un porte-parole de son ministère a précisé lors d’une conférence de presse régulière à Berlin que la secrétaire d’État aux Affaires étrangères Katja Keul se rendrait jeudi au Mali pour y rencontrer « des soldats allemands, des représentants du gouvernement et de la société civile ».

Mme Baerbock réagissait à l’escalade des tensions ces dernières semaines entre le Mali et la France, son ancienne puissance coloniale.  

Les autorités maliennes, dominées par les militaires qui se sont emparés du pouvoir en août 2020, ont décidé lundi d’expulser l’ambassadeur de France.

En réaction, Paris a annoncé vouloir discuter dans les deux semaines avec ses partenaires européens du devenir de la présence militaire européenne dans ce pays. La France y est engagée depuis 2013, notamment avec la force Barkhane, pour lutter contre le djihadisme.

L’engagement au Mali est guidé par des objectifs à long terme, a cependant assuré la ministre allemande, pour qui il s’agit d’y assurer « la sécurité des personnes, la stabilité et le développement du pays ».  

Cependant, les objectifs de l’intervention de la Bundeswehr, l’armée allemande, notamment la « stabilisation et la pacification » au Sahel, ne sont actuellement « que très partiellement atteignables », a déclaré un porte-parole du ministère allemand de la Défense mercredi. Selon lui, les tensions récentes avec Bamako rendent l’intervention des forces européennes « de plus en plus difficile ».

L’armée allemande est actuellement engagée au Mali à travers deux missions : 328 soldats participent à la Mission de formation de l’Union européenne au Mali (EUTM), et 1170 soldats à la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA).  

En mai, le Bundestag doit décider si l’armée allemande poursuivra ou non ces deux missions.

La ministre allemande de la Défense, Christine Lambrecht, avait exclu le 22 janvier un retrait des soldats de la Bundeswehr déployés au Mali. Elle avait assuré qu’il ne fallait pas laisser la place aux mercenaires de la sulfureuse société paramilitaire russe Wagner, accusés par Paris d’être au Mali pour « soutenir » la junte.